menu

Accueil > Etudes > 2021 > La prévention, une impérieuse nécessité

La prévention, une impérieuse nécessité

Etudes 8 octobre 2021

En France, en 2020, 54 % des hommes et 44 % des femmes de 18 à 74 ans sont en surpoids ou obèses. Cette situation concerne 17 % des 6-17 ans. Depuis 50 ans, les jeunes de 9 à 16 ans ont perdu 25 % de leur capacité physique. Les deux tiers des 11-17 ans présentent un risque sanitaire élevé. Leur consommation moyenne d’écran dépasse 4 heures 30 par jour et leur activité physique est inférieure à 20 minutes (sources CNAPS). 87 % des adolescents de 11 ans à 17 ans ne respectent pas l’heure quotidienne d’activité physique préconisée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Si le nombre d’heures moyen théorique par semaine de sport est de trois heures en France dans l’enseignement secondaire, il n’est en pratique que d’une heure et demie en raison des temps de mise en place. Compte tenu des effectifs, par semaine, l’exercice physique encadré au collège ou au lycée est inférieur à une heure.

Selon la Haute Autorité de Santé, remplacer 30 minutes de sédentarité par 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée réduit de 17 % la mortalité prématurée. Avec la sédentarité, le développement du travail sur écran, le télétravail, l’essor des jeux vidéo, le recours croissant aux produits alimentaires industriels et la multiplication des dépendances (drogue, alcool, etc.), la prévention en santé est considérée une priorité par les pouvoirs publics. L’allongement de l’espérance de vie en bonne santé qui plafonne depuis plusieurs années en France autour de 65 ans passe par le développement de la prévention avec notamment un accroissement de l’activité physique et un rééquilibrage des régimes alimentaires.

La difficile évaluation des dépenses de prévention en France

Les dépenses de prévention sont mal connues en France car elles ne font pas l’objet d’un suivi précis. Ainsi, au sein de la nomenclature budgétaire, que ce soit dans les lois de finances de l’État ou de financement de la Sécurité sociale, elles ne sont pas individualisées. Par ailleurs, une partie des dépenses de prévention est réalisée par les collectivités locales ou par des acteurs locaux rendant leur agrégation complexe. Des efforts sont entrepris depuis plusieurs années, sous la pression de la Cour des Comptes, afin d’améliorer le suivi de ces dépenses. Une annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) indique désormais le montant des dépenses de prévention dites « institutionnelles » avec un décalage de deux ans. Pour 2018, ce montant était de 6,24 milliards d’euros. Dans cette catégorie figurent les actions de prévention individuelle (médecine scolaire et du travail, protection maternelle infantile (PMI), vaccins, dépistages notamment, et les actions collectives comme les grands plans et programmes de santé publique, les actions d’information du Fonds national de prévention, d’éducation et d’information sanitaire (FNPEIS), portant sur l’environnement, etc.). Le financement peut être national ou local. La prévention individuelle s’élevait, en 2018, à 3,8 milliards. À côté de la prévention individuelle, 2,35 milliards d’euros sont alloués à la prévention collective. D’autres composantes de prévention ne figurent pas dans ce chiffrage comme les coûts de la recherche : la collecte des données – registres, suivi de cohortes, enquêtes de prévalence – dont le coût est éclaté entre des organismes comme l’Inserm, le Fonds d’intervention régional, ou encore le Programme d’investissements d’avenir. L’État et les collectivités locales ont, en 2020, financé 57 % des actions de prévention institutionnelle, la Sécurité sociale 16 % et le secteur privé 27 %. Le secteur privé finance avant tout la médecine du travail.

Le second document est le « jaune budgétaire », annexé au projet de loi de finances intitulé « Prévention et promotion en santé ». Il recueille auprès des nombreuses administrations et opérateurs qui ont mis en œuvre des actions de prévention, des données concernant la prévention. Les crédits affectés aux différentes actions de prévention ne sont pas toujours mentionnés. Le premier poste de dépense de prévention est constitué par les médicaments, notamment les statines pour prévenir les AVC. Arrivent ensuite les vaccins dont le coût s’élève à 500 millions d’euros. Enfin, le troisième poste est affecté à la contraception (les montants additionnent la prise en charge par l’assurance maladie, la prise en charge des organismes complémentaires et enfin la participation des familles). Cet ordre d’importance pourrait être amené à être modifié du fait de la vaccination de masse conduite pour lutter contre la Covid‑19. Les autres postes importants sont le dépistage (prévention secondaire) puis la radiologie et la biologie. Des dépenses de prévention ne sont pas répertoriées par les différents documents comme la consommation de soins de prévention et la politique de vaccination, remboursées par l’assurance maladie.

La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) du Ministère des Solidarités et de la Santé estimait en 2016 que les dépenses de prévention devaient dépasser, en France, 9,1 milliards d’euros. L’analyse de la DREES ne prend pas en compte certaines dépenses dont celles liées aux consultations médicales dont une partie du temps est consacrée la prévention, 20 % selon certaines études. Les complémentaires santé ainsi que les institutions paritaires développent des actions de prévention, plus ou moins bien répertoriées par la DREES ou la DARES.

Au total, les dépenses de prévention s’élèveraient à plus de 15 milliards d’euros sur un total de dépenses de santé de plus de 209 milliards d’euros, soit 7 %.

La prévention à la recherche de son pilotage

La prévention n’est pas, en France, un élément central de la politique de santé. Peu de patients consultent en l’absence de symptômes, surtout chez les moins de 35 ans. Les autorités souhaitent depuis des années de passer du curatif à la prévention en multipliant les dépistages précoces. Des progrès ont été ainsi accomplis pour le dépistage des cancers du sein ou du colon. D’importantes campagnes de communication sont régulièrement menées pour le dépistage des cancers de la peau. Des actions à destination des parents sont également menées afin de les inciter à prendre des rendez-vous pour les enfants chez le dentiste.

La Stratégie nationale de santé 2018‑2022 et le Plan national de santé publique ont intégré une composante prévention en insistant sur l’importance de l’hygiène de vie. Les pouvoirs publics se sont ainsi fixé des objectifs lors du comité interministériel pour la santé de 2019, parmi lesquels figurent la diminution de 15 % l’obésité chez les adultes ainsi que la diminution de 20 % le surpoids et l’obésité chez les enfants et les adolescents, en particulier par l’activité physique et sportive. Ces objectifs fixés pour 2023, ne seront pas atteints. Une dégradation de la situation a en effet été constatée avec la crise sanitaire. Chez les jeunes, l’américanisation des modes de vie provoque une rapide augmentation de l’obésité.

Pour souligner l’importance de la prévention, la France pourrait s’inspirer du Royaume‑Uni, de l’Allemagne ou de l’Italie qui retiennent des objectifs pluriannuels de planification de la prévention en santé. Chez nos partenaires, ces objectifs sont rassemblés dans un document unique comportant des objectifs de décès et des maladies dues au tabac, à l’obésité ou aux AVC. L’Allemagne a retenu le principe d’un calendrier précis pour l’atteinte des objectifs. Une plus grande implication des médecins traitants pourrait être également imaginée. Au Royaume-Uni, la formation des médecins comporte un important volet « prévention ».

En France, les professionnels de santé ont été sensibilisés à la question des AVC mais ils le sont moins sur les addictions ou sur le diabète. Plus de 25 % des diabètes ne seraient pas dépistés. En France, la consultation d’un médecin se traduit dans 90 % des cas par la délivrance d’une ordonnance, contre 57 % aux Pays-Bas. Le paiement à l’acte serait de nature plus curative que celui par capitation.

La multitude d’acteurs intervenant dans le secteur de la santé rend son pilotage complexe, tout particulièrement en ce qui concerne la prévention. La coordination des actions provenant de l’État, des collectivités locales, des régimes sociaux, des complémentaires santé, des institutions paritaires, des associations et des fédérations professionnelles n’est pas aisée. Au niveau de l’État, plusieurs ministères sont compétents, ceux de la Santé, du Sport, de l’Emploi voire de l’agriculture. Les communes, les départements et les régions interviennent également en parallèle avec les Autorités régionales de santé.

Partagez cet article

Suivez le cercle

recevez notre newsletter

le cercle en réseau

contact@cercledelepargne.com