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De 2018 à 2019, l’épargnant dans tous ses états

Epargne 14 janvier 2019

Ce n’est pas un krach mais c’est un sérieux signal d’alerte. Toutes les grandes places boursières ont enregistré, en 2018, des reculs significatifs. À Paris, le CAC 40 a perdu 10,95 %, la plus forte baisse depuis 2011. Le Daxx allemand recule même de 18,26 %. L’indice londonien a chuté de 12,48 % à peu près comme l’indice japonais Nikkei, -12,08 %. Les indices américains qui ont longtemps été positifs (jusqu’au mois de décembre) cèdent également du terrain, plus de 5 % pour le Dow Jones et près de 4 % pour le Nasdaq.

Source : Le Cercle de l’Épargne

Près de la moitié des composantes du Cac 40 (19 sur 40) a baissé de plus de 15 % en 2018. Les valeurs financières ont cédé du terrain du fait des menaces qui pèsent sur l’Europe. L’automobile (Renault, Michelin et surtout Valeo) a été mise à dure épreuve avec l’entrée en vigueur de nouvelles normes. La forte concurrence sur ce secteur et l’incarcération du P.-D.G. de Renault ont également joué en défaveur des cours. La grande distribution a payé le ralentissement de la croissance de la consommation, de la concurrence de plus en plus vive et du mouvement des « gilets jaunes ».

L’année 2018 aura été l’année de tous les contrastes. Le pétrole a joué au yoyo, passant de 66 dollars début janvier à plus de 84 dollars le baril le 6 octobre pour terminer l’année à 52 dollars le baril. Il aura perdu 20 % de sa valeur en un an. Son augmentation au cours du premier semestre a pesé sur la croissance des pays consommateurs. Elle a eu comme conséquence l’accélération de l’inflation qui a dépassé les 2 % aux États-Unis comme en Europe.

Le commerce international, dans la foulée de l’année 2017, a connu une forte progression aidé en cela par la bonne tenue de la conjoncture américaine. L’aggravation du déficit commercial américain a conduit Donald Trump à engager, avant les élections de Midterm, une guerre commerciale avec la Chine et à titre accessoire avec l’Europe. Si au niveau des échanges, l’impact a été jusqu’à maintenant faible, les sanctions annoncées ont pesé sur le climat boursier de la fin d’année. Les investisseurs craignent pour 2019 un ralentissement des échanges et donc une diminution de la croissance. L’obtention ou non d’un accord au début de l’année 2019 conditionnera l’évolution des cours des prochains mois.

La croissance de l’économie mondiale aurait dû jouer en faveur de la bourse, or il en fut autrement. Les investisseurs valorisent les cours non pas au regard des performances passées et actuelles mais en fonction des résultats à venir. Il est souvent mentionné que les retournements de la bourse ont six mois d’avance par rapport aux mouvements réels de l’économie. Cette théorie est toute relative car des krachs peuvent ne pas déboucher sur des récessions. Il en fut ainsi en 1987. En 2018, la croissance de l’économie mondiale devrait avoir atteint 3,6 %. Les États-Unis, grâce à la réforme fiscale de Donald Trump, peuvent espérer une croissance de 3 %. L’économie américaine serait menacée de surchauffe, justifiant les relèvements des taux directeurs par la banque centrale. En revanche, le Président Donald Trump pense tout autrement, son objectif étant d’obtenir une croissance supérieure à 3 %. Il réclame l’arrêt de la hausse des taux. Les menaces qu’il a formulées à l’encontre du Président de la FED, Jerome Powell, ont effrayé les investisseurs. Ces derniers n’ont guère apprécié la remise en cause de l’indépendance de la banque centrale. Par ailleurs, ils ont jugé les pressions présidentielles et l’éventuel ralentissement du programme de hausse des taux comme la preuve d’un retournement de la croissance. Quatre hausses de taux sont intervenues au cours de l’année 2018, portant la fourchette des Fed funds entre 2,25 % et 2,5 % en fin d’année.

Le ralentissement économique de la zone euro s’est manifesté dès le premier trimestre et ne s’est pas démenti au cours de l’année. L’Allemagne a même enregistré une contraction de son PIB au troisième trimestre, contraction s’expliquant en partie par le changement des normes antipollution des véhicules et par les tensions commerciales. L’Italie a renoué avec la stagnation et la France avec la croissance à petite vitesse. De même, le Japon a dû faire face à un net refroidissement de son économie au troisième trimestre. À cela s’est ajoutée l’érosion de la croissance chinoise à partir du second semestre.

L’année 2018 a été également marquée par une série de crises diplomatiques dont les effets se sont ressentis sur les indices boursiers. L’Iran, la Turquie et l’Arabie saoudite ont été des sources de tensions. Durant l’été, le durcissement des relations entre Ankara et Washington a provoqué une dépréciation de la livre turque et la baisse du principal indice de la bourse d’Istamboul. Cette crise a provoqué une onde de choc sur les places financières mondiales et a contribué à la baisse des valeurs des banques européennes fortement investies en Turquie. La rupture par les États-Unis de l’accord avec l’Iran et la restauration de l’embargo ont eu une influence sur les cours pétroliers et sur le climat économique général. L’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, dans l’ambassade de son pays en Turquie a pesé sur la place financière de Riad.

L’Union européenne est également restée un foyer d’incertitudes avec notamment le feuilleton, inachevé à cette heure, du Brexit et les relations difficiles de Rome avec Bruxelles du fait de l’arrivée au pouvoir d’une coalition des deux partis extrémistes M5S et la Ligue dont l’antieuropéanisme est un des rares ciments. La crise sociale en France et les difficultés d’Angela Merkel avec la montée en puissance de l’extrême droite fragilisent la zone euro qui fête en 2019 ses vingt ans. Si les écarts de taux entre l’Italie et l’Allemagne se sont accrus, il est à souligner que tant dans ce dernier pays qu’en France, les taux sont plus faibles en fin qu’en début d’année.

L’année 2018 marquera peut-être la fin de l’envolée des cours des technologiques. Apple a valu plus de 1 000 milliards de dollars, avant de perdre en moins de trois mois 30 % de sa valeur. Facebook, Alphabet, Netflix et Amazon ont vu leur cours baisser. Les résultats des GAFAM ne suivaient plus l’appréciation des actions. Des doutes sur la pérennité des modèles économiques commencent à poindre. La correction en cours était attendue et est salutaire. En effet, des augmentations de 300 à 900 % en quelques années étaient déconnectées des réalités économiques.

En 2018, l’année aura été celle de la chute du Bitcoin qui est ainsi passé de plus de 16 400 dollars le 1er janvier 2018 à 3 810 dollars le 31 décembre 2018. En un an, il a perdu plus de 75 % de sa valeur. Le caractère hautement spéculatif, l’absence de transparence, l’explosion des coûts de production des crypto-actifs et la volonté des pouvoirs publics de réguler ce nouveau marché ont entraîné la chute de leurs. Ether, Ripple, Litecoin ont suivi le Bitcoin dans son mouvement.

En 2018, la justice s’est immiscée dans la vie financière des entreprises internationales. L’arrestation de Carlos Gohn au Japon tout comme celle au Canada de la directrice financière de Huawei (qui est par ailleurs la fille du fondateur), et la menace de sanctions à l’encontre de la Société générale aux États-Unis sont autant d’exemples d’une judiciarisation accrue de la vie économique, judiciarisation qui est une forme de protectionnisme déguisé.

2019, l’année des incertitudes et de l’instabilité ?

Le début du mois de janvier s’inscrit dans le prolongement de 2018. L’accumulation des inquiétudes et des incertitudes angoisse les investisseurs dont l’aversion aux risques est en forte augmentation. La publication de mauvais résultats économiques en Chine a entraîné dès le 2 janvier un net recul des principaux indices boursiers. Si cette chute persistait, la correction actuelle des cours pourrait être bien vite rebaptisée en krach.

Pour l’Union européenne, 2019 sera rythmée par deux évènements majeurs, le Brexit au mois de mars et au mois de mai les élections du Parlement européen. L’année ne sera pas de tout repos avec la montée du nationalisme et la multiplication des tensions entre États membres ainsi qu’entre ces derniers et la Commission.

Pour certains, 2019 sera l’année de la récession et du krach avec la fin du cycle de croissance aux États-Unis. Pour d’autres, la chute n’est pas inévitable. Un petit tour d’horizon des facteurs positifs et négatifs n’est donc pas inutile.

Le retour du social et du politique

Les opinions publiques, dix ans après la Grande Récession, expriment leurs doutes, leurs colères vis-à-vis des dirigeants politiques. Le cocktail « crise, mondialisation et digital » provoque la montée du populisme, du nationalisme et du protectionnisme. En France, les « gilets jaunes » constituent un phénomène sans précédent depuis la décolonisation et mai 1968. À partir des années 70, avec le déclin du communisme et la fin des mouvements terroristes d’extrême gauche, Bande à Bader, Action Directe, Brigades Rouges en Italie, la vie politique et sociale s’était pacifiée. La question de l’immigration et la crise ont progressivement modifié la donne. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont changé la manière de faire de la politique. Les réseaux sociaux dont devenus des caisses de résonance importantes. Les « gilets jaunes » constituent le premier mouvement social digital. Facebook et les messageries instantanées ont facilité leur mobilisation sur tout le territoire. Emmanuel Macron a été surpris par ce mouvement, or, en 2017, il a construit son succès électoral en recourant aux réseaux pour constituer son parti. Les mouvements populistes jouent sur la carte communautaire, sur l’idée du rassemblement de personnes qui pensent la même chose. C’est le principe même des réseaux sociaux. En sélectionnant les amis, les sujets, la place laissée à l’ouverture à l’autre et aux idées nouvelles tend à se réduire. Au-delà de ces considérations, le politique et le social sont de retour. Le cours des actions dépend désormais des tweets de Donald Trump autant que des décisions de la banque centrale.

Ce retour du politique s’accompagne d’une remise en cause du multilatéralisme. Or, l’économie n’aime guère les décisions brutales et unilatérales. Elle préfère le consensuel. Depuis 1945 autour du FMI, de la Banque Mondiale, du GATT puis de l’OMC, les États ont essayé plus ou moins bien de s’accorder. La crise de 2008 a été en partie jugulée grâce à l’action coordonnée des puissances parties prenantes du G20. Aujourd’hui, le concert des Nations est en mode polyphonie dissonante. En cas de choc économique, une spirale négative pourrait s’enclencher plus rapidement en cas d’adoption de politiques non coopératives.

Les indicateurs avancés mal orientés

Les indicateurs PMI des directeurs d’achat de la société Markit sont assez fiables. Que ce soient ceux qui retracent l’activité des services ou de l’industrie, ces indicateurs sont tous en baisse depuis le milieu de l’année, après avoir connu une hausse rapide de 2015 à 2017. L’indicateur du sentiment économique de la zone euro a perdu près de 8 points ces six derniers mois. Malgré tout, ces indicateurs sont encore au-dessus de leur moyenne de longue période.

Les premières statistiques de la fin de l’année 2018 confirment que le ralentissement économique de la Chine est plus fort que prévu. Aux États-Unis, avec la fin des effets de la réforme fiscale de Donald Trump, les investisseurs sont aux aguets pour réagir face aux premiers signes de retournement de l’activité. La croissance de la zone euro semble s’étioler de trimestre en trimestre, butant sur la démographie atone et les faibles gains de productivité.

  • L’investissement et les achats durables piétinent

Après une forte progression en 2016 et 2017, l’investissement productif des entreprises, celui en logements des ménages et les achats de voitures sont en recul. Néanmoins, il faut relativiser le recul de cette année qui fait suite à une année exceptionnelle. Par ailleurs, le recul des ventes de véhicules n’est pas sans lien avec le durcissement des normes antipollution entrées en vigueur le 1er septembre dernier.

  • Plein emploi ne rime pas avec croissance

Dans plusieurs pays, l’économie bute sur les difficultés d’embauche des entreprises. Ce problème freine la croissance. Plusieurs pays dont les États-Unis et l’Allemagne ont des taux de chômage inférieurs à 4 %. Le plafonnement de la population active conduit, en règle générale, à la stagnation. La croissance de l’emploi est de 1 % au sein de la zone euro, soit un niveau bien plus faible à celui qui prévalait avant crise.

  • L’inconnu du commerce international

Quand le commerce international ralentit, la croissance fait de même. Avec une moindre augmentation des revenus, avec les tensions sino-américaines, les échanges mondiaux qui ont connu une bonne année 2018 pourraient se ralentir. La zone euro serait la première à être touchée du fait de sa forte dépendance au commerce international.

Le BREXIT, c’est logiquement pour mars

Depuis plus de deux ans, le Brexit occupe les esprits. Logiquement, sauf surprise de dernière minute, il est prévu pour le mois de mars prochain. Si Theresa May n’arrive pas à dégager une majorité aux Communes, ce qui en l’état des forces est probable, il n’est pas impossible que le « hard Brexit » soit au menu. Les conséquences économiques seraient importantes pour le Royaume-Uni. Certains secteurs seraient particulièrement touchés, tels que l’agriculture, les transports et les services financiers. Mais des pays européens, comme la France qui dégage un excédent commercial avec le Royaume-Uni et l’Allemagne, un de ses premiers fournisseurs, subiraient les effets de ce départ non négocié. L’impact potentiel sur le PIB de la zone euro est mal apprécié. Il pourrait atteindre entre 2 à 4 % sur longue période. Pour 2019, la perte de croissance est estimée à 0,5 point. Pour le Royaume-Uni, en cas d’absence d’accord, sur longue période, le manque à gagner en termes de PIB pourrait atteindre jusqu’à 8 %.

Face à ce risque, l’idée d’un nouveau référendum est avancée, en particulier, par Tony Blair. Les électeurs pourraient être amenés à choisir entre le maintien dans l’Union ou le « hard Brexit ». Les autorités européennes ont signalé qu’elles n’étaient pas opposées à l’idée de suspendre le processus de départ du Royaume-Uni.

 

Une politique monétaire moins accommodante mais des taux toujours très bas

Depuis le mois de décembre, la Banque centrale européenne a mis un terme à ses rachats d’obligations. En revanche, la BCE ne devrait, au mieux, relever ses taux directeurs qu’à compter de la fin du second semestre 2019. Aux États-Unis, le relèvement des taux directeurs américains devrait se poursuivre mais à un rythme moins soutenu. Deux hausses au lieu de quatre sont pour le moment programmées.

Les taux d’intérêt sont toujours historiquement bas, surtout en prenant en compte l’inflation. Leur légère remontée n’est pas en soi suffisante pour entraîner un repli de l’activité.

Une politique budgétaire plus expansionniste

 

Que ce soit dans la zone euro avec l’Italie et la France ou aux États-Unis, la tendance est à la dépense publique. Une pause dans la réduction des déficits publics devrait intervenir. Même l’Allemagne pourrait légèrement desserrer les cordons de la bourse.

Un pétrole autour de 60/70 dollars

Avec le ralentissement de la croissance au sein des grandes zones économiques, Europe, Asie et États-Unis, le cours devrait rester sage en 2019. Pour la zone euro, un baril autour de 50/60 dollars est économiquement assez confortable. Cela ne remettrait pas en cause la rentabilité de certaines activités industrielles ou de services comme les transports aériens.

Des entreprises bien gérées en pleine digitalisation

Les entreprises ont digéré la Grande Récession et ont restauré leurs marges. Les taux de profit sont corrects. Certes, la digitalisation impose au sein de nombreux secteurs des changements de modèle et des investissements importants. Les gains de productivité demeurent, pour le moment, modestes, même si nul ne désespère de récolter prochainement les plus-values du digital.

Pas de déséquilibres financiers majeurs

Par rapport à 2000 et 2008, les valorisations boursières sont assez raisonnables. Seules les valeurs technologiques ont connu au cours des trois premiers trimestres 2018, une augmentation spéculative. La correction intervenue à partir du mois d’octobre a, en partie, assaini le marché. Le cours de l’action Apple a, en deux mois et demi, perdu le cinquième de sa valeur.

Les actifs financiers sont sous-valorisés au sein de la zone euro. Le PER sur les résultats futurs est inférieur à 14 pour l’Eurostoxx quand il était de 16 en 2008 et de 20 en 2000. Même si l’immobilier est en forte hausse dans plusieurs pays, les ratios prix des maisons par rapport au salaire nominal par tête d’une part et le prix de l’immobilier commercial par rapport au PIB d’autre part sont inférieurs en 2018 à leur niveau de 2009 de près de 10 points pour le premier et de 5 points pour le second.

Le taux d’endettement des ménages est en baisse au sein de la zone euro et aux États-Unis. Il est passé de 62,5 à 57,5 % du PIB de 2009 à 2018, la France faisant en la matière exception. Néanmoins, le taux d’endettement des ménages français reste inférieur à la moyenne de la zone euro en s’élevant à 50 % du PIB.

2019 ne naît donc pas dans la béatitude. Le pessimisme est de mise en ce début d’année. Certes, les phénomènes d’autoréalisation pourraient accentuer le ralentissement en cours. Mais, pour autant, rien ne prédestine, en l’état, l’économie mondiale à un nouvel arrêt brutal.

Entre la nécessaire croissance pour améliorer le niveau de la population mondiale et l’indispensable transition énergétique pour limiter le réchauffement climatique, la synthèse complexe à réaliser. Pour le moment, les mesures prises dans l’esprit de la COP 21 ont des effets négatifs sur les ménages et sur les finances publiques. L’idée que le développement d’un important secteur d’activités durables serait porteur de croissance reste encore à démontrer. Le défi, en 2019, sera donc d’obtenir des gains de productivité tant grâce au digital qu’aux nouveaux moyens de production qualifiés de durables.

 

A lire dans le Mensuel du Cercle N°57 de janvier 2019

 

 

 

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