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Avantages et inconvénients de la gestion automatique des régimes de retraite

Retraite 10 janvier 2022

L’OCDE plaide pour la généralisation de système de correction automatique afin d’équilibrer en temps réel les régimes de retraite. L’organisation prend acte qu’il est de plus en plus difficile pour les gouvernements de réformer leur système de retraite. L’ajustement automatique est censé dédramatiser la question du financement des retraites et d’éviter des phénomènes d’à-coups. Compte tenu de l’acuité du problème de financement des régimes de retraite, cette solution serait la mieux à même pour garantir leur équilibre sur moyenne et longue période.

Des régimes de retraite sous tension

Pour l’OCDE, la situation financière des régimes de retraite s’est compliquée avec la survenue de la crise sanitaire. En revanche, l’organisation souligne que les retraités n’ont pas, sauf rares exceptions, été financièrement touchés par la crise. Elle indique que le nombre de retraités a néanmoins diminué de 0,8 % ; ceux-ci étant les principales victimes de l’épidémie en cours. Sur le long terme, cette dernière aurait peu d’incidence sur la progression du nombre de retraités. Malgré la réduction de l’espérance engendrée par le covid-19, au sein de l’OCDE, le vieillissement des pays occidentaux se poursuit, en effet, à vive allure. D’ici 2035, sans réforme, les dépenses de retraite augmenteront de 3,5 % du PIB au sein des États membres. Dans les pays d’Europe du Sud, d’Europe orientale ainsi qu’au Japon et en Corée, les populations d’âge actif se contracteront d’au moins 25 %. Ces dernières années, peu de pays ont adopté des mesures d’âge en raison d’une crispation des populations sur ce sujet. Les Pays-Bas et l’Irlande ont décidé de reporter ou d’abandonner le report de l’âge initialement prévu. La Suède a prévu néanmoins de relever l’âge minimum de la retraite pour les pensions publiques contributives et prévoit de l’indexer sur l’espérance de vie. Le Danemark, l’Italie ou la Lituanie ont élargi les mécanismes de retraite anticipée. Plusieurs États dont l’Allemagne ont amélioré le niveau des petites pensions. Compte tenu des mesures prises dans le passé, l’âge normal de la retraite devrait continuer de reculer, en moyenne de deux ans au sein de l’OCDE, d’ici 2060. Cet âge sera de 69 ans au Danemark, en Estonie, en Italie et aux Pays-Bas.

De nombreux États occidentaux ont opté pour une gestion pilotée de leur système de retraite

Deux tiers des États de l’OCDE ont mis en place des mécanismes d’ajustement automatique afin de limiter le recours à des réformes anxiogènes. En fonction de l’évolution d’indicateurs financiers, économiques ou démographiques, des dispositifs de compensation s’appliquent automatiquement. Le recul de l’âge de la retraite, l’allongement de la durée de cotisation, les modalités d’indexation, les taux de cotisations, etc., figurent parmi les facteurs pouvant être ajustés pour rétablir l’équilibre financier. Parmi les États ayant mis en œuvre de tels mécanismes :

  • 6 se sont dotés de régimes notionnels (prise en compte de l’espérance de vie pour calculer le montant des pensions) ;
  • 6 ont opté pour des systèmes dans lesquels l’âge de liquidation des droits varie en fonction de l’espérance de vie ;
  • pour 7 autres, c’est le montant des prestations qui peut varier.

La Suède conjugue un mécanisme qui prend en compte l’espérance de vie et un système de rééquilibrage des comptes financiers. La Finlande a adopté un ajustement automatique qui repose à la fois sur l’âge de liquidation et sur le montant des pensions.

La France, à la recherche de son modèle

La France depuis 2014 n’a pris aucune mesure significative sur les retraites. En raison de la crise sanitaire, la réforme instaurant le système universel par point a été suspendue. Son adoption aurait conduit à un pilotage non pas automatique mais simplifié. Les valeurs d’achat et de rachat du point auraient conditionné en grande partie l’équilibre du régime. Le Gouvernement d’Édouard Philippe avait, par ailleurs, prévu de retenir un âge d’équilibre qui aurait pu fluctuer en fonction de l’espérance de vie. Pour l’OCDE, une des faiblesses du système français de retraite provient de l’absence de dispositif de correction automatique des déséquilibres financiers. Elle estime que son introduction passe par une plus grande convergence des 42 régimes existants.

Le pilotage automatique permettrait une meilleure maîtrise des dépenses et un report plus facile de l’âge effectif de départ à la retraite. L’Organisation souligne que les dépenses de retraite hexagonales se sont accrues de 2,2 points de PIB depuis 2000, contre 1,5 point en moyenne chez les pays membres, malgré plusieurs réformes engagées depuis 1993. Elle remarque que seuls 33 % des 60-64 ans sont en emploi, contre 51 % dans l’OCDE, et l’âge moyen de sortie du marché du travail est de 60,6 ans contre 63,1 ans. Après 2035, date à laquelle l’augmentation de la durée de cotisation à 43 ans sera achevée, plus aucun mécanisme ne fera monter l’âge moyen de départ. Indiquant qu’ « en 2050, les personnes âgées de 65 ans devraient vivre 8 ans de plus qu’au début des années 1980 lorsque l’âge de la retraite fut abaissé à 60 ans. », les économistes de l’OCDE estiment qu’« un âge minimum qui serait maintenu à 62 ans (60 ans pour le dispositif carrières longues) paraît très bas ».

En France, les mécanismes de gestion automatique ont mauvaise presse, liant les mains des pouvoirs publics à des considérations plus ou moins techniques. La loi Fillon réformant les retraites de 2003 avait instauré une règle de partage des gains d’espérance de vie, deux tiers devant conduire à un allongement de la durée de cotisation et un tiers à l’allongement de la durée de la retraite. Cette règle a conduit au passage de 40 à 42 ans de la durée de cotisation. Elle a été abandonnée sous la présidence de François Hollande. Compte tenu de l’importance des retraites au sein de l’opinion publique, il a été jugé nécessaire que toute modification considérée comme substantielle donne lieu à un débat public et à une discussion parlementaire. Le Gouvernement d’Édouard Balladur qui, en 1993, avait allongé la durée de cotisation de 37,5 à 40 ans, retenu pour le calcul de la pension du régime de base, les 25 meilleures années en lieu et place des 10 meilleures et modifié les règles d’indexation, avait opté pour la voie réglementaire, ce qui lui avait été reproché. En France, par ailleurs, la fixation de règles automatiques n’empêche pas les gouvernements de s’y soustraire. Il en est ainsi fréquemment avec le taux du Livret A. À défaut, les gouvernements changent les règles en fonction de considérations politiques ou économiques. Que ce soit sur l’âge de la retraite ou sur le montant des pensions, les gouvernements étrangers sont également obligés de composer avec leur opinion publique et parfois de contourner les règles. Compte tenu des enjeux, la gestion des régimes de retraite suppose un minimum de souplesse même si l’existence d’un cadre prédéfini permet d’atténuer les tensions et de dédramatiser les mesures à prendre. La mise en place d’un système de gestion pilotée suppose un minimum de consensus au sein de la classe politique sur le sujet des retraites. Un tel consensus n’existe pas en France. L’opposition, quelle qu’elle soit, critique les réformes proposées par les gouvernements. Certains partis défendent même l’idée d’un retour à la retraite à 60 ans ou d’une annulation pure et simple des différentes mesures prises depuis 1993. Ces différents facteurs rendent difficile l’instauration d’un dispositif de guidage automatique des dépenses.

A lire dans le Mensuel N°93 de janvier 2022 du Cercle de l’Épargne

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