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Nous avons appelé de nos vœux la baisse des taux d’intérêt pour échapper au spectre de la déflation. Nous avons craint les taux d’intérêt négatifs en considérant qu’ils faussaient les sacro-saintes lois du marché et qu’ils alimentaient des montagnes instables des liquidités. Depuis quelques jours, nous nous effrayons des conséquences d’une éventuelle remontée des taux. La hausse qui s’est amorcée depuis le début de l’année replace les taux à leur niveau de 2015 mais dans un contexte radicalement différent. À l’époque, l’inflation était nulle, voire négative. L’Europe peinait à sortir de la récession. Plusieurs pays étaient au bord de l’étouffement financier. Trois ans plus tard, la croissance au sein de la zone euro a franchi la barre des 2 %, le taux de chômage retrouve doucement mais sûrement son niveau d’avant crise. L’inflation est en hausse tout en restant encore éloignée, il est vrai, de l’objectif de 2 % fixé par la BCE. Dans ces conditions, la remontée des taux est logique et rassurante. En effet, avec un taux de croissance de 2 %, avec une inflation se situant autour de 1,5 %, nous devions avoir des taux à 4 % or, ils ne sont à 10 ans que de 1 %. Cela souligne tout le chemin qui nous reste à parvenir pour sortir de la répression financière dans laquelle nous évoluons depuis plus de 4 ans en Europe. Si dans les années 90, les épargnants pour des placements sans risque ont pu être trop rémunérés, en revanche, ils ont, depuis, supporté une érosion de leurs rendements financiers. Le retour de l’inflation pourrait les conduire, encore pour un certain temps, sur certains placements, à perdre de l’argent. Dans un univers financier gorgé de liquidités, le rééquilibrage entre les différentes classes d’actifs pourrait provoquer des turbulences. La volatilité qui avait eu tendance à se réduire, ces derniers mois, pourrait s’accentuer compte tenu des possibilités de gains et de pertes liées aux fluctuations possibles des taux et de leurs écarts entre les grandes zones économiques. Les mouvements de capitaux pourraient s’accélérer au détriment des pays émergents ou des pays à monnaie faible ou peu fiable. Les risques de carambolages ou de dérapages financiers ne doivent pas être exagérés. Les commentateurs aiment crier aux loups et les marchés de temps en temps ont tendance à y croire. Néanmoins, plusieurs points positifs doivent être pris en compte. La croissance est en accélération dans près de 120 pays. Les grandes entreprises annoncent des résultats en hausse. La baisse du chômage en Europe conduit à une amélioration des revenus et au maintien d’un bon niveau de consommation. Par ailleurs, plusieurs experts estiment qu’il était temps de freiner la marche en avant de l’endettement des acteurs privés, particuliers et entreprises. Une hausse des taux pourrait calmer le marché immobilier qui commençait à devenir irrationnel, en particulier en France.
Avec la hausse des taux d’intérêt, l’État devra dépenser plus en paiement d’intérêt. Une hausse d’un point devrait conduire à 3 à 4 milliards d’euros de dépenses supplémentaires sur une période de trois ans. Cela exigera la réalisation d’économies supplémentaires, mais elles seront facilitées par la reprise de la croissance et de l’inflation. En outre, il a été, à maintes reprises, souligné qu’il était indispensable de réduire le montant des dépenses publiques.
Le changement de cap des taux n’est donc pas en soi une mauvaise nouvelle. Elle est une normalisation qui amène, à juste titre, quelques inquiétudes, surtout que la phase de taux bas a été longue. Mais une partie du poids des obligations publiques faiblement rémunérées sera supportée en partie par la BCE, qui a effectué depuis trois ans d’importants rachats.
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