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Bourse, de quoi sera fait demain ? Trois questions à Philippe Crevel

Epargne 24 mars 2020

Trois questions à Philippe Crevel

La crise du coronavirus est à l’origine d’une chute brutale des indices boursiers. Comment expliquez-vous une telle réaction ?

Nous vivons une crise sanitaire mondiale. C’est une première depuis l’épidémie de grippe espagnole de 1918/1920. Au-delà du problème majeur de santé publique, cette crise provoque la mise en cape de toutes les grandes zones économiques. L’offre comme la demande sont à l’arrêt ou en quasi-arrêt. Les échanges commerciaux sont freinés et les investissements remis à plus tard. Dans un tel contexte, les indices actions ne pouvaient que plonger d’autant plus que les incertitudes l’emportent nettement sur les certitudes. Les investisseurs tentent de protéger leur capital en arbitrant en faveur des obligations des États les mieux notés. En l’état actuel, l’ampleur et la durée de la crise sont mal appréhendées conduisant les détenteurs d’actions à s’en délester. La valeur d’une action dépend non seulement des résultats actuels mais aussi des résultats projetés d’une entreprise. La baisse du cours des actions est liée à la crainte d’une diminution des bénéfices. Avec l’arrêt de l’économie mondiale, avec la réduction des échanges, les actions cotées des grands groupes se déprécient.

Les détenteurs d’actions sont nombreux à vendre afin d’obtenir des liquidités pour faire face à certaines échéances au moment où leurs recettes traditionnelles s’amenuisent, voire ont disparu. Cette recherche de liquidités explique la baisse du cours de l’or. La chute du cours des actions s a été aggravée par la forte baisse du prix du pétrole. En plus de la diminution de la demande avec l’arrêt de nombreuses usines à travers le monde, les pays producteurs n’ont pas réussi à s’entendre la mise en place d’un nouvel accord de régulation de la production, quand le précédent arrivera à échéance fin mars. L’Arabie Saoudite souhaite une réduction plus forte de la production quand la Russie s’y oppose. Face au blocage de la négociation, l’Arabie saoudite a décidé de ne plus contingenter sa production entraînant la baisse des cours, en espérant que les Russes reviendraient sur leurs positions. Cette chute des cours pénalise les pays producteurs et les entreprises du secteur pétrolier.

Un rebond du cours des actions à la fin des confinements est-il envisageable ?

Le phénomène baissier des indices accompagné d’une forte volatilité devrait se poursuivre tant que les incertitudes sur le terme de la crise sanitaire ne seront pas levées. La menace planant sur l’économie américaine devrait provoquer quelques soubresauts au niveau des marchés. Un rebond économique devrait intervenir dans les semaines suivant la fin des confinements. Il faudra quelques semaines pour retrouver les rythmes de production d’avant crise. Le retour à la normale, sous réserve d’une résorption réelle de l’épidémie, interviendrait au cours du troisième trimestre. Une gestion coordonnée de la crise économique par les États est un facteur clef pour la réappréciation des cours. Les marchés pourraient dans ces conditions dès le retour d’une certaine visibilité espérée pour le mois de mai. En cas de persistance de la menace épidémiologique avec la mise en place de confinement temporaire à répétition, les investisseurs devraient rester sur leur défensive, ce qui limitera autant la remontée des actions.

Inflation ou déflation au rendez-vous des prochains mois ?

Avec une demande aux abonnées absentes, la tendance est à la baisse des prix. La baisse du cours du pétrole et des principales matières premières en est un signe. Les agents économiques, au nom de l’aversion aux risques devraient encore accroitre leur épargne de précaution, avec une prédilection pour les placements liquides et sures. Une résurgence de l’inflation est imaginable en raison de l’augmentation des liquidités disponibles avec les politiques monétaires et budgétaires mises en œuvre depuis le début de la crise. Par ailleurs, au moment de la sortie des confinements, la demande pourrait augmenter plus rapidement que l’offre. La montée en puissance de la production nécessitera plusieurs semaines. La remise en route des usines fermées, leur alimentation en matières premières et en biens intermédiaires exigent un peu de temps. Cette inadéquation entre offre et demande est propice à une augmentation des prix d’autant plus que les agents économiques pourraient être tentés de compenser le manque à gagner accumulé durant les mois de mars et avril. Ce risque inflationniste est néanmoins assez limité. Entre 2008 et 2012, l’augmentation des bilans des banques centrales n’a pas eu d’incidence sur l’inflation au grand dam des pouvoirs publics. Par ailleurs, la sortie du confinement pourrait être progressive. En Chine, plus de trois mois après le début de l’épidémie, les centres commerciaux qui ont pu ouvrir n’ont pas été pris d’assaut. Les goulets d’étranglement au niveau de l’offre pourraient être limité avec le retour progressif à la normale de la Chine qui est le premier producteur industriel mondial. La spirale déflationniste est en l’état actuel la menace la plus importante. Elle pourrait être alimentée par la tentation du repli sur soi que cette crise alimente.  

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