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Reprise, tempo moderato en France

Economie 27 mai 2020

Après deux mois de confinement et deux semaines de déconfinement, l’économie française est entrée dans une phase de redémarrage à vitesse modérée. A fin mai, selon l’INSEE, elle fonctionnerait à environ quatre cinquièmes de son niveau d’avant crise, contre seulement deux tiers durant le confinement. Le choc provoqué par la crise sanitaire n’en demeure pas moins important. Ainsi, la contraction du PIB pourrait atteindre 20 % au deuxième trimestre, en faisant l’hypothèse qu’au mois de juin, l’économie française comble le tiers de l’écart qui la sépare encore de son niveau d’avant crise (après –5,8 % au premier trimestre. La France reste un des pays les plus touchés par la récession. Si l’activité économique revenait intégralement à son niveau d’avant crise dès le mois de juillet, le PIB français diminuerait de 8 % sur l’année 2020. Les économistes de l’INSEE doutent de ce retour à la normale préjugeant d’une récession encore plus forte. Dans tous les cas, la France enregistrera la plus sévère diminution du PIB depuis la mise en place du suivi de la croissance en 1948.

Avec le déconfinement, redémarrage de la consommation

Avec la réouverture des commerces, les ménages français ont repris le chemin de la consommation, plus rapidement que leurs collègues italiens ou espagnoles. Le niveau de la consommation sur les deux dernières semaines de mai n’est plus inférieur que de 6 % à celui d’avant crise, contre -32 % début mai. Ce rebond concerne en particulier les dépenses en biens manufacturés, en lien avec la réouverture des commerces non essentiels (équipement du foyer, textile, habillement…). La consommation en produits manufacturés aurait dépassé de 6 % son niveau en situation normale d’activité, contribuant à redresser la consommation totale de 3 points et marquant une progression de 39 points de pourcentage depuis le niveau estimé dans le Point de conjoncture du 7 mai. Les transactions par carte bancaire sur l’habillement-chaussure atteignent par exemple un niveau nettement plus proche de celui de 2019 que pendant le confinement, tandis que les transactions portant sur l’équipement du foyer auraient même fortement dépassé leur niveau de 2019. Les dépenses de carburant progressent faiblement en raison du maintien des restrictions de circulation et de l’encouragement au télétravail. Par ailleurs, la sortie du confinement n’aurait pas altéré le dynamisme des dépenses des ménages en produits agro-alimentaires. La consommation en produits agricoles aurait été de 8 % supérieure à son niveau normal, parallèlement à celle des produits agro-alimentaires.

La consommation de services principalement marchands aurait été, pour les deux semaines de déconfinement de 17 % inférieure à une situation normale d’activité. Par rapport à l’évaluation du 7 mai, le gain est de 14 points de pourcentage. Ce rebond résulterait notamment de la consommation de services personnels aux ménages (blanchisserie, coiffure…) ou de services de réparation. Fort logiquement, les services associés à des activités encore soumises à des restrictions seraient restés à des niveaux de consommation particulièrement faibles, comme par exemple le transport aérien, les activités d’arts et spectacles, ou encore l’hôtellerie et restauration.

Les services principalement non marchands auraient vu leur consommation rebondir également, à travers la reprise des soins de ville et de l’enseignement marchand, sans retrouver encore le niveau d’une situation normale d’activité. Leur activité serait de 81 % par rapport au niveau d’avant crise.

Avec la reprise également des travaux de rénovation, la consommation des ménages dans la branche de la construction aurait augmenté par rapport à la période de confinement, mais de façon progressive (–39 % de perte de consommation, contre -75 % de perte en période de confinement).

Lent déconfinement de la production

Dans les seules branches marchandes, la perte d’activité économique serait de 25 % (contre –39 % avant le déconfinement). Cette relative reprise de l’activité économique s’observe dans l’ensemble des branches dont l’activité est autorisée. La perte d’activité économique aurait notamment été divisée par deux dans la construction (–38 % contre –75 % avant le déconfinement).

L’industrie française produirait à 75 % de son niveau d’avant crise fin mai contre 62 % mi-mai. Si la reprise du travail a pu se poursuivre, l’activité resterait affectée, entre autres, par une demande en berne et des stocks importants à écouler, en particulier dans le secteur automobile.

Dans les services, la perte d’activité économique serait de 25 %. Pour l’hébergement et la restauration, la perte atteint 90 % quand elle est de 40 % pour les transports.

Une reprise plus lente en France qu’ailleurs

La consommation d’électricité constitue un indicateur représentatif de l’activité globale des pays, tant du côté de la production que du côté de la consommation. Ainsi, d’abord, l’Allemagne a enregistré au sein des grands pays européens, la plus faible baisse de la consommation. En moyenne entre le 1er avril et le 24 mai, la consommation d’électricité n’a baissé que de 8 % en Allemagne par rapport à la même période en 2019, contre une contraction de 15 % en France et au Royaume-Uni, de 17 % en Espagne et de 20 % en Italie. Aux Etats-Unis, la baisse n’est que 6 %). La reprise a été particulièrement marquée en Italie. Sur la période du 18 au 24 mai, le niveau de la consommation dans ce pays n’y était plus que de 10 % en dessous de la semaine équivalente de 2019, comme en Allemagne. En France, ce n’est que depuis le 11 mai que la consommation d’électricité connaît un léger rebond, passant d’un glissement annuel de près de –20 % le 11 mai à –14 % le 24 mai, rejoignant celui de l’Espagne. Au Royaume-Uni, où le confinement demeure en partie en vigueur, la consommation d’électricité oscille entre –15 % et –20 % de sa moyenne de saison. Aux États-Unis enfin, la consommation d’électricité reste environ 5 à 10 % inférieure à sa moyenne de 2015 à 2019.

Le retour des émissions de CO2

Au cours de la semaine du 18 mai 2020, la baisse de la concentration en CO2 était de 20 % par rapport à la moyenne sur 2016-2019 en Allemagne, contre 31 % en France, 41 % en Italie et 48 % en Espagne. Début mai, avant le déconfinement, la concentration avait diminué de 31 % en Allemagne, de 51 % en France et de près de 55 % en Italie et en Espagne. Au Royaume-Uni, la concentration de l’air en dioxyde d’azote est toujours environ moitié moindre que ses niveaux habituels à cette saison, ce qui témoignerait d’une activité toujours très ralentie. Preuve que la production chinoise retrouve son rythme de croisière, à partir de fin avril et début mai, les émissions et la concentration de l’air en dioxyde d’azote ont dépassé leurs niveaux de la même date en 2019, et elles continuent de croître.

Le retour du shopping

L’effet de la réouverture progressive des commerces de détail hors alimentaire, se reflète dans les requêtes Google relatives aux centres commerciaux. Au cours de la deuxième moitié du mois d’avril 2020, le nombre de requêtes pour les centres commerciaux allemands n’était que de 41 % inférieur au niveau de 2019 sur la même période, contre –70 % pour les centres commerciaux espagnols et autour de –80 % pour ceux français et italiens. Aux États-Unis, le nombre de requêtes a rapidement augmenté à partir de la semaine du 21 avril et n’est plus inférieur que d’environ 20 % à la même semaine de 2019.

Dans les pays de la zone euro et selon cet indicateur, la hausse de la fréquentation des centres commerciaux apparaît davantage depuis mi-mai. Le nombre de requêtes a augmenté de 50 % environ en France par rapport à 2019 durant la semaine du 11 mai, puis de 8 % la semaine du 18 mai mais cette évolution est atypique. Les consommateurs français ont pu rechercher des informations sur les ouvertures des centres commerciaux, certains étant toujours sur décisions administratives toujours fermés. Dans les trois autres principales économies européennes l’indice n’avait pas encore retrouvé mi-mai son niveau d’avant la crise sanitaire, même s’il y poursuit sa progression. La semaine du 18 mai, le nombre de requêtes sur Google restait inférieur de 25 % en Allemagne à son niveau de 2019 et de 15 % en Italie et de 38 % en Espagne.

Fréquentation des lieux publics en hausse

A partir des données de Google Maps, il est possible de déterminer la fréquentation des lieux publics des lieux publics, et notamment des commerces de détail hors alimentaire. La fréquentation a moins baissé en Allemagne qu’en France, en Italie et en Espagne même sur la période post confinement. Dans tous les pays, les consommateurs reviennent graduellement dans les commerces de détails hors alimentaire, au fur et à mesure de leur réouverture.

En prenant en compte ces différents indicateurs, la consommation devrait connaître une évolution favorable dans les prochaines semaines avec un rebond sans doute plus prononcé en France, en Italie et aux États-Unis qu’en Espagne, en Allemagne et au Royaume-Uni. L’importance du rebond est fonction de la contraction subie durant les périodes de confinement. La baisse de la fréquentation des commerces de détail hors alimentaire français et italiens était mi-mai de 51 % et de 61 % respectivement, après une baisse entre 80 % et 90 % en France et en Italie au cours du mois d’avril, soit un gain de près de 30 points de pourcentages contre un gain de 20 points environ en Espagne et en Allemagne. Aux États-Unis, la fréquentation des commerces de détail et lieux de divertissement est inférieure d’environ 30 % mi-mai, après une baisse de 45 % début avril. Au Royaume-Uni en revanche, la fréquentation des commerces de détail hors alimentaire et lieux de divertissement est toujours environ le quart de son niveau habituel, après une baisse de 82 % les premiers jours du confinement.

Transports, le retour des embouteillages

Avec la reprise de l’activité et un moindre recours des transports publics, les embouteillages sont en hausse. L’indice TomTom de congestion routière dans les principales villes européennes témoigne d’une reprise de l’usage de la voiture. En Allemagne, l’indice de congestion routière demeure très proche de son niveau sur la même période en 2019 avec un niveau inférieur de 6 % la semaine du 18 mai (. Dans les autres pays de la zone euro, le rebond est assez soudain, comme par exemple en France, avec un indice de congestion mi-mai inférieur de 26 % à celui de 2019, après une baisse près de 61 % début mai, soit un gain de près de 35 points de pourcentage. Cet indice est toujours très bas aux États-Unis, inférieur de 78 % à ses niveaux de 2019, ainsi qu’au Royaume-Uni (–65 %).

Selon l’indicateur de mobilité d’Apple, qui rassemble les recherches d’itinéraires sur l’application Apple Maps, les recherches d’itinéraires en voiture augmentent dans tous les pays. La reprise est beaucoup plus avancée en Allemagne et aux États-Unis, où les recherches ont dépassé leurs niveaux du 13 janvier dernier, qu’en France, en Italie, en Espagne et au Royaume-Uni.

Selon l’indicateur Google Maps Mobility, mi-mai la fréquentation des transports publics en France était inférieure de 43 % à la « normale » (fréquentation médiane du 3 janvier au 6 février 2020), soit une hausse significative par rapport à avril, où elle se trouvait inférieure de presque 80 %. En Italie et en Espagne, la fréquentation était inférieure de respectivement 53 % et 59 % mi-mai, contre 80 % en avril. Au Royaume-Uni, la baisse s’atténue un peu (–58 %, après une baisse de 70 % début avril). Aux États-Unis, la fréquentation des transports publics augmente légèrement, restant toutefois inférieure d’environ deux tiers à niveau habituel.

Les dangers de l’hystérisation de la crise

Les Français ont réalisé des achats indispensables après le confinement, habillement, coiffure, etc. Les craintes de baisse du pouvoir d’achat devraient peser néanmoins sur la consommation des prochains mois. Les informations inquiétantes sur la situation économique devraient favoriser l’attentisme et autoalimenter la crise. La levée des restrictions de circulation à compter du 2 juin devrait permettre une amélioration au niveau de la consommation mais celle-ci dépend avant tout de la restauration de la confiance. Plusieurs enquêtes suggèrent que les Français demeurent très inquiets sur la situation sanitaire et exigent le maintien de mesures de protection. Ils restent méfiants vis-à-vis des statistiques officiels. Cette peur pèse sur l’activité tant au niveau de la consommation que la production.

La crise, un révélateur de la situation économique

Depuis 2008, l’économie française est à la peine. Les pertes de parts de marché industriel, la persistance d’un important déficit commercial, la lente amélioration de l’emploi sur fond de déficits publics élevés en étaient les marqueurs. La crise de la covid-19 a accentué les traits des faiblesses françaises d’autant plus qu’elle a directement touché des secteurs porteurs comme le tourisme et les transports.

L’hystérisation de la crise permet au Gouvernement d’engager des plans de restructuration de certaines filières qui étaient déjà en difficulté avant la crise. L’exécutif en usant des moyens de financement publics renouent avec la tentation dirigiste propre à la France. Il n’est pas le seul en Europe comme le prouve la tentative de renationalisation partielle de Lufthansa par le gouvernement allemand.

La multiplication des plans d’investissement soutenus par les pouvoirs publics devrait favoriser l’économie allemande qui a plutôt bien résisté durant la crise sanitaire en maintenant à un niveau assez élevé sa production et ses exportations. Disposant de marges de manœuvre budgétaire importantes, l’Etat a engagé de larges plans de soutien.

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