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Réversion, la réforme dans la réforme : un sujet sensible par excellence

Retraite 28 juin 2018

Apparue au XIXe siècle, la réversion s’est constituée, à l’origine, dans le prolongement du devoir de protection dû à la femme par son mari, auquel incombait, jusqu’en 1971, le statut de chef de famille en application de l’article 213 du Code civil. C’est ainsi que ce droit qui a vu le jour au sein de la fonction publique était initialement réservé aux femmes avant de s’étendre progressivement aux veufs et d’être uniformisé entre les deux sexes entre 1973 et 2004. La réversion est un sujet sensible. En effet, lié au décès d’un conjoint, elle constitue un élément de la solidarité nationale. Par ailleurs, elle permet de réduire fortement l’écart de pensions entre les hommes et les femmes. Les pensions de ces dernières sont, en droit direct, de 39 % inférieures à celles des hommes (données 2016). En intégrant les droits de réversion, l’écart n’est plus que de 25 %.

Le système de la réversion a en commun avec celui des retraites, la complexité. Les différents régimes ont retenu leurs propres règles. La situation des conjoints survivants peut, de ce fait, différer en fonction de la carrière professionnelle des conjoints décédés. Depuis de nombreuses années, l’idée d’une refonte de la réversion est avancée par les pouvoirs publics et certains partenaires sociaux. Avec le lancement de la réforme systémique du système de retraite, la refonte de la réversion est incontournable.

4,4 millions de bénéficiaires de droits dérivés

4,4 millions de pensions de droit dérivé sont versées par les principaux régimes de base du secteur privé. Le nombre de bénéficiaires d’une pension de réversion s’est accru de 6,4 % par rapport à 2006. Parmi ces bénéficiaires, 1,1 million (soit un quart) ne perçoivent aucun droit direct, soit parce qu’ils n’ont pas encore liquidé leurs droits propres, soit parce qu’ils n’ont pas travaillé – du moins en France – ou pas suffisamment longtemps pour recevoir à ce titre une pension sous forme de rente.

2,8 millions de personnes perçoivent une pension de droit dérivé à la CNAV et 2,9 millions à l’Arrco. Les régimes de base du secteur privé (CNAV, MSA salariés, MSA non-salariés, RSI artisans et RSI commerçant) versent, au total, 4,5 millions de pensions de droit dérivé, tandis que les caisses de la fonction publique (fonction publique civile de l’État, fonction publique militaire de l’État et CNRACL) en versent 0,6 million).

La proportion des femmes parmi les bénéficiaires d’une pension de droit dérivé est de 89 %. Leur surreprésentation est liée à leur plus longue espérance de vie et au fait qu’elles soient deux à trois ans plus jeunes que leur conjoint. Par ailleurs, quand ils sont veufs, les hommes, en raison de leur niveau de pension de droit direct souvent plus élevé que celui des femmes, ont des revenus supérieurs aux plafonds de ressources pour être éligibles à la réversion, quand celle-ci est soumise à condition.

Du fait d’un taux d’activité plus faible que les hommes, voire de l’absence totale d’activité professionnelle rémunérée, les femmes représentent la quasi-totalité des retraités ne touchant qu’une pension en droit dérivé (96

Fort logiquement, le nombre de bénéficiaires des pensions de réversion croît avec l’âge entre 50 et 85 ans.

La réversion en France, règles en vigueur

Le principe de base

Le conjoint survivant peut bénéficier d’une pension de réversion sous réserve de respecter des conditions d’âge et de ressources. Le conjoint divorcé est assimilé au conjoint survivant qu’il soit remarié ou non. La pension est partagée au prorata de la durée de mariage entre le conjoint survivant et les précédents.

Les règles en vigueur pour les régimes de base alignés (régime des salariés, indépendants, agricole, professions libérales)

La date d’ouverture des droits à réversion

Pour les régimes de base, l’âge d’ouverture des droits de réversion est de 55 ans. Quand l’assuré est décédé avant le 1er janvier 2009, l’âge minimum requis est de 51 ans quelle que soit la date de dépôt de la demande de pension. Cette condition d’âge a fortement varié dans le temps. Elle était de 65 ans en 1945 et était passée à 55 ans en 1972 avant de descendre à 51 ans en 2007. Ce n’est que depuis 2009 qu’elle est revenue à 55 ans. La question de son relèvement à 60 ou à 62 ans pourrait se poser.

Le plafonnement de la réversion en fonction des ressources

Pour bénéficier d’une pension de réversion dans un régime de base, le montant de ses ressources ne doit pas dépasser, pour une personne seule, 2080 fois le SMIC horaire en vigueur au 1er janvier de l’année considérée, soit 20 550 euros en 2018.

Le plafond pour un couple est égal à 1,6 fois celui d’une personne seule soit 32 880 euros (1er janvier 2018). Le montant de la pension de réversion est différentiel.  Il s’ajuste par rapport au plafond de ressources.

Les ressources prises en compte sont celles des trois mois civils précédant la date d’effet de la pension de réversion. Quand ces ressources excèdent le quart du plafond annuel, le calcul s’effectue sur la base des 12 derniers mois. Toutes les ressources du ménage sont prises en compte pour déterminer si le plafond est atteint ou pas à l’exception des assurances-vie et des capitaux décès du conjoint décédé, de la valeur de la résidence principale et des prestations familiales… Les ressources sont révisables chaque année.

Le taux et montant de la réversion pour les régimes de base

La réversion est calculée en pourcentage des droits « retraite » acquis par le défunt. Ce taux est de 54 % de la pension principale dont bénéficiait ou aurait bénéficié l’assuré décédé.

Depuis octobre 2017, le montant minimum de la pension de réversion du régime général est fixé à 3 433,72 euros par an, soit 286,14 euros par mois.

Le montant maximum d’une pension de réversion est fixé à 10 727,64 euros par an, soit 893,97 euros par mois.

 La majoration pour enfant et la majoration pour âge

Le titulaire de la pension de réversion peut bénéficier d’une majoration de 10 % s’il a donné naissance ou élevé au moins trois enfants pendant 9 ans avant leur 16ème anniversaire. Le bénéficiaire doit être âgé de moins de 67 ans et ne doit pas être titulaire d’une retraite de base obligatoire. Cette majoration entre dans le calcul du plafond de ressources.

La pension de réversion peut être majorée de 11,10 % si le titulaire a plus de 67 ans. Il doit, au préalable, faire valoir tous ses droits à retraite.

 La réversion dans la fonction publique, dans les régimes spéciaux et pour les avocats

 Aucune condition d’âge et de ressources n’est prévue. Le taux de la réversion est de 50 %.

Une durée minimale d’union de quatre ans est exigée dans la fonction publique, de deux ans pour les régimes spéciaux et de 5 ans pour les avocats.

La pension est suspendue en cas de remariage, de PACS ou de concubinage en ce qui concerne la fonction publique.

La réversion dans les régimes complémentaires

Les régimes AGIRC/ARRCO

A la différence des régimes de base, l’obtention d’une pension de réversion n’est soumise à aucune condition de ressources. Il n’y a pas de limitation de la pension en cas de cumul avec d’autres avantages vieillesse. Le droit à réversion est simplement lié à une condition d’âge. Le conjoint survivant même divorcé peut bénéficier d’une pension de réversion cumulable, le cas échéant, avec un avantage personnel acquis dans ces régimes.

En cas de remariage postérieurement à l’attribution de la pension de réversion, le service de celle-ci est supprimé de façon définitive à partir du premier jour du trimestre suivant le remariage. Les orphelins de père et de mère ont également accès à des droits de réversion.

Que ce soit pour l’ARRCO ou pour l’AGIRC, le conjoint survivant a droit à une pension calculée sur la base de 60 % des points du conjoint décédé. Pour l’ARRCO, l’accès à la pension de réversion est possible dès 55 ans. Pour l’AGIRC, cet âge est de 60 ans. Les conjoints invalides ou ayant eu deux enfants à charge peuvent obtenir une pension de réversion sans condition d’âge.

Quand il y a un seul ayant droit, la réversion est calculée sur le total de la carrière de l’assuré décédé. Quand l’ex-conjoint est divorcé mais non remarié, la réversion est calculée au prorata de la durée de mariage par rapport à la durée d’assurance aux régimes de base du défunt. Quand la durée de mariage est supérieure, l’ex-conjoint bénéficie de l’ensemble de la pension.

 Quand il y a plusieurs ayants-droits, avec une coexistence du conjoint survivant avec le (ou les) ex-conjoint(s) non remariés, la pension de réversion est partagée entre l’ensemble des ayants-droits au prorata de la durée de chaque mariage rapportée à la durée totale des mariages. Quand le partage s’effectue qu’entre ex-conjoints non-remariés, la réversion est alors calculée au prorata de la durée de mariage par rapport à la durée d’assurance au régime de base du défunt.

Le régime de réversion au titre de la complémentaire du Régime Social des Indépendants

Jusqu’au 1er janvier 2013, les commerçants et les artisans n’étaient pas soumis aux mêmes règles en matière de réversion. Depuis le 1er janvier 2013, les artisans, les commerçants et les industriels étant couverts par le même régime complémentaire sont désormais régis, en matière de réversion, par les mêmes règles.

Régime en vigueur jusqu’au 1er janvier 2013

  • Réversion des commerçants

Pour bénéficier d’une pension complémentaire de réversion au titre du RSI, le conjoint de l’assuré décédé devait  avoir été uni durant deux ans ou avoir eu au moins un enfant de cette union. Le conjoint pouvait être divorcé mais pas remarié. Le conjoint survivant ne doit pas avoir d’activité professionnelle. En cas de reprise d’activité, la réversion est suspendue. La pension de réversion est égale à 60 % des droits du conjoint décédé. Pour en bénéficier, le conjoint survivant doit avoir au moins 60 ans.

Le montant des pensions personnelles et de réversion ne doit pas dépasser le plafond annuel de la Sécurité sociale. En cas de dépassement, la pension de réversion est diminuée à due concurrence.

  • La réversion des artisans

Pour bénéficier d’une pension de réversion, le mariage doit également avoir duré deux ans ou un enfant doit être né de cette union. Le conjoint survivant peut être divorcé mais pas remarié. Il peut avoir été marié mais être de nouveau veuf.

La pension de réversion est égale à 60 % des droits de l’assuré décédé. Elle peut être versée à partir de 55 ans et non 60 comme pour les commerçants. La condition d’âge disparaît si le conjoint survivant est reconnu totalement et définitivement invalide.

Des conditions de ressources sont imposées aux conjoints survivants. Le montant de ressources ne doit pas dépasser le Plafond annuel de la sécurité sociale. La pension de réversion est ajustée afin que le cumul de ressources (pension de réversion comprise), soit inférieur ou égal à ce plafond (38 040 euros au 1er janvier 2015).

Le nouveau régime de la réversion complémentaire pour les commerçants et artisans depuis le 1er janvier 2013

Depuis le 1er janvier 2013, un régime unique a remplacé les deux précédents régimes. Les droits acquis au titre du régime complémentaire des artisans et du régime complémentaire des commerçants sont conservés.

Les pensions de réversion des commerçants et des artisans sont accessibles désormais, pour tous, à partir de 55 ans. La condition de durée de mariage est supprimée tout comme la suppression du versement de la pension en cas de remariage. Les conditions de ressources sont fixées à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale soit 79 464 euros (au 1er janvier 2018).

La réversion complémentaire des professions libérales

Les conditions de réversion diffèrent selon les professions. Il convient de se renseigner auprès de la section dont dépendait l’assuré décédé. En règle générale, les pensions de réversion peuvent être versées entre 60 et 65 ans. Le montant de la pension de réversion est fréquemment de 60 % des droits accumulés par l’assuré décédé. Une durée minimale de mariage peut être exigée ou l’existence d’un enfant issu de l’union.

La réversion des notaires

Pour bénéficier d’une pension de réversion, le conjoint survivant du notaire décédé doit justifier d’une durée minimale de mariage de 2 ans si le mariage est célébré pendant l’activité professionnelle du notaire ou d’une durée minimale de mariage d’au moins 5 ans à la date du décès. Si de cette union un enfant est né, la condition de durée n’est plus exigée.

En cas de décès d’un notaire, soit en exercice, soit après cessation de ses fonctions, le conjoint survivant peut bénéficier d’une réversion fixée à 60 % des droits acquis par le défunt. Toutefois, la réversion de la complémentaire du notaire décédé peut être de 100 % si ce dernier en avait fait la demande à la liquidation de ses droits à retraite.

La pension de réversion peut être versée à partir du 50ème anniversaire du conjoint si le décès est survenu avant le 1er janvier 2014. Le conjoint survivant devra attendre son 52ème anniversaire si le décès du notaire survient après le 1er janvier 2014.

Si le défunt laisse, soit un conjoint survivant et un ou plusieurs conjoints divorcés et non remariés, soit un ou plusieurs conjoints divorcés et non remariés, la réversion est partagée entre les intéressés au prorata de la durée de chaque mariage. La réversion est suspendue en cas de remariage et ne pourra être rétablie qu’en cas de veuvage ou de divorce. Aucune condition de ressource n’est exigée pour l’attribution des droits à réversion.

La réversion des officiers ministériels

Pour bénéficier de la réversion du régime complémentaire, le conjoint survivant doit justifier de deux années de mariage ou de de la naissance d’un enfant durant l’union. En cas de coexistence d’un conjoint survivant et un ou plusieurs conjoint(s) divorcé(s) non remariés, le partage se fait au prorata de la durée de chaque mariage. La condition d’âge pour pouvoir bénéficier de la réversion de la retraite complémentaire de l’officier ministériel décédé est fixée à 60 ans. La pension de réversion du régime complémentaire n’est pas soumise à une clause de ressources. 

La réversion des médecins 

Pour bénéficier de la réversion du régime complémentaire de la CARMF (La Caisse autonome de retraite des médecins de France), le conjoint survivant doit justifier de deux années de mariage ou de la naissance d’un enfant durant l’union. En cas de coexistence d’un conjoint survivant et d’ex-conjoints divorcés non remariés, le partage se fait au prorata de la durée de chaque mariage. Le partage est établi définitivement, c’est-à-dire qu’au décès de l’un des conjoints, sa part n’accroît pas la part de l’autre ou, s’il y a lieu, des autres. Pour bénéficier de la réversion le ou les conjoints survivants non remariés doivent avoir au moins 60 ans. Le montant de la réversion s’élève à 60 % du montant de la pension qu’aurait perçue le médecin décédé.

Si le médecin décédé n’était pas à jour des cotisations, aucun droit à pension ne pourra être ouvert avant la régularisation intégrale du compte.

Par ailleurs, le conjoint survivant d’un médecin non retraité a la possibilité de procéder à un rachat de points portant sur la validation des années d’exercice libéral antérieures au 1er juillet 1949 (date de création du régime) et des périodes militaires. Si le médecin décédé était une femme, le ou les conjoints survivants peuvent également valider les trimestres pour les enfants nés durant l’activité médicale de celle-ci. La pension de réversion du régime complémentaire n’est pas soumise à une clause de ressources.

La réversion des pharmaciens

Pour pouvoir bénéficier de la pension de réversion au titre de la retraite complémentaire gérée par répartition du pharmacien décédé, le conjoint survivant doit être âgé de 60 ans et avoir été marié au moins deux ans ou avoir eu au moins un enfant pendant le mariage. En cas de coexistence d’un conjoint et/ou d’ex-conjoints survivants non remariés, la pension est partagée au prorata de la durée des mariages respectifs.

La pension de réversion s’élève, pour le régime complémentaire, à 60 % et de ce que l’assuré touchait ou aurait touché. Elle n’est pas soumise à des conditions de ressources et peut donc être librement cumulable avec toute autre retraite personnelle du conjoint survivant.

Le poids relatif de la réversion est amené à diminuer

Le poids relatif de la réversion au sein des dépenses de retraite devrait passer de 12 % à 8,8 % entre 2014 et 2060. L’augmentation des pensions des femmes explique cette évolution. En effet, le taux d’activité des femmes de 15 à 64 ans était de 67,6 % en 2015 contre 58,2 % en 1990. Sur la même période, le taux d’activité des hommes est resté stable (passant de 75,9 à 75,5 %). L’écart de rémunération avec les hommes tend également à se réduire. La meilleure prise en compte des périodes de maternité permet, par ailleurs, d’augmenter les droits à la retraite des femmes. Selon l’INSEE, si la pension de droit direct des femmes nées en 1930 ne représente en moyenne que 53 % de celle des hommes de la même génération, celle-ci atteindrait 81 % pour les femmes nées en 1970.

Une partie de droits de réversion étant soumis à une condition des ressources, l’augmentation des revenus propres des femmes devraient conduire à ce qu’elles en profitent moins que dans le passé.

Le poids relatif de la réversion baissera également en raison de la diminution des différences d’âge entre les conjoints. En outre, l’écart de l’espérance de vie entre les hommes et les femmes tend à s’amenuiser.

Ces différents points amènent certains experts et responsables de la protection sociale à poser la question de l’utilité à terme des pensions de réversion.

La réversion chez nos partenaires

La Suède

En 1990, au niveau du régime par répartition, les pensions de réversion (dite pension de veuvage) ont été supprimées en Suède pour les générations futures de veufs et veuves. La suppression s’est faite de manière progressive avec une pleine application du nouveau dispositif pour les générations nées à partir de 1945.

La pension d’ajustement

Depuis 1990, les conjoints survivants âgés de moins de 65 ans peuvent néanmoins bénéficier d’une pension dite d’ajustement ou transitoire. Cette pension est accessible aux partenaires « enregistrés » ainsi qu’aux concubins ayant donné naissance à un enfant. Le concubin survivant peut également bénéficier de cette pension s’il a déjà été marié ou partenaire enregistré du défunt par le passé.

La pension d’ajustement, versée pendant un an au survivant, correspond à fraction des droits du conjoint décédé (au taux de 55 %). Cette prestation est censée aider la veuve (ou le veuf) à s’adapter à sa nouvelle situation. En cas d’enfants à charge, la durée de versement est prolongée de 12 mois ou jusqu’à ce que le plus jeune des enfants atteigne l’âge de 12 ans.

La pension garantie

En cas d’insuffisance de cette pension, une pension garantie peut être versée en complément. Son montant est déterminé en fonction du nombre d’années que le défunt a vécu en Suède.

La réversion dans le cadre de la capitalisation

Les actifs nés après 1938 ont la faculté de souscrire à une pension de réversion au titre de leur retraite par capitalisation. Dans ce cas, la rente perçue par le conjoint survivant au titre de la retraite professionnelle ou de la retraite privée est calculée sur la base des revenus du travail perçus par le défunt à la date de son décès.

L’Allemagne

L’Allemagne dispose d’un système pluriel de pensions de réversion. Il a été profondément réformé en 2002. Les assurés allemands peuvent accéder, sous certaines conditions, à un dispositif d’assurance avec le versement d’une pension de réversion, à un dispositif d’assistance temporaire et à un dispositif de partage entre conjoints des droits à la retraite (splitting).

La pension de réversion n’est pas réservée exclusivement aux couples mariés. Elle est ouverte au conjoint, partenaire pacsé et sous certaines conditions au conjoint divorcé. Le survivant doit pouvoir justifier d’une année d’union pour pouvoir bénéficier de la pension de réversion. Si le mariage a eu lieu avant le 1er janvier 2002, la condition de durée ne s’applique pas. En cas remariage, la pension est suspendue mais une indemnité forfaitaire est versée au survivant.

Pour pouvoir prétendre à la pension de réversion du défunt, le conjoint décédé devait soit déjà percevoir une retraite avant son décès soit avoir accompli une période minimum d’affiliation de cinq ans.

Deux prestations de réversion existent en Allemagne, la « petite pension » et la « grande pension ».

La grande pension de veuvage est versée de façon permanente après les 45 ans révolus du survivant. L’âge de versement sera progressivement porté à 47 ans avec une application pleine en 2029. Elle peut être versée avant si le survivant a, à sa charge, un enfant personnel ou un enfant du défunt qui n’a pas atteint l’âge de 18 ans révolus. La grande pension s’élève à 55 % de la retraite de l’assuré décédé (avant 2002 le taux était de 60 %). La législation allemande permet également un versement anticipé de la pension de veuvage, si le survivant a une capacité de travail réduite.

A défaut de pouvoir bénéficier de la « grande pension », le conjoint survivant peut prétendre à la « petite pension » appelée aussi « pension réduite », servie pendant 24 mois maximum à la suite du décès. La petite retraite correspond à 25 % de la retraite de l’assuré. Pour les couples nés avant le 2 janvier 1962 et mariés avant le 1er janvier 2002, la petite retraite est servie sans limitation de durée. La pension de réversion peut être versée en capital.

Les ressources du survivant, tels que le salaire, les revenus du capital et d’autres revenus provenant d’une activité de travail salarié seront partiellement décomptés de la pension. L’abattement mensuel non imputé sur la pension est lié à la valeur actuelle de la pension. Pour les orphelins, cet abattement s’élève à 17,5 fois la valeur actuelle de la pension et à 26,4 fois pour tous les survivants et pour les bénéficiaires de la pension d’éducation. Si le revenu personnel est plus élevé que l’abattement, 40 % des revenus nets restants seront décomptés de la pension de réversion.

Le veuf ou la veuve qui élève des enfants reçoit un supplément (2 points de rémunération pour le premier enfant puis un point par enfant pour les suivants). Si le couple est séparé, il existe normalement une compensation des droits acquis aux époux divorcés qui sera prise en compte dans les droits ultérieurs à la pension.

Le partage des droits à pension : le « splitting »

L’introduction du splitting constitue une des grandes nouveautés de la réforme de 2002. Sur accord des conjoints, les droits à la retraite sont mutualisés. En cas de divorce ou de veuvage, le ou les conjoints bénéficient de la moitié des droits constitués quel que soit son niveau de ressources. Le système allemand fonctionnant par points, depuis 2002, le partage est simple à réaliser.

Pour bénéficier de la règle du splitting, les deux conjoints doivent avoir cotisé à l’assurance retraite obligatoire pendant au moins 25 ans et le mariage doit être postérieur au 1er janvier 2002. Les couples âgés de moins de 40 ans et déjà mariés avant l’entrée en vigueur de la réforme peuvent également bénéficier de ce dispositif.

L’analyse en termes d’économies n’est pas évidente car la mutualisation des droits aboutit à les cristalliser quelles que soient les ressources des conjoints. En revanche, ce dispositif permet d’améliorer sensiblement les revenus des conjoints.

Le Royaume-Uni

Depuis 1999, les pensions de réversion sont versées de manière temporaire. L’objectif étant de lisser les effets financiers d’une séparation ou d’un décès, le régime britannique prévoit plusieurs prestations dans le cadre de l’assurance décès en faveur des proches du défunt :

  • Un capital-décès (Bereavement payment),
  • Une allocation-décès (Bereavement allowance)
  • Une allocation pour parent survivant (Widowed parent’s allowance)

Ces prestations peuvent être attribuées au conjoint survivant non séparé de droit ou de fait. Peuvent en bénéficier les survivants liés par un contrat de mariage ou par un pacte civil légal.

Quelles que soient les prestations servies, le défunt doit avoir versé des cotisations sociales à l’assurance nationale pendant une certaine période. Cette condition d’affiliation est écartée lorsque le décès résulte d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

Le capital-décès forfaitaire

Le capital décès est fixé à 2000 livres sterling pour l’année fiscale 2014-2015. Il est exonéré d’impôts. Il est attribué au conjoint survivant quand l’une des deux conditions est satisfaite :

  • le conjoint survivant n’avait pas atteint l’âge légal de la retraite au moment du décès ;
  • la personne décédée n’était pas bénéficiaire d’une pension nationale de vieillesse au moment du décès.

Par ailleurs, le défunt doit avoir versé des cotisations ou doit être décédé à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

L’allocation décès est accordée au conjoint ou partenaire survivant, sans enfant à charge, âgé d’au moins 45 ans au moment du décès. Si le conjoint survivant a atteint l’âge de la retraite au moment du décès de l’assuré, la pension peut faire l’objet d’une réévaluation.

L’allocation-décès est versée pendant 52 semaines maximum à compter de la date de décès du conjoint.

Le montant de l’allocation dépend de deux facteurs :

  • Le montant des cotisations versées par le défunt
  • L’âge du conjoint survivant au moment du décès

Allocation pour parent survivant (Widowed Parent’s Allowance)

L’allocation pour parent survivant est une prestation hebdomadaire versée au veuf ou à la veuve n’ayant pas atteint l’âge légal de la retraite et percevant l’allocation pour enfant (Child benefit) du fait de la prise en charge d’un enfant ou plus.

En cas d’extinction du droit à l’allocation pour parent survivant avant un délai de 52 semaines (par exemple parce que l’enfant n’ouvre plus droit à l’allocation pour enfant), le conjoint ou partenaire survivant âgé d’au moins 45 ans sans avoir atteint l’âge légal de la retraite peut demander à bénéficier de l’allocation décès pour le restant des 52 semaines.

L’Italie 

En Italie il faut distinguer la pension de réversion de la pension indirecte.

La pension de réversion

La pension de réversion est versée au survivant quand le conjoint décédé était titulaire d’une pension de retraite directe.

La pension indirecte

Quand le travailleur décédé n’était pas titulaire d’une pension directe, il peut bénéficier d’une pension indirecte si, au moment de son décès, il remplissait les conditions requises en matière d’assurance et de cotisation pour toucher l’allocation ordinaire d’invalidité ou la pension d’incapacité, ou encore les conditions requises pour avoir droit à la pension de vieillesse.

Pour bénéficier de la pension indirecte, le travailleur décédé doit justifier d’une période de cotisations d’au minimum 15 ans (soit 780 semaines) durant sa vie active ou justifier d’une période de cotisation d’au minimum 5 ans (soit 260 semaines) dont au moins 3 ans (soit 156 semaines) durant les 5 années précédant la date du décès.

La pension de réversion et la pension indirecte sont versées sans condition d’âge et par ordre de priorité au :

  • conjoint survivant, même séparé, à condition qu’il bénéficie du versement d’une pension alimentaire conformément à une décision de justice ;
  • conjoint divorcé non remarié s’il a droit à une allocation de divorce ;
  • enfants mineurs à la date du décès, invalides, étudiants et à la charge du défunt au moment du décès (la limite d’âge est de 21 ans en cas d’études à temps plein, 26 ans en cas d’études universitaires. En cas d’enfant(s) invalide(s), la limite d’âge ne s’applique plus) ;
  • petits-enfants mineurs (au même titre que les enfants) s’ils étaient entièrement à la charge des grands-parents (grand-père ou grand-mère) à la date du décès.

En cas de remariage du conjoint survivant

Le droit à pension du conjoint survivant cesse en cas de remariage. La pension est alors remplacée par une indemnité à versement unique correspondant à 2 annuités.

S’il n’existe pas d’autres survivants (conjoint ou enfants) ouvrant droit à pension :

  • les parents à charge qui au moment du décès de l’assuré étaient âgés d’au moins 65 ans et ne percevaient aucune pension ;
  • les frères ou sœurs non-mariés et invalides si au moment du décès de l’assuré ils étaient à sa charge.

Quel avenir pour la réversion en France ?

Au milieu du mois de juin, a été évoquée une éventuelle suppression du dispositif de la réversion dans le cadre du futur régime universel de retraite. Le Haut-Commissaire en charge de la réforme a, vendredi 22 juin, rejeté toute idée de suppression de la réversion. Néanmoins, Bruno Le Maire, le 24 juin a annoncé qu’elle ferait l’objet dans le cadre de la réforme de la retraite d’une refonte. En soi, cette déclaration est assez logique, la création d’un régime universel passe également par l’harmonisation des règles en vigueur pour la réversion.

La réversion obéit-elle à une logique de redistribution sociale ou à une logique quasi patrimoniale. A-t-elle comme objectif de garantir un minimum de revenus au conjoint survivant, ou de lui assurer le maintien de son niveau de vie ? Est-elle la prise en compte du travail du conjoint survivant à la carrière du conjoint décédé ? La réversion est par nature une prestation redistributive. En effet, le conjoint survivant bénéficie de droits constitués par une tierce personne. A ce titre, les experts de certains organismes comme l’OCDE préconise que la réversion soit financée par des ressources spécifiques.

Les pistes envisageables pour le Gouvernement

Le Gouvernement a confirmé, fort logiquement, le maintien des pensions de réversion pour les actuels bénéficiaires. Pour l’avenir, il a exprimé le principe d’une plus grande justice sociale dans la distribution de ces pensions.

Au nom de l’équité, de la transparence et de la simplification, les conditions et les dates d’octroi seront harmonisées. Le plafonnement en fonction des ressources devrait être généralisé. En revanche, le taux de la réversion pourrait être augmenté pour les bénéficiaires. La suppression de la réversion en cas de remariage pourrait être supprimée. La réversion ne devrait plus être versée qu’à un seul bénéficiaire quand la personne décédée a eu plusieurs conjoints, comme cela peut être le cas dans certains régimes. La pension serait calculée au prorata des unions et répartie entre le conjoint et les ex-conjoints.

Une extension de la réversion à l’ensemble des unions ayant fait l’objet d’une notification ou d’un enregistrement serait en phase avec la logique de l’assurance-vie qui permet à l’assuré de choisir ses bénéficiaires. L’ouverture du droit à réversion aux couples non mariés suppose une application stricte de la règle de proratisation des droits en fonction des durées de vie commune. Le principe de proratisation, déjà appliqué au titre des pensions de réversion distribuées par l’AGIRC et l’ARRCO, devrait de ce fait être étendu à tous.

L’autre voie de réforme consisterait en prenant exemple sur les systèmes allemand ou canadien, d’opter pour un partage des points à la retraite au sein du couple. Dans ce cadre, le compte de retraite est conjugalisé. Les points accumulés durant la vie professionnelle sont additionnés et permettent de calculer le montant de la pension. En cas de séparation, les points sont partagés.

 

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