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Épargne, ne pas se tromper de bataille

Les éditos du Président 9 juin 2021

Après plus d’un an de crise sanitaire, le temps est aux plans de relance et au retour de l’interventionnisme, que ce soit aux États-Unis ou en Europe. L’économie devrait connaître un rebond d’une ampleur inconnue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Si le volontarisme des pouvoirs publics est louable, la question est de savoir si la croissance sera pérenne. Avant la crise, nous étions entrés, surtout en Europe, dans un cycle de faible expansion sur fond de mondialisation et de digitalisation dont les classes moyennes sortaient perdantes. Nous étions menacés de stagnation séculaire avec un risque non négligeable d’appauvrissement d’une part croissante de la population. Les gains de productivité avaient tendance à s’étioler. La polarisation de l’emploi aboutissait à une montée des inégalités et des tensions sociales. Face à la succession de crises et aux déséquilibres qu’elles génèrent, les États ont la tentation d’interférer de plus en plus fortement dans la vie économique des pays. Il est évidemment nécessaire d’augmenter les investissements publics qui ont été fortement réduits ces dernières années au profit des dépenses sociales. Il est indispensable que les gouvernements contribuent au développement de l’économie par des programmes structurants comme l’ont été dans le passé ceux qui concernaient les télécommunications ou le nucléaire. Mais il ne faudrait pas que le retour en force de l’étatisme étouffe l’initiative privée. Si l’Europe n’a pas réussi à renouveler son tissu économique comme les États-Unis, si elle ne dispose pas d’entreprises mondiales dans le secteur des nouvelles technologies de l’information et de la communication, c’est avant tout en raison d’une mauvaise allocation de l’épargne qui est pourtant plus qu’abondante. Faute d’un véritable marché de capitaux unifié au niveau européen, faute de fonds de capital-risque pouvant rayonner sur l’ensemble du vieux continent, le drainage de l’épargne vers les entreprises innovantes est insuffisant. Il ne manque ni talents, ni argent, mais il manque des canaux d’irrigation. La constitution de véritables fonds de pension européens qui pourraient proposer à tous les actifs des États membres un même produit bénéficiant d’un régime fiscal et social unique serait à même de changer la donne. En Europe, l’épargne est affectée de manière trop importante dans l’immobilier. Ceci ne constituerait pas, en soi, un problème, si la construction en profitait. Or, les mises en chantier se ralentissent dans de nombreux pays de la zone euro. Cette affectation de l’épargne dans la pierre a peu d’effets économiques. Elle est avant tout spéculative. Pour casser cette spirale qui est favorisée par les bas taux d’intérêt, il faut mettre en avant d’autres placements qui pourraient être tout à la fois rémunérateurs et relativement sécurisés. Contrairement à certaines idées préconçues, l’investissement dans les valeurs non-cotées, à condition de respecter des règles de diversification, peut répondre à cet objectif. De même, les fonds de pension qui investissent dans la durée afin de servir sur plusieurs décennies des revenus à leurs affiliés sont des investisseurs au long cours qui contribuent à structurer le tissu économique.

L’épargne n’est pas de l’argent qui dort ; elle est la clef de voûte du financement de l’économie en étant le carburant de l’investissement, sous réserve qu’elle ne soit pas orientée sur les marchés secondaires de capitaux mais bien sur les marchés primaires qui permettent réellement le financement des entreprises, des projets et donc de l’avenir.

Jean-Pierre Thomas

A lire dans le Mensuel N°86 de juin 2021

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