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L’intelligence artificielle (IA) se diffuse à grande vitesse au sein de la quasi-totalité des secteurs d’activité. Sa rapidité de pénétration est plus importante que celle d’Internet au tournant du siècle dernier. Elle suscite un engouement financier sans précédent avec la crainte d’un retournement boursier en cas de déception sur les bénéfices escomptés. Les engagements de la part des investisseurs se chiffrent aux États-Unis en centaine de milliards de dollars.
L’intelligence artificielle, comme toute mutation économique, fait peur avec notamment la crainte de la destruction de nombreux emplois. Elle suscite également des espoirs de gains de productivité pour de nombreux secteurs.
Les effets de cette nouvelle technologie peuvent être regroupés autour de trois grandes dynamiques : automatisation, amélioration décisionnelle et création de nouveaux modèles économiques.
Au sommaire de cette étude
Un fonds indiciel est un véhicule d’investissement collectif dont l’unique objectif est de reproduire la performance d’un indice de référence, que cet indice soit composé d’actions, d’obligations ou de tout autre actif éligible. Il ne s’agit ni de chercher à battre le marché, ni de sélectionner des titres « gagnants », mais simplement d’absorber l’intégralité d’un marché — ou d’un segment de marché — en une seule ligne. Selon la méthode utilisée, la réplication peut être physique (le fonds acquiert effectivement les titres de l’indice selon leur pondération) ou synthétique (via des contrats financiers — swaps — avec des contreparties, permettant d’obtenir la performance de l’indice sans détenir nécessairement tous les titres). Quelle qu’en soit la méthode, la promesse est claire : offrir le retour du marché — et pas plus — à un coût réduit, dans un cadre réglementaire strict.
À tort, les fonds indiciels sont confondus avec les ETF qui ont dans les faits un spectre plus large. Les ETF (Exchange Traded Fund) renvoient à une forme juridique et opérationnelle de fonds (OPCVM ou équivalent UCITS – Undertakings for Collective Investments in Transferable Securities) cotés en Bourse et négociables en continu comme une action. L’ETF permet un prix en temps réel, une liquidité intra-journalière, des ordres classiques et une transparence renforcée. Dans la pratique, environ 97 % des ETF suivent un indice créant une confusion conceptuelle mais, techniquement : des ETF actifs (non indiciels) existent. Par ailleurs, des fonds indiciels non cotés qui ne sont pas des ETF sont proposés en particulier dans le cadre de l’assurance vie.
Pour mesurer l’adoption des ETF en France, l’autorité compétente — Autorité des marchés financiers (AMF) — publie un « tableau de bord des investisseurs particuliers actifs ». En 2024, 509 000 particuliers ont, en France, acheté ou vendu au moins un ETF côté en Europe. En 2023, ils étaient 296 000. Au total, sur l’année 2024, l’AMF a recensé 5,2 millions de transactions sur des ETF effectuées par des investisseurs particuliers, contre 2,8 millions l’année précédente.
D’autres sources estiment à plus d’un million (voire davantage) le nombre de Français détenant des ETF, si l’on prend en compte les porteurs « passifs » (ceux qui n’ont pas nécessairement réalisé une transaction récente).
L’un des atouts majeurs des fonds indiciels est la diversité des actifs accessibles. Les épargnants peuvent avoir accès aux à :
Depuis deux ans, des fonds indiciels crypto ont été créés par des gestionnaires d’actifs américains comme Blackrock. Ces fonds cherchent à répliquer le prix de cryptomonnaies comme le Bitcoin ou l’Ethereum. En France, les grands établissements — banques, assureurs, gestionnaires d’actifs — n’en proposent pas encore dans les enveloppes classiques d’épargne (assurance vie, PER, PEA) dans l’attente d’une réglementation de l’AMF et de l’ACPR.
Avec les ETF et les ETC, l’investisseur peut, selon son appétence au risque, bâtir une allocation diversifiée, équilibrée, voire thématique, en combinant plusieurs familles d’actifs.
Le succès repose sur plusieurs raisons :
Les ETF sont des supports à risques. Il ne faut pas oublier que l’ETF réplique le marché. Si l’indice sous-jacent baisse, l’ETF le suit sans amortisseur. La diversification « globale » n’élimine pas le risque systémique. À la différence des fonds classiques, il n’y a pas de gestionnaires qui essaieront de limiter la baisse.
Les ETC matières premières, notamment or, ou les ETF sectoriels/ thématiques, peuvent subir des fluctuations puissantes. Les ETC comportent un risque juridique ou de contrepartie plus élevé que les fonds UCITS classiques.
Les fonds indiciels sont purement passifs. Il n’y a pas d’engagement actionnarial. Un investisseur en ETF ne choisit pas les titres, ne contrôle pas l’entreprise. À grande échelle, cela pose des questions sur la gouvernance des sociétés cotées, la diversité des investisseurs, et le rôle actif des actionnaires. La forte croissance des ETF fausse le cours des entreprises en augmentant leur valorisation sans lien direct avec les résultats ce qui peut générer des effets de bulle. À la fin de 2024, les ETF représentaient environ 13 800 milliards de dollars d’encours au niveau mondial. Le marché croît de 25 à 30 % par an, et certaines niches, comme les ETF thématiques, se développent encore plus rapidement.
Le fonds indiciel, incarné par les ETF et les ETC, n’est plus un instrument exotique ou marginal. En quelques années seulement, il a conquis une place dans l’épargne des particuliers français, bouleversant les habitudes, transformant les portefeuilles, démocratisant l’accès aux marchés. Il offre une alternative crédible aux produits d’épargne traditionnels, aux fonds gérés activement, aux logiques de sécurité statique. Il introduit une discipline, une lisibilité, une transparence. Mais ce succès ne doit pas occulter les risques : la gestion passive ne supprime pas l’incertitude, elle l’accepte et la rend collective. Elle ne garantit ni le rendement, ni la sécurité absolue. Elle demande à l’épargnant de rester lucide, informé, prêt à accepter les cycles, les replis, la volatilité. Elle exige de distinguer entre l’indiciel « cœur de portefeuille » constitué d’actions mondiales, d’obligations, dans le cadre d’allocations équilibrées et les stratégies plus aventureuses (matières premières, ETF sectoriels, produits à levier, crypto).
La Cour des comptes vient de publier son rapport « Démographie et finances publiques ». Le constat est sans détour : le vieillissement de la population va structurer durablement l’économie française et peser sur nos finances publiques. Ce défi n’est pas conjoncturel ; il accompagnera le pays pour les cinq prochaines décennies.
En vingt ans, la France a nettement vieilli. Les 65 ans et plus représentent aujourd’hui 21,8 % de la population, contre 16,3 % en 2005. Les moins de 20 ans, eux, diminuent. Cette tendance se poursuivra : en 2070, près d’un Français sur trois sera senior. Les plus de 75 ans progresseront, passant de 7,3 à plus de 11 millions, tandis que la population en âge de travailler reculera de 38 à 34,6 millions.
Le ratio de dépendance — rapport entre les 65 ans et plus et la population active potentielle — reflète ce basculement : 25 % en 2000, 37 % en 2023, et sans doute autour de 45 à 50 % en 2040. À cela s’ajoute un fait symbolique : depuis 2025, le solde naturel est devenu négatif, avec davantage de décès que de naissances.
Une population active plus réduite pèse mécaniquement sur le potentiel de croissance. Le taux d’emploi progresse, mais la France reste légèrement en dessous de la moyenne européenne. Pour compenser la baisse du nombre d’actifs, il faudra agir sur tous les leviers : emploi des jeunes, maintien dans l’emploi des seniors, insertion durable des femmes, intégration professionnelle des immigrés, formation continue et montée en compétence.
Le vieillissement influe aussi sur l’épargne. Les ménages âgés épargnent davantage et privilégient les placements sécurisés, ce qui facilite le financement public mais réduit les capitaux disponibles pour l’investissement productif.
Moins d’actifs, c’est moins de cotisations sociales et moins de revenus liés au travail. Les seniors contribuent davantage via l’impôt sur le revenu et le patrimoine, mais l’équilibre n’est pas assuré pour autant. En 2019, les 20-39 ans consacraient 39 % de leurs revenus à la protection sociale, contre 25 % pour les plus de 65 ans. Le vieillissement accentuera cette asymétrie.
Les dépenses liées au vieillissement — retraites, santé, dépendance — représentent déjà plus de 40 % de la dépense publique. Elles ont gagné 11 points en 25 ans. La Cour estime que, sans ajustement, les dépenses publiques pourraient dépasser 60 % du PIB en 2070. Maintenir le ratio actuel impliquerait, à l’inverse, une diminution des dépenses par habitant, ce qui signifierait un effort inédit.
L’un des angles morts actuels reste la prise en charge de la perte d’autonomie des générations du baby-boom, qui atteignent progressivement des âges où la dépendance devient plus fréquente.
Quels leviers pour agir ? Pour atténuer les effets du vieillissement, la Cour identifie plusieurs pistes :
La Cour des comptes insiste enfin sur la nécessité d’une stratégie lisible, afin d’éviter des tensions intergénérationnelles à mesure que les classes d’âge les plus nombreuses atteignent la retraite puis les âges élevés.
Le système des droits indirects du système de retraite, droits constitués des pensions de réversion et des droits familiaux, est jugé complexe et peu équitable. Il lui est notamment reproché de ne pas prendre suffisamment en compte l’ensemble des situations auxquelles peuvent être confrontés les assurés. Depuis une dizaine d’années, la réforme des droits indirects est annoncée pour être à chaque fois reportée. Le Conseil d’Orientation des Retraites a, à la demande du gouvernement d’Elisabeth Borne, en 2023, préparé un nouveau rapport sur le sujet qui a été rendu public le 1er décembre dernier et qui comporte plusieurs pistes de réformes. En 2024, les droits familiaux représentaient près de 25 milliards d’euros. Parallèlement, 38,7 milliards étaient consacrés au financement de la réversion, soit un total proche de 64 milliards qui équivaut à 16,2 % des pensions distribuées dans leur globalité. Les droits familiaux représentent 24,9 milliards d’euros et les pensions de réversion 38,7 milliards d’euros.
Apparue au XIXe siècle, la réversion s’est constituée, à l’origine, dans le prolongement du devoir de protection dû à la femme par son mari, auquel incombait, jusqu’en 1971, le statut de chef de famille en application de l’article 213 du Code civil.
Fin 2023, tous régimes confondus, 4,4 millions de personnes sont, selon la DREES, titulaires d’une pension de retraite de droit dérivé, aussi appelée pension de réversion. Pour 884 000 d’entre elles, la pension de droit dérivé constitue l’unique pension de retraite à cette date. Les femmes, plus souvent veuves, représentent 87 % des bénéficiaires. Le nombre de retraités d’une pension de droit dérivé croît avec l’âge entre 50 et 85 ans. Les régimes verseurs les plus importants sont le régime général et l’Agirc-Arrco. En 2023, ils servent respectivement 2,8 millions et 2,9 millions de pensions de droit dérivé.
Au décès de l’assuré, les droits à la pension de réversion sont déterminés en fonction des droits acquis par le défunt et de la réglementation en vigueur à cette date, que l’assuré ait ou non liquidé sa pension au moment du décès.
Les régimes de base – CNAV, MSA salariés, SSI – ont progressivement durci leurs critères avec l’introduction d’une condition de ressources en 2003, marquant une rupture avec l’universalité initiale. La logique est désormais celle d’une aide ciblée.
La pension de réversion est attribuée au conjoint survivant âgé de 55 ans ou plus, quand ses ressources annuelles ou celles du ménage sont inférieures ou égales à 2 080 fois le SMIC horaire pour une personne seule et à 1,6 fois ce montant pour les personnes vivant à nouveau en couple après le décès de l’assuré.
Les conditions de ressources ramènent la réversion à une prestation quasi assistancielle. Elles s’appliquent individuellement ou en couple, avec prise en compte de la plupart des revenus du ménage. En 2025, le plafond de ressources pour bénéficier de la pension de réversion dans le régime de base est le suivant :
Le PACS ou le concubinage n’ouvrent pas droit à la réversion. Le droit est partagé entre ex-conjoints, proportionnellement à la durée du mariage. Contrairement à la quasi-totalité des régimes complémentaires, le remariage ne supprime pas la réversion.
Le montant de la pension de réversion est de 54 % de la pension du défunt, avec un plafond de 12 717 euros par an.
Dans les régimes agricoles (MSA exploitants), les conditions sont alignées, même si certaines majorations sont proratisées selon le statut d’exploitant.
Comme pour le régime général, seul le mariage ouvre droit à réversion. Ni le PACS ni le concubinage, pourtant très présents, ne sont reconnus. Certaines conditions sont ajoutées pour l’obtention de la pension.
Le mariage doit remplir au moins l’une des trois conditions suivantes :
La règle des quatre ans consacre les couples stables. Celle des deux ans avant décès protège les unions récentes. L’existence d’un enfant commun, enfin, emporte toutes les autres conditions.
Contrairement au régime général, où la réversion survit au remariage, celui-ci, dans la fonction publique, fait perdre le droit à la réversion. Cette dernière n’appartient pas à la personne, elle appartient à l’union.
Le montant de la réversion est fixé à 50 % de la pension de la personne décédée. Une majoration de 10 % pour famille nombreuse est appliquée lorsque le couple a élevé trois enfants ou plus.
La réversion peut être partagée entre plusieurs conjoints successifs. Chaque époux ou épouse reçoit une part proportionnelle à la durée du mariage, dans une logique proche de l’Agirc-Arrco.
Pour le régime complémentaire des salariés, Agirc-Arrco, la pension de réversion revient au conjoint survivant, non parce qu’il est dans le besoin, mais parce qu’il a partagé une trajectoire de vie et de revenus. Contrairement au régime général, aucun plafond de ressources n’est prévu.
Le bénéficiaire doit avoir été marié et avoir au moins 55 ans pour recevoir la réversion. Ce critère disparaît si le survivant a deux enfants à charge. Le remariage, le PACS ou le concubinage font perdre le droit à réversion. Si le défunt a été marié plusieurs fois, la pension est répartie proportionnellement à la durée de chaque mariage. La pension de réversion représente 60 % des droits complémentaires acquis.
Depuis janvier 2020, les travailleurs indépendants (artisans, commerçants et professions libérales) sont affiliés au régime général pour leur retraite de base. Leur régime complémentaire a été aligné sur celui des salariés du privé, à l’exception des indépendants exerçant une profession libérale réglementée.
La retraite complémentaire des professions libérales est administrée par les différentes caisses de la CNAVPL (médecins, notaires, avocats, experts-comptables, architectes…).
Le taux de la pension de réversion varie entre 50 % et 60 %. Il est de 60 % pour les régimes des médecins, des pharmaciens, des experts-comptables, des dentistes ou des avocats.
Les caisses des professions libérales les plus traditionnelles, fixent à 60 ans l’accès à la réversion pour les (notaires, médecins). Cet âge est de 55 ans pour les avocats ou les experts-comptables. Certaines caisses suppriment cette condition en présence d’enfants à charge, comme l’Agirc-Arrco.
Pour la majorité des caisses des professions libérales, le remariage provoque l’extinction du droit à réversion. Certaines caisses tolèrent des formes de cumul partiel ou des exceptions historiques.
Les pouvoirs publics, depuis des années, réfléchissent à la refonte des droits indirects et tout particulièrement de la réversion. La réversion, outil de redistribution sociale, fait l’objet de critiques en raison même de son financement. Les pensions de réversion sont financées par les cotisations des assurés quand, d’un point de vue comptable, elles devraient relever du champ de la fiscalité ou faire l’objet d’une cotisation assurantielle spécifique.
Au-delà de la question de sa nature, le système actuel est critiqué pour son opacité. Des demandes d’harmonisation et de simplification ont été, à maintes reprises, exprimées. Au nom de l’équité, de la transparence et de la simplification, les conditions et les dates d’octroi pourraient être alignées.
Si la logique sociale l’emporte, le plafonnement en fonction des ressources devrait être généralisé. Si, au contraire, c’est la logique patrimoniale qui domine, il conviendrait de supprimer la référence au plafond de condition de ressources. Le taux de la réversion devrait, par ailleurs, être harmonisé. Il devrait être plus élevé en cas de généralisation du plafonnement de ressources de toutes les pensions de réversion.
La question de la liste des bénéficiaires se pose également. La pension doit-elle être répartie entre tous les ex-conjoints ou être attribuée à un seul d’entre eux ? Avec l’allongement de l’espérance de vie, l’augmentation des divorces, le développement du PACS ou du concubinage, faut-il revoir les modes d’attribution ? L’ouverture éventuelle, dans tous les régimes, du droit à réversion aux couples non mariés suppose une application stricte de la règle de proratisation des droits en fonction des durées de vie commune. Le principe de proratisation, déjà appliqué au titre des pensions de réversion distribuées par l’Agirc et l’Arrco, devrait de ce fait être étendu à tous. L’autre voie de réforme consisterait, en prenant exemple sur les systèmes allemand ou canadien, à opter pour un partage des points à la retraite au sein du couple. Dans ce cadre, le compte de retraite est conjugalisé. Les points accumulés durant la vie professionnelle sont additionnés et permettent de calculer le montant de la pension. En cas de séparation, les points sont partagés. Ce système a l’avantage de la simplicité mais modifierait en profondeur le système.
Le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) souligne deux failles du système français de réversion :
Le COR a étudié la possibilité d’harmoniser les règles entre les différents régimes.
Parmi les hypothèses retenues figure celle consistant à supprimer la condition de ressources dans les régimes où elle existe. Sa disparition « entraînerait une forte augmentation des dépenses, environ +30 % ». À l’inverse, si la réversion n’était attribuée qu’à des individus ayant des revenus sous un certain niveau (environ 2 000 euros par mois), les dépenses de réversion diminueraient de 16,8 % en 2070 avec un effet marqué pour les régimes de la fonction publique et l’Agirc-Arrco.
Le COR propose également de réformer le mode de calcul de la réversion, en appliquant la formule suivante :
Réversion = (2/3 de la retraite du défunt) – (1/3 de la retraite du survivant), si le résultat est positif.
Cette formule, inspirée des échelles de niveau de vie de l’INSEE, assure mécaniquement que le survivant retrouve un niveau comparable à celui du couple.
Ce mécanisme a plusieurs effets immédiats :
Le COR propose également l’ouverture de la réversion à tous les couples, quel que soit le statut juridique de leur union.
Cette réforme s’accompagnerait d’une baisse progressive des dépenses de réversion, de l’ordre de 13 % à horizon 2070, sans compromettre la protection des veuves les plus modestes.
Les droits familiaux jouent un rôle non négligeable dans le système de retraite. Ils rappellent que l’équilibre des régimes dépend du renouvellement des générations. Ils sont un des éléments de la politique familiale et contribuent par ailleurs à réduire l’écart de pensions entre les hommes et les femmes.
Les assurées, femmes, bénéficient ainsi de quatre trimestres pour la maternité – ou l’adoption. Quatre supplémentaires sont attribués pour l’éducation, attribués par défaut à la mère, mais pouvant donner lieu à un partage avec le conjoint. Dans les faits, la grande majorité revient encore aux femmes. Ces trimestres facilitent l’obtention de la retraite à taux plein, notamment pour ces dernières. Les assurés peuvent également bénéficier de majorations de pensions pour famille nombreuse. Cette majoration, de 10 %, est obtenue dès le troisième enfant. Elle profite plus aux hommes qu’aux femmes, car leurs pensions sont supérieures à celles de ces dernières.
Le congé parental, le temps partiel subi ou choisi, les années passées à élever un enfant handicapé peuvent donner lieu à compensation avec le dispositif AVPF, pour Assurance vieillesse des parents au foyer. Dans le cadre de ce dispositif, l’État paie fictivement des cotisations vieillesse pour les parents en retrait temporaire du marché du travail, au niveau du SMIC. Il permet l’obtention de trimestres utiles pour obtenir la retraite à taux plein avant 67 ans.
Au niveau des complémentaires, l’Agirc-Arrco reprend la majoration de 10 % pour trois enfants. Une majoration de 5 % est par ailleurs prévue par enfant à charge au moment de la retraite. Les indépendants, les professions libérales, les régimes spéciaux déclinent ces droits familiaux selon des règles proches mais non identiques, révélant la diversité des histoires professionnelles et des traditions sectorielles.
Le COR s’est livré au même exercice pour les droits familiaux que pour les pensions de réversion en simulant la convergence des différentes règles.
L’harmonisation de la majoration des droits d’assurance (MDA), quatre trimestres pour toutes les mères au titre de la naissance ou de l’adoption, plus quatre trimestres si leur activité a réellement été interrompue dans les trois années suivant l’arrivée de l’enfant, viserait à supprimer les attributions de trimestres « automatiques » aux parents qui n’ont pas connu d’interruption professionnelle. Ce recentrage redonne du sens à la MDA en tant que mécanisme de compensation. Le COR souhaite que l’AVPF soit calculée à partir du salaire réel perçu avant l’interruption et non en fonction du SMIC.
Le COR propose de majorer les pensions dès le premier enfant : 3 % pour un enfant, 6 % pour deux, 20 % pour trois et plus. Ce dispositif serait plafonné pour éviter qu’il profite aux assurés les plus riches. Il ne serait, par ailleurs, accessible qu’aux parents ayant eu des interruptions d’activité réelles.
Enfin, le rapport expose un scénario reposant sur une réduction des pensions de réversion associée à une majoration des droits familiaux. « Les évolutions seraient favorables aux mères de famille, en particulier celles ayant un ou deux enfants », précise le COR. Les hommes, eux, conserveraient, « dans la grande majorité », une pension inchangée.
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Les droits dérivés et familiaux sont devenus l’un des derniers grands ensembles du système de retraite à n’avoir jamais fait l’objet d’une refonte cohérente. Construits par strates, en réponse à des situations sociales anciennes, ils peinent désormais à s’adapter à la diversité des parcours professionnels et familiaux.
L’extrême hétérogénéité des règles, les écarts de traitement entre régimes et la difficulté à garantir un maintien de niveau de vie après un décès fragilisent leur légitimité.
Les travaux du COR montrent que plusieurs voies de modernisation sont possibles, mais qu’aucune n’est indolore. Chaque scénario engage des choix clairs entre équité, lisibilité et soutenabilité financière. La question centrale n’est donc plus de savoir s’il faut réformer, mais de définir les principes directeurs qui doivent structurer l’évolution future : harmonisation des règles, meilleure cohérence entre régimes, transparence accrue pour les assurés, et adaptation aux réalités contemporaines des trajectoires de vie.
Une réforme bien conçue permettrait de préserver la fonction protectrice des droits indirects tout en les rendant plus justes, plus compréhensibles et mieux adaptés au fonctionnement du système de retraite du XXIᵉ siècle. Elle constituerait un pas décisif vers un ensemble plus cohérent, plus lisible et plus soutenable pour les générations à venir.
Le Conseil des Prélèvements Obligatoires (CPO), dans son rapport sur l’imposition du patrimoine publié le 1er décembre 2025, souligne la progression du montant des patrimoines, liée au vieillissement démographique et à la forte valorisation des actifs immobiliers et financiers enregistrée ces dernières années. Le patrimoine net des ménages représentait 6 fois leur revenu disponible en 2021, contre 4,5 fois en 2000.
La France connaît une concentration du patrimoine plus faible que dans plusieurs pays de l’OCDE : le décile le plus aisé détient 60 % de la richesse nationale et le 1 % le plus riche en détient 27 %, contre respectivement 70 % et 35 % aux États-Unis.
L’imposition du patrimoine est, en France, relativement élevée par rapport à celle constatée dans l’OCDE. Elle s’est élevée à 113,2 milliards d’euros en 2024 et progresse légèrement plus vite que la valeur du patrimoine depuis 30 ans.
L’imposition de la détention et de la transmission du patrimoine (64,3 milliards d’euros) représente 0,4 % du patrimoine total des ménages, tandis que l’imposition des revenus du patrimoine (48,9 milliards d’euros) équivaut à 11,6 % de ces revenus.
Le CPO souligne, à juste titre, que la fiscalité du patrimoine est à la fois lourde et inéquitable. Son poids varie fortement selon la structure des actifs détenus et les possibilités d’optimisation auxquelles seuls certains ménages ont accès.
Le Cercle de l’Épargne défend un principe simple : une fiscalité reposant sur une assiette large, comportant le moins d’exonérations et d’abattements possible, associée à des taux faibles. L’objectif est de promouvoir une fiscalité neutre sur le plan économique, limitant les stratégies d’optimisation et favorisant une allocation efficiente du capital.
Le CPO relance, dans le prolongement du débat parlementaire, la discussion sur la taxation des hauts revenus et des hauts patrimoines. Il souligne la nécessité d’une meilleure appréhension des revenus économiques et du patrimoine réellement détenu par les ménages les plus aisés. L’instauration de dispositifs différentiels et une réflexion européenne sur la taxation des bénéfices remontant aux holdings sont évoquées.
En France, plus de 50 % des successions sont exonérées de droits. Comme souvent dans le système fiscal français, les ménages modestes sont totalement exonérés tandis que les ménages aisés bénéficient de régimes dérogatoires (pacte Dutreil, holdings familiales).
Le CPO propose de limiter certaines niches fiscales, notamment le pacte Dutreil, sans pour autant recommander une refonte complète des droits de succession. Il préconise de moderniser le barème des droits de mutation à titre gratuit afin de tenir compte de l’évolution des structures familiales. Il suggère également une réduction modérée des taux actuels — réduction qui pourrait être plus significative pour rapprocher la France des pratiques observées à l’étranger.
Les abattements pour durée de détention sur les résidences secondaires, qui aboutissent à une exonération totale au bout de trente ans, contribuent à figer le marché et encouragent certains ménages à requalifier abusivement un bien en résidence principale au moment de la vente. L’abandon de ces abattements, compensé par une indexation du prix d’achat sur l’inflation, constituerait un progrès. À cet égard, un indice spécifique lié à l’immobilier — par exemple l’indice du coût de la construction — pourrait être retenu.
Se pose également, dans une logique de neutralité économique, la question de l’imposition des plus-values sur les résidences principales afin d’éviter les distorsions actuelles.
42 % des ménages disposent d’un contrat d’assurance vie, principal outil d’épargne longue en France. À ce titre, elle bénéficie, comme le PEA ou le Plan d’Épargne Retraite, d’un régime fiscal spécifique. L’assurance vie permet en outre de désigner librement des bénéficiaires, parfois en dehors des règles successorales classiques, évitant des droits pouvant atteindre 60 %.
Le CPO propose de remettre en question cet avantage dérogatoire, qui résulte largement du niveau élevé des droits de succession en France. Toute réforme en ce sens supposerait, au préalable, une véritable décrue des droits de succession pour ne pas désorganiser l’épargne longue.
Le CPO estime que l’épargne réglementée occupe une place trop importante en France au détriment des placements longs. Pour encourager à des transferts vers les produits d’épargne de long terme, il propose une fusion du Livret A avec le Livret de Développement Durable et Solidaire ainsi que la fiscalisation des intérêts au-delà de 19 125 euros. Le gouvernement, pour couper court à toute polémique, a indiqué qu’il n’entendait pas reprendre à son compte cette proposition.
Le rapport du CPO a le mérite de couvrir l’ensemble du champ de la fiscalité patrimoniale : taxe foncière, épargne réglementée, plus-values immobilières, transmission d’entreprise, assurance vie, pacte Dutreil, etc. Cette fiscalité se caractérise aujourd’hui par une complexité rare et une cohérence économique limitée. Elle finance de nombreuses collectivités — État, départements, communes — ce qui rend toute réforme difficile.
Une modernisation est pourtant indispensable, à la fois pour éviter une concentration excessive du capital, améliorer la lisibilité du système et renforcer l’efficience économique du patrimoine des ménages.
En 2024, les acteurs non-résidents détenaient 1 083 milliards d’euros d’actions de sociétés du CAC 40, un taux de détention de 50 %. En 2023, ce taux atteignait 49,5 %. La part des investisseurs non-résidents est au plus haut depuis l’épidémie de Covid. En 2024, avec la crise politique, les investisseurs nationaux se sont délestés en actions françaises quand les non-résidents ont renforcé leurs positions. Les premiers ont été vendeurs nets d’actions hexagonales à hauteur de 3,5 milliards d’euros de titres en 2024, tandis que les seconds ont, en net, acheté 3,3 milliards d’euros d’actions.
Les non-résidents ont acheté pour environ 5 milliards d’euros de titres de sociétés appartenant aux secteurs de la santé et des services aux collectivités. À l’inverse, les secteurs de l’industrie et de l’énergie, qui avaient connu un fort engouement de la part des investisseurs non-résidents entre 2020 et 2023, ont affiché des sorties de 2,2 milliards d’euros. Ce renforcement des étrangers dans le capital des grandes entreprises françaises est avant tout un effet de portefeuille. Ils ont eu tendance à sortir des entreprises non cotées au CAC 40, de taille moyenne, au profit de celles qui le sont et qui sont plus internationalisées. Les acteurs étrangers ne détiennent que 32 % des actions d’entreprises qui ne sont pas présentes au CAC 40. En 2024, ce dernier s’est érodé de 2,2 %, contre respectivement 6 % et 8 % pour le CAC Mid et le CAC Small, les deux indices des capitalisations plus petites de la place de Paris. La capitalisation totale des actions détenues par les investisseurs français s’est donc réduite par ce simple effet de valorisation.
Cette préférence pour les grandes entreprises a pour conséquence qu’elles sont désormais majoritairement détenues par des capitaux étrangers. Selon la Banque de France, le capital de 19 des 35 sociétés françaises de l’indice est détenu à plus de 50 % par des acteurs étrangers.
Malgré tout, parmi les grands pays européens, la France reste le marché le moins internationalisé. En Allemagne, le taux de détention des actions par les non-résidents atteint 57 %, contre 46 % en France. Cette part atteint même 88 % pour les Pays-Bas. Rapporté au produit intérieur brut (PIB), le marché financier français est le deuxième en zone euro en termes d’importance. La capitalisation totale des actions françaises atteignait 104 % du PIB, contre 148 % pour les actions néerlandaises.
Environ 40 % des investisseurs sont originaires de la zone euro, et en particulier du Luxembourg, où sont enregistrés de nombreux fonds d’investissement. Plus de 13 % des investisseurs étrangers sont basés au Grand-Duché, une part qui est toutefois en baisse tendancielle depuis 2021. Les États-Unis gardent leur première place, puisque les investisseurs américains représentent 34 % des actionnaires étrangers. Fait notable, la part des investisseurs localisés aux îles Caïmans a plus que triplé en 2 ans, passant de 0,8 % du total à 2,7 %. Une hausse que la Banque de France explique notamment par l’amélioration de la collecte et de la déclaration de données réalisées par l’archipel.
Le Premier ministre a décidé de suspendre la réforme des retraites de 2023, une première depuis 1993. Aucune réforme des retraites n’est, en soi, populaire. Reculer l’âge de départ à la retraite et allonger la durée de cotisation ne recueillent jamais l’assentiment de la population, que ce soit en France ou ailleurs. Les précédentes réformes, notamment celle de 2010 qui avait porté l’âge de départ de 60 à 62 ans, avaient été fortement contestées.
La suspension de la réforme de 2023 court jusqu’à fin 2027. Quel candidat à l’élection présidentielle prendra le risque de s’engager en faveur de son application, sachant qu’ils seront nombreux à réclamer son abrogation ? Au mieux, certains auront peut-être la témérité de proposer une nouvelle réforme afin de rétablir les comptes des régimes de retraite. Quelles pistes seraient alors envisageables ?
La première consisterait à transférer le dossier des retraites aux partenaires sociaux, en revenant à l’esprit de la Libération. Cela nécessiterait néanmoins de clarifier ce qui relève de l’État et de l’assistance, de ce qui est du champ de l’assurance. Depuis des décennies, la confusion des genres prévaut. L’assurance vieillesse prend à sa charge des dépenses ne résultant pas de droits contributifs, comme les majorations pour enfants. Toujours afin de revenir à l’esprit de 1944, le principe de l’équilibre pour les régimes assurantiels devrait être réaffirmé, le recours au crédit ne pouvant être autorisé que pour faire face à des besoins de trésorerie. L’Agirc-Arrco prouve depuis des années que les partenaires sociaux sont capables de trouver les solutions pour maintenir les comptes dans le vert.
La deuxième piste serait de passer à des régimes par points. À la différence de la réforme de 2019, l’unification de tous les régimes devrait être abandonnée. En Allemagne, comme en Suède ou en Italie, au moment du passage aux régimes par points, les pouvoirs publics ont eu la sagesse de maintenir plusieurs régimes. En France, progressivement, par convergence, deux ou trois régimes par points pourraient être imaginés : le régime des salariés du privé, le régime du secteur public et celui des professions libérales et des indépendants. Les caisses complémentaires pourraient se maintenir ou se rapprocher des régimes de base.
La troisième piste serait d’aller vers des systèmes plus actuariels, qui calculent le montant des pensions en fonction de l’espérance de vie à la retraite.
La quatrième piste serait d’abolir le concept d’âge légal de départ à la retraite et de ne retenir qu’un nombre minimum de trimestres. Dans de nombreux pays, les concepts d’âge légal et d’âge de retraite à taux plein n’existent pas. Une retraite « à la carte » offrirait davantage de souplesse. Par le jeu des trimestres validés et des points, il serait possible de mieux prendre en compte la pénibilité.
La cinquième piste passerait par l’ouverture de la capitalisation à toutes et à tous. Aujourd’hui, seulement 20 % de la population active est couverte. L’épargne retraite concerne essentiellement les salariés des grandes entreprises, les cadres supérieurs, les indépendants et les professions libérales. L’ensemble des actifs devrait avoir accès à un produit collectif d’épargne retraite sur le modèle du compte personnel de formation.
La France se doit de trouver une ou plusieurs solutions pour éviter qu’une « guerre des retraites » ne continue de miner la société. Opposer les baby-boomers aux autres générations ne résout rien. Aujourd’hui, le pays compte 17 millions de retraités ; il y en aura, après 2050, 23 millions. L’objectif est d’éviter l’asphyxie de l’économie sous le poids des cotisations sociales et la pauvreté des seniors par érosion des pensions. Il faudra faire preuve de responsabilité et de maturité pour écarter l’une comme l’autre.
Jean-Pierre Thomas
Président du Cercle de l’Épargne
Cité dans le journal Le Monde, Philippe Crevel évoque le succès du PER qui a su en quelques années trouver sa place dans le paysage de l’épargne. Il estime qu’en raison du vieillissement de la population, le renforcement de l’épargne retraite deviendra incontournable pour garantir à l’avenir le niveau de vie des retraités.
À la fin de l’année 2024, selon l’Association Française de la Gestion financière (AFG), les encours responsables atteignaient 1 322 milliards d’euros, en progression de +9,2 % sur un an. En dix ans, le volume a plus que doublé. Un euro sur quatre géré par les sociétés de gestion françaises répond désormais à des critères environnementaux, sociaux ou de gouvernance (critères ESG).
Désormais, les investisseurs institutionnels, les assureurs et les fonds souverains intègrent ces critères dans leurs stratégies, non pour des raisons morales, mais parce que les risques climatiques, sociaux ou réputationnels sont devenus des risques financiers à part entière.
La finance responsable repose sur trois piliers : E pour environnement, S pour social et G pour gouvernance.
Le pilier environnemental évalue la manière dont une entreprise limite son empreinte écologique : émissions de gaz à effet de serre, consommation d’eau, gestion des déchets, préservation de la biodiversité. Le pilier social s’intéresse aux conditions de travail, à la parité, à la formation, à la sécurité et au dialogue social. Le pilier gouvernance mesure la qualité du pilotage de l’entreprise : indépendance du conseil d’administration, transparence, lutte contre la corruption, stratégie de long terme.
Ces trois axes forment la grille ESG, sur laquelle les sociétés de gestion bâtissent des approches diverses :
En France, l’Autorité des marchés financiers (AMF) encadre depuis 2020 la communication des fonds se réclamant de l’investissement responsable, afin d’éviter le « greenwashing », c’est-à-dire la promotion abusive de produits prétendument verts.
Elle distingue deux grandes catégories de fonds :
Cette normalisation a renforcé la crédibilité du marché. L’information fournie à l’épargnant doit désormais être proportionnée à la réalité des engagements ESG.
Les labels sont devenus la pierre angulaire de la finance responsable. Ils fonctionnent comme des certificats de qualité, attestant qu’un fonds respecte des critères stricts en matière de durabilité.
En 2024, 77 % des encours labellisés en France portaient le label ISR (Investissement Socialement Responsable), qui reste la référence nationale. D’autres labels, comme Greenfin (créé par le ministère de la Transition écologique) ou le Label Finansol, complètent ce paysage.
Le label ISR, réformé en 2024, a relevé ses exigences notamment avec :
Au terme de la période de transition, 939 fonds ont conservé le label, soit 70 % du total. La labellisation devient ainsi un signe distinctif de crédibilité, mais aussi un facteur de sélection clef pour les épargnants.
Cette logique de certification a contribué à structurer le marché, en facilitant la comparaison entre produits et en stimulant la concurrence vertueuse entre sociétés de gestion.
La finance responsable ne se limite pas au placement « actions ». Elle s’étend à la dette : les obligations durables. Ces titres permettent de financer directement des projets environnementaux ou sociaux. En 2024, leurs encours ont atteint 221,5 milliards d’euros, soit une hausse spectaculaire de +48 % sur un an. Les Green bonds (obligations vertes) dominent le marché avec 72 % des encours, finançant par exemple des projets de rénovation énergétique ou de transport propre. Les Social bonds (obligations sociales) soutiennent des politiques de logement ou d’accès à la santé. Les Sustainability-linked bonds lient le taux d’intérêt à la réalisation d’objectifs environnementaux mesurables : si la société n’atteint pas ses cibles, elle paie plus cher.
Parallèlement, une autre approche monte en puissance : l’investissement à impact. Né aux États-Unis en 2007, popularisé par le Global Impact Investing Network, il vise à financer des projets qui démontrent un effet écologique ou social concret et mesurable, tout en recherchant une rentabilité financière. À fin 2024, les fonds à impact représentent 85,5 milliards d’euros, en progression de +5,8 %. Les investisseurs institutionnels (fonds de pension, assureurs, banques publiques) en détiennent 77 %, preuve que ce type d’investissement tend à intégrer la dimension stratégique des grands portefeuilles.
La finance à impact s’appuie sur trois principes :
En 2024, 81 % des sociétés de gestion intègrent des indicateurs climatiques dans leurs politiques d’investissement, couvrant 73 % des encours. Ces indicateurs servent à évaluer la vulnérabilité d’un portefeuille aux risques liés au climat, qu’ils soient :
Ces indicateurs recourent à des outils de mesure multiples. Ils s’appuient principalement sur l’intensité carbone qui rapporte les émissions de CO₂ au chiffre d’affaires et sur l’empreinte carbone qui mesure la quantité totale d’émissions générées.
Le périmètre étudié regroupe 3 domaines – scopes – précis :
Plus de 60 % des sociétés de gestion prennent désormais en compte le Scope 3, pourtant difficile à mesurer faute de données homogènes.
Les acteurs les plus avancés utilisent des indicateurs de température implicite, recommandés par la Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD). Ces métriques estiment le degré de réchauffement auquel un portefeuille est aligné.
Ainsi, 63 % des sociétés suivent un indicateur de température ; 60 % d’entre elles se réfèrent au scénario « 1,5 °C Net Zero » de l’Agence internationale de l’énergie. Ces trajectoires permettent de comparer la stratégie d’un investisseur à la courbe idéale de décarbonation planétaire.
Enfin, 61 % des sociétés ayant adopté des indicateurs climatiques ont fixé un objectif de réduction chiffré. La finance entre ainsi dans l’ère de la planification environnementale.
Les entreprises publient encore des informations hétérogènes, non vérifiées, souvent issues de modèles d’estimation. L’harmonisation progresse sous l’impulsion du règlement européen CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui imposera à partir de 2025 des standards communs. Le mouvement européen, pionnier sur la régulation (Taxonomie, SFDR, labels), se heurte, par ailleurs, à un environnement international contrasté. Aux États-Unis. La finance durable suscite des tensions politiques depuis que Donald Trump a décidé, une nouvelle fois, de sortir son pays des Accords de Paris. Certains États républicains accusant les fonds ESG de “militantisme climatique”.
En Asie, la démarche est plus pragmatique : les gouvernements cherchent à verdir leurs économies tout en maintenant leur croissance.
L’Europe apparaît donc comme un laboratoire avancé confronté à la réalité du marché mondial : sans convergence des standards, la cohérence globale de la finance responsable reste incomplète.
La France, forte de son ingénierie financière et de son sens de la régulation, se situe parmi les pays les plus avancés dans la transformation du capital en vecteur de durabilité. Des progrès doivent être néanmoins réalisés afin d’améliorer la fiabilité des données, de simplifier la lecture pour les épargnants, et surtout d’aligner les flux financiers aux trajectoires de neutralité carbone.
Instituée par la loi du 31 décembre 1988, la retraite progressive permet aux salariés de réduire leur activité en fin de carrière tout en percevant une fraction de leur pension.
Elle répond à une double logique :
À l’origine, elle concernait les salariés de 60 à 65 ans travaillant entre 40 % et 80 % du temps légal.
En 1993 (réforme Balladur), les conditions se sont resserrées : âge d’accès porté à 61, puis à 62 ans. Le dispositif, jugé trop complexe, était alors peu utilisé.
La loi Fillon du 21 août 2003 relance la retraite progressive :
La loi de 2010 (réforme Woerth-Sarkozy) relève l’âge légal à 62 ans. Le législateur conditionnait alors l’accès à la retraite progressive à « l’atteinte de l’âge légal de départ à la retraite moins deux ans » soit 60 ans.
En 2014, le dispositif est étendu aux cadres au forfait-jours et à l’ensemble des régimes alignés. Le nombre de bénéficiaires passe ainsi de 3 000 en 2013 à environ 25 000 en 2017, puis 40 000 en 2022.
Jusqu’en 2023, seuls les salariés du régime général, les exploitants agricoles et les agents non titulaires de la fonction publique étaient éligibles.
La réforme de 2023 étend le dispositif aux indépendants, aux professions libérales, ainsi qu’aux fonctionnaires et aux affiliés aux régimes spéciaux (à compter du 1er septembre 2023 pour les premiers, du 1er janvier 2024 pour les seconds).
Les fonctionnaires « actifs » ou « super-actifs » peuvent en bénéficier, mais selon les conditions d’âge des sédentaires, ce qui limite leur accès.
Ils doivent :
La demande s’effectue via ENSAP pour les agents de l’État, et via l’administration pour les fonctionnaires territoriaux ou hospitaliers (CNRACL).
La pension versée est proportionnelle à la quotité non travaillée (ex. : 30 % de pension pour un temps partiel à 70 %).
L’ANI du 14 novembre 2024 sur l’emploi des seniors, transposé par le décret n° 2025-681 du 15 juillet 2025, a fixé l’âge d’ouverture du droit à la retraite progressive à 60 ans pour les pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2025.
La réforme oblige désormais l’employeur à motiver son refus : l’absence de réponse dans les deux mois vaut acceptation. Le refus ne peut être justifié que par :
Pendant la période de retraite progressive, les cotisations retraite continuent d’être versées et comptent pour la liquidation définitive des droits à pension.
Au 31 décembre 2023, 26 820 personnes (dont 68 % de femmes) bénéficiaient d’une retraite progressive dans le régime général, soit une hausse de 10,7 % en un an.
L’âge moyen est de 61,9 ans (61,8 ans pour les femmes, 62,2 pour les hommes).
À la MSA salariés, 820 personnes en bénéficient (58 % de femmes), avec un âge moyen de 63,9 ans.

Depuis qu’il existe, le cumul emploi-retraite oscille entre ouverture et restriction, au gré des priorités politiques et économiques du moment. D’un outil de flexibilité et de valorisation de l’expérience, il tend aujourd’hui à redevenir un dispositif de gestion budgétaire, soumis à de multiples plafonds et contraintes. La réforme de 2023 avait redonné un souffle à cette liberté professionnelle en réintroduisant la possibilité d’acquérir de nouveaux droits ; le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026 tend à en limiter la portée.
Cette instabilité traduit une hésitation chronique : faut-il encourager les seniors à prolonger leur activité pour soutenir le financement du système, ou, au contraire, réserver les emplois aux actifs plus jeunes ? En filigrane, c’est la place du travail en fin de vie professionnelle qui se redessine.
Dans ce contexte, la retraite progressive apparaît comme le compromis que les pouvoirs publics cherchent à imposer : un départ en douceur, calibré et socialement acceptable. Le dispositif séduit, mais reste marginal au regard du nombre de retraités potentiellement concernés. Sa montée en puissance dépendra de la souplesse des entreprises, de l’adaptation des statuts publics et de la simplification administrative.
À terme, le véritable enjeu ne sera pas tant de savoir comment encadrer le cumul ou la retraite progressive, mais comment repenser le lien entre activité, utilité sociale et transmission. Une société vieillissante ne peut se priver de l’expérience de ses aînés ; encore faut-il qu’elle sache leur offrir des formes d’engagement et de travail compatibles avec leurs aspirations et leurs capacités. La réforme des retraites ne se joue donc pas seulement sur les âges. Elle se joue également sur la manière dont chacun peut continuer à participer, autrement, à la vie économique et sociale.
Début 2025, les 65 ans et plus représentent près de 22 % de la population française. Parmi eux, près de la moitié ont 75 ans ou plus (10,7 %). D’après les projections de l’INSEE publiées en 2021, à l’horizon 2070, le nombre de personnes âgées de 75 ans ou plus devrait croître de 5,7 millions, tandis que celui des moins de 60 ans diminuerait de près de 5 millions.
Dans ce contexte de vieillissement accéléré de la population, la prise en charge de la dépendance sera un enjeu majeur dans les prochaines années. L’étude publiée en octobre par Julie Dufeutrelle et Olivier Pucher (INSEE) et Alexis Louvel (Drees) souligne que la France comptera près de 3 millions de personnes âgées dépendantes à l’horizon 2050 dans son scénario intermédiaire, soit 700 000 de plus qu’en début 2021.
Avec l’allongement de la durée de la vie et l’arrivée à des âges élevés de générations nombreuses du baby-boom, le nombre de seniors dépendants devrait croître d’environ 1 % par an entre 2021 et le début des années 2050, soit une progression de 36 %. Le pic serait atteint en 2052, mais le nombre de seniors en perte d’autonomie resterait élevé jusqu’en 2070 (près de 2,7 millions, soit 11,3 % des seniors).
Pour les situations de perte d’autonomie sévère (personnes incapables de se déplacer, confinées au lit ou au fauteuil, altération lourde des fonctions mentales nécessitant une surveillance) permanente – le nombre de personnes concernées sera plus rapide. La Drees évalue, pour cette catégorie, 300 000 personnes de plus. La hausse serait de 45 % dans les 25 prochaines années. En 2055, alors que le nombre de personnes en situation de dépendance aura commencé sa lente diminution, celui des personnes très dépendantes serait à son plus haut, avoisinant les 970 000.
Les femmes représentent une part croissante de la population à mesure que l’âge avance : 53 % à 65 ans, 61 % à 85 ans, et 76 % à 95 ans. Or, la perte d’autonomie touche 41,8 % des 85 ans et plus, contre 13,5 % des 75 –84 ans et 4,4 % des 60–74 ans. Cette surreprésentation se retrouve aussi parmi les personnes en dépendance sévère : 18,2 % des 85 ans et plus, contre 4,2 % des 75 –84 ans et 0,7 % des 60 –74 ans.
Les femmes sont et resteront majoritaires parmi les personnes en perte d’autonomie. En 2021, près de deux tiers des personnes dépendantes et 71 % des seniors en perte d’autonomie sévère sont des femmes. Cette surreprésentation devrait s’accentuer avec le temps. Dans les projections établies par l’INSEE, la part de femme en perte d’autonomie devrait s’accroître de 38 % quand pour une hausse de 33 % chez les hommes en 2050. Ainsi, la part de femmes en situation de dépendance est attendue en hausse de 1 % sur la période considérée.
Cette prévalence des femmes face au risque d’entrer en situation de dépendance est également d’ordre social et économique. Les femmes âgées disposent souvent de revenus plus faibles, en raison de carrières plus hachées, de pensions plus modestes et d’une moindre capacité d’épargne. Elles vivent plus fréquemment seules en fin de vie : veuves, sans conjoint ni aidant principal, elles recourent davantage à l’aide formelle et aux établissements spécialisés.
Les Français semblent lucides face au risque d’être un jour confrontés à titre personnel à la perte d’autonomie liée à l’âge. Pourtant, si le sujet est loin d’être pris à la légère, il est insuffisamment préparé.
L’enquête 2024 AG2R LA MONDIALE -AMPHITÉA – CERCLE DE L’ÉPARGNE mettait ainsi en évidence que 57 % se sentaient concernés par la question de la dépendance. Parmi eux, 34 % craignent d’être personnellement en situation de perte d’autonomie, 15 % indiquent être directement confrontés à la dépendance à travers la situation de proches, 8 % sont aidants et 6 % indiquent être déjà entravés dans les gestes de la vie courante et dépendants de l’aide fournie par des tiers. Sans surprise, la crainte d’entrer en dépendance est plus forte chez les plus de 65 ans et chez les femmes. Ces dernières sont plus nombreuses à craindre les risques liés à l’avancée en âge pour elles-mêmes mais aussi pour leurs proches (confrontées directement en qualité d’aidante ou indirectement en ayant dans leur famille proche des personnes en situation de dépendance).
Pour accompagner les personnes en perte d’autonomie, les Français s’en remettent à l’État. Près d’un sondé sur deux (48 %) estime qu’e financement de la dépendance relève de la Sécurité sociale. Les Français ne sont pas favorables à la mobilisation des sources personnelles des personnes dépendantes, à travers notamment la revente de leur bien immobilier ou le recours à leur épargne financière. Seuls 26 % des sondés l’envisagent. La souscription d’une assurance dépendance n’est évoquée 14 % quand 13 % comptent sur l’appui de leur famille pour financer, le cas échéant, les frais générés par la dépendance.
Aujourd’hui, les besoins financiers pour accompagner dignement la dépendance s’élèvent à environ 30 milliards d’euros, dont 24 milliards de financement public et 7,2 milliards à la charge des ménages, sans compter l’apport essentiel des 11 millions d’aidants familiaux. Avec les mutations démographiques en marche, (accroissement du nombre de personnes dépendantes mais aussi vieillissement des aidants familiaux), le coût total de la dépendance devrait doubler d’ici 2060. Son poids dans le PIB atteindrait alors près de 2,78 % du PIB.
Le vieillissement démographique impose désormais sa loi aux comptes publics. Avec l’entrée en retraite des générations pléthoriques du baby-boom, les dépenses sociales s’envolent mécaniquement. La question n’est plus tant de les contenir que de savoir comment les financer sans fracturer davantage la cohésion nationale. Ce défi n’épargne aucun pays européen : il concerne autant la France que l’Allemagne, l’Italie ou l’Espagne.
« L’État-providence tel qu’il existe aujourd’hui n’est plus finançable », a lancé cet été le chancelier allemand Friedrich Merz. Cette déclaration, à la fois lucide et provocatrice, résume l’impuissance croissante des gouvernements face à la montée inexorable des dépenses sociales, dans un contexte où la croissance économique s’essouffle et où les marges budgétaires s’évanouissent.
Depuis le tournant des années 2000, le poids des prestations sociales dans la richesse nationale s’est alourdi dans l’ensemble des grands pays européens. En France, il dépasse désormais 33 % du PIB, contre 29 % en Allemagne, 28 % en Italie et 26 % en Espagne. Cette dérive est la conséquence directe du vieillissement de la population : en France, le nombre de retraités a été multiplié par plus de trois en quarante ans, passant de 5 millions en 1980 à près de 17 millions en 2024.
Parallèlement, la progression des pathologies chroniques alimente une hausse continue des dépenses de santé. L’entrée des premières générations du baby-boom dans le grand âge — celles qui franchissent désormais le seuil des 80 ans — risque d’amplifier encore ce mouvement. À horizon de dix à quinze ans, la question ne sera plus de savoir si la dépense sociale doit croître, mais jusqu’où elle pourra encore être soutenable.

Le renouvellement des générations n’est plus assuré depuis longtemps en Europe. Le taux de fécondité moyen de l’Union européenne s’établit à 1,4 enfant par femme, loin du seuil de 2,1 nécessaire pour maintenir la population sans apport migratoire. La France, longtemps considérée comme une exception démographique, entre dans le rang depuis quelques années. Le taux de fécondité y est passé de 1,9 à 1,6 enfant par femme entre 2017 et 2024, soit son plus bas niveau depuis quarante ans. L’Allemagne se situe à 1,35, l’Italie à 1,18 et l’Espagne à 1,12 (2023).
Dès lors, la croissance de la population repose de plus en plus sur l’immigration. Si celle-ci venait à être restreinte, la population déclinerait dans la majorité des pays européens. C’est déjà le cas en Bulgarie, en Lituanie, en Lettonie, en Roumanie ou encore en Grèce, où le recul démographique s’accompagne d’un vieillissement accéléré et d’une désertification de certaines régions.
La part des plus de 65 ans est en hausse continue et pourrait avoisiner 30 % de la population de l’Union européenne à l’horizon 2050. L’Europe comptera alors 75 millions d’octogénaires, contre 33 millions aujourd’hui. En France, la proportion des plus de 65 ans passera de 22 % en 2025 à 30 % en 2050. Partout, le rapport entre actifs et retraités se dégrade : dans les années 1960, on comptait quatre cotisants pour un retraité ; en 2025, ils ne sont plus que 1,7, et ce ratio pourrait tomber à 1,4 d’ici 2070. En un demi-siècle, le nombre de cotisants par retraité aura donc été divisé par deux.
Ce déséquilibre démographique se traduit mécaniquement par une hausse des dépenses publiques, notamment de santé et de retraites. Les dépenses de santé représentent déjà 14 % du PIB en France, contre 11 % en Allemagne, et pourraient atteindre 16,5 % du PIB en 2040 si aucune réforme structurelle n’est entreprise. La Cour des comptes anticipe, pour le seul système de retraites, un déficit de 15 milliards d’euros en 2035 et de 30 milliards en 2045 — sans même inclure les régimes de la fonction publique.
Le vieillissement n’épargne aucune branche de la protection sociale. Le déficit de l’assurance maladie s’élève à 16 milliards d’euros en 2025 et devrait se creuser de trois milliards supplémentaires d’ici 2029, selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale.
Une personne de 80 ans coûte en moyenne cinq fois plus en dépenses de santé qu’un adulte d’âge actif. Or, la population des plus de 75 ans augmentera de près de 30 % d’ici 2040. L’effet sur les comptes sociaux sera donc inéluctable : il n’est plus question de savoir si les dépenses progresseront, mais à quel rythme, et avec quelles ressources pour les soutenir.

Pour compenser les effets du vieillissement démographique, les États disposent de deux leviers : le taux d’emploi et la productivité. Sur le premier point, la France conserve, du moins sur le papier, d’importantes marges de progression. Le taux d’emploi des 15-24 ans y demeure l’un des plus faibles d’Europe — autour de 35 % en 2024, contre 52 % en Allemagne. Les difficultés d’insertion professionnelle, en particulier chez les jeunes hommes peu qualifiés, restent un point noir structurel. La situation n’est guère meilleure chez les 55-64 ans : seuls 56 % d’entre eux travaillent, contre 72 % outre-Rhin. Globalement, le taux d’emploi français (67 %) demeure près de dix points inférieur à celui de l’Allemagne (77 %), soit l’équivalent de quelque trois millions d’actifs potentiels. Si la France atteignait le niveau allemand, le déficit de ses retraites serait, toutes choses égales par ailleurs, quasi effacé.
Ce redressement supposerait toutefois une réforme en profondeur du système éducatif et une politique d’emploi ambitieuse en faveur des jeunes et des seniors. Il ne suffirait pas d’ajuster les paramètres de retraite, mais de transformer la structure même du marché du travail.
Certains économistes plaident, à l’inverse, pour une privatisation partielle de la protection sociale. Mais les expériences étrangères invitent à la prudence. Aux États-Unis, où 75 % des dépenses de santé relèvent du secteur privé, la facture s’élève à 17 % du PIB, contre 11 % en France et 10 % en Allemagne (2023). Ce surcoût de quatre points n’offre pas de meilleurs résultats : l’espérance de vie y plafonne à 77 ans, contre 82 ans en France. La logique du marché ne garantit ni la maîtrise des coûts ni l’efficacité sanitaire.
Dès lors, comment équilibrer des comptes sociaux soumis à une pression croissante ? La tentation première des gouvernements sera d’accroître les prélèvements obligatoires. Une hausse d’un à un et demi point de PIB des cotisations sociales dégagerait une trentaine de milliards d’euros. Solution commode, mais périlleuse : elle renchérirait le coût du travail et pèserait sur la demande, transférant la charge du financement sur les actifs, au risque d’étouffer la croissance.
L’autre voie, plus vertueuse, consiste à relever le taux d’emploi. Un report de deux à trois ans de l’âge effectif de départ à la retraite permettrait d’augmenter de dix points le taux d’activité des plus de 60 ans et d’engranger près de 20 milliards d’euros de recettes supplémentaires par an. Mais la société française reste rétive à ce type de mesure. La suspension de la réforme de 2023 l’a montré : la question des retraites demeure hautement inflammable.
L’amélioration de la productivité pourrait également amortir le choc démographique. Or, depuis une décennie, les gains de productivité se sont pratiquement évanouis. Le retard d’investissement dans les technologies de pointe, les carences de formation, la spécialisation croissante dans les services domestiques et à faible valeur ajoutée expliquent en partie cette stagnation. Sans rebond de la productivité, la croissance restera insuffisante pour absorber le coût du vieillissement.
À défaut d’agir sur ces leviers, les pouvoirs publics pourraient recourir à une autre stratégie : l’érosion silencieuse des dépenses sociales. Celles-ci consistent à désindexer les prestations de l’inflation, comme cela a déjà été pratiqué. Depuis 2017, le niveau de vie relatif des retraités français diminue. Le Conseil d’orientation des retraites prévoit qu’il ne représentera plus que 87 % de celui de la population en 2070, contre 102 % en 2023.
Depuis 1945, la France a bâti un État-providence à la fois généreux et universel. Mais l’universel a un coût, surtout lorsque la croissance s’essouffle. Les dépenses publiques atteignent aujourd’hui 58 % du PIB, dont près des deux tiers relèvent de la protection sociale. Ce modèle a permis de réduire fortement la pauvreté et les inégalités, notamment parmi les retraités. Pourtant, entre 2025 et 2050, le ratio cotisants-retraités chutera encore de 15 %. Sans réforme, la dette sociale pourrait dépasser 50 % du PIB.
L’État-providence ne survivra que s’il parvient à se réinventer — non pas en se reniant, mais en retrouvant les conditions de sa soutenabilité : davantage d’activité, plus d’innovation, et une solidarité repensée à la mesure des défis du siècle.
Le cumul emploi-retraite existe depuis la création du système de retraite en 1945. Dès l’origine, les pouvoirs publics ont prévu, sous certaines conditions, la possibilité pour un retraité de reprendre une activité rémunérée tout en ayant liquidé sa pension.
En raison de la diminution du taux de remplacement ou par plaisir personnel, de nombreux retraités continuent de travailler après avoir liquidé leurs droits. Le cumul emploi-retraite est plébiscité par de nombreux retraités, en particulier par les jeunes retraités, qui y voient à la fois un complément de revenus et un moyen de conserver des liens sociaux.
La législation relative au cumul emploi-retraite a pour principale caractéristique son instabilité. Les dispositions visant à l’encourager sont, en règle générale, rapidement remises en cause, le législateur changeant régulièrement d’avis sur l’opportunité de développer ou non ce dispositif. Si la réforme de 2023 a permis aux cumulants de se constituer à nouveau de nouveaux droits à la retraite, le PLFSS 2026 prévoit un durcissement du régime avec l’instauration de plafonds de ressources dissuasifs. Les pouvoirs publics entendent désormais privilégier la retraite progressive au détriment du cumul emploi-retraite. Ils espèrent, par ailleurs, qu’un certain nombre de personnes — notamment les cadres et les indépendants — qui utilisaient ce dispositif afin de maximiser leurs revenus retarderont la liquidation de leurs droits à pension.
En 2023, selon l’enquête Emploi en continu de l’INSEE, 606 000 personnes résidant en France déclaraient cumuler une pension de retraite et un revenu d’activité en moyenne sur l’année, dont 43 % de femmes. En 2014, la France en comptait 416 000.

Les premières règles : la rupture du lien professionnel (1982)
La réglementation a, depuis 1982, fortement évolué, sur fond de préoccupations liées à la situation du marché du travail. L’ordonnance du 30 mars 1982 soulignait que le départ à la retraite signifiait la rupture définitive de tout lien professionnel avec l’employeur ou la cessation définitive de l’activité non salariée. Elle prévoyait néanmoins la possibilité de reprendre une activité professionnelle indépendante de la première, salariée ou non. Elle prévoyait, par ailleurs, quelques exceptions à la reprise d’une activité en lien avec celle interrompue pour cause de départ à la retraite.
La loi de 2003 : premières libéralisations du cumul emploi-retraite
La loi du 21 août 2003 a introduit des limites quant à l’activité reprise et fixé une condition de ressources applicable à l’ensemble des régimes.
En 2003, les retraités ayant atteint l’âge légal (60 ans) et obtenu le taux plein (soit par la durée d’assurance, soit automatiquement à 65 ans) pouvaient bénéficier d’un cumul « assoupli », mais non totalement libre. Ils étaient dispensés de suspension de pension en cas de reprise d’activité chez un nouvel employeur ou dans un autre régime (par exemple, un ancien salarié devenant consultant indépendant ou artisan). En revanche, s’ils reprenaient une activité dans le même régime ou chez le même employeur, le cumul demeurait plafonné et soumis à une période d’interruption de six mois.
Les avancées de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009 a amplement libéralisé le cumul emploi-retraite sous certaines conditions. Si ces conditions ne sont pas remplies, c’est l’ancien régime qui s’applique.
Depuis le 1er janvier 2009 coexistent ainsi deux dispositifs :
Le cumul intégral
Dans le cadre du cumul intégral, aucun délai ni condition de ressources ne s’appliquent. Le retraité peut reprendre son ancienne activité une fois ses pensions liquidées, à condition d’avoir cessé préalablement toute activité professionnelle. Cette obligation ne concerne pas les anciens militaires.
Le cumul sous conditions
Pour les retraités n’ayant pas obtenu le taux plein ou n’ayant pas atteint l’âge du taux plein, le cumul est encadré par deux limites :
Cette limite ne s’applique qu’à partir d’1,6 fois le Smic mensuel brut (soit 2 312 euros) de revenus au titre du cumul emploi-retraite. En cas de dépassement, la pension est suspendue.
Dès que le retraité atteint l’âge du taux plein, il bascule dans le régime du cumul intégral.
La fin de la constitution de nouveaux droits (réforme Touraine, 2015)
Jusqu’au 1er janvier 2015, il était possible de se constituer de nouveaux droits à condition que le nouvel emploi soit affilié à une caisse à laquelle aucune demande de liquidation n’avait été faite. À compter de cette date, le cumul emploi-retraite, quelle qu’en soit la forme, n’ouvre plus de droits supplémentaires.
La loi du 20 janvier 2014 (dite “réforme Touraine”) harmonise le dispositif : tout retraité reprenant une activité doit désormais avoir liquidé tous ses droits auprès de toutes les caisses concernées. Cette liquidation ne s’applique pas aux produits d’épargne retraite (PERP, contrats Madelin, etc.).
Depuis le 1er avril 2017, si les conditions du cumul intégral ne sont pas remplies, la pension peut être réduite à due concurrence des revenus d’activité, alors qu’elle était auparavant suspendue.
La réforme de 2023 : retour de la constitution de droits
La réforme des retraites de 2023 réintroduit la possibilité d’acquérir de nouveaux droits à la retraite dans le cadre d’un cumul intégral.
Quel que soit le régime, il est possible de cumuler intégralement une pension avec une activité relevant d’un autre régime. En revanche, le cumul au sein d’un même régime reste encadré. Il n’est autorisé que dans les cas suivants :
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026
Le PLFSS 2026 reprend plusieurs recommandations de la Cour des comptes, visant à encadrer davantage le cumul emploi-retraite afin de réaliser des économies et encourager le recours à la retraite progressive.
S’il est adopté en l’état, les modalités du cumul emploi-retraite seront les suivants :
L’entrée en vigueur est prévue au 1er janvier 2027 pour les personnes liquidant leurs droits à compter de cette date.
Les Français, d’enquête en enquête, répètent leur forte inquiétude sur l’évolution du système de retraite. Ainsi, selon le sondage AG2R LA MONDIALE – AMPHITÉA – CERCLE DE L’ÉPARGNE du printemps 2025, 72 % des actifs estiment que leurs pensions ne leur suffiront pas pour vivre correctement à la retraite. Une enquête réalisée par Toluna Harris entre le 9 et le 15 septembre confirme ce résultat. Elle indique que 71 % des 1 124 Français interrogés considèrent que le fonctionnement du système de retraite par répartition se sera détérioré dans dix ans. Une grande majorité s’attend même à ce qu’il ait disparu en 2050.
Qu’il s’agisse des politiques publiques en matière de soins, de système éducatif, de sécurité ou encore d’inégalités de patrimoine, plus de six Français sur dix anticipent une dégradation d’ici à 2035. Pour la dette et du déficit public, deux tiers des sondés s’attendent à une nouvelle dérive des comptes publics. Concernant les questions climatiques et environnementales, ils ne sont guère plus optimistes et 67 % d’entre eux n’attendent pas d’amélioration.
Malgré tout, les sondés pensent que dans les prochaines années, la France restera à long terme une « démocratie ancrée dans l’Union européenne ». Pour trois quarts des sondés, l’Union européenne existera toujours dans vingt-cinq ans. Ils sont, en revanche, plus pessimistes sur la place de leur pays. Ils sont 61 % à anticiper un recul du poids de la France au sein de l’Europe. Une majorité de sondés considèrent qu’une le vieux continent risque de devenir le théâtre d’une guerre d’ici le milieu du siècle.
Face à toutes ces inquiétudes, seuls 20 % des sondés jugent qu’ils seront plus heureux en 2035 qu’aujourd’hui. Néanmoins, 56 % des 18/24 ans pensent qu’ils seront plus heureux. Sur des sujets comme l’innovation, les réseaux sociaux, les progrès de la médecine ou l’intelligence artificielle, la jeunesse entrevoit des avancées. Si un Français sur deux estime que l’on travaillera davantage dans dix ans, un tiers des 18-24 ans pense au contraire qu’il aura davantage de temps libre.
L’immobilier est un territoire propice à l’intelligence artificielle (IA) en raison du grand nombre de données que la pierre peut générer. L’IA s’invite dans le travail des agents immobiliers et des notaires, tout en révolutionnant la construction.
La vente ou l’achat d’un appartement, c’est avant tout la rencontre entre une offre et une demande, chacune conditionnée par des attentes spécifiques. L’acheteur recherche un logement correspondant à ses besoins et à un budget prédéfini, tandis que le vendeur estime souvent que son bien est unique et souhaite en tirer le meilleur prix.
L’estimation d’un bien a longtemps relevé du jugement humain, mélange d’expérience, d’intuition et de sens du marché. L’agent, tel un orfèvre, évaluait la lumière, le cachet, la réputation d’une rue ou la proximité d’une école réputée.
Pour déterminer le prix des 38,2 millions de logements que comptait la France au 1er janvier 2024, l’intelligence artificielle peut être d’un grand secours. Des plateformes comme Zillow, aux États-Unis, ou MeilleursAgents, en France, exploitent des bases de données massives : prix au mètre carré, transactions notariales, données cadastrales, orientation du logement, niveaux de bruit, pollution, criminalité, offre scolaire, jusqu’à la qualité de la connexion Internet. Zillow, par exemple, a mis au point le Zestimate, un modèle d’apprentissage profond analysant plus de 300 millions de points de données. Il ajuste automatiquement les prix des logements américains en fonction de l’évolution des marchés locaux. En France, la base DVF (Demande de valeurs foncières), mise en ligne par l’État, alimente désormais les algorithmes d’estimation. Les écarts entre l’estimation automatique et la vente réelle se réduisent : dans les grandes villes, l’écart moyen est inférieur à 3 %.
Grâce aux logiciels, les agents immobiliers peuvent désormais classer les appartements répondant le mieux aux attentes de leurs clients. Ils gagnent un temps précieux en limitant, par exemple, le nombre de visites. L’IA permet également de générer des visuels attractifs en plaçant virtuellement des meubles et des objets dans les biens à vendre. La recherche d’un logement s’est transformée en expérience numérique assistée par IA. Les plateformes — de SeLoger à Bien’ici, en passant par les nouveaux entrants comme Casavo — analysent le comportement des utilisateurs : temps passé sur chaque annonce, type de photo cliquée, mots-clés saisis. L’IA apprend, anticipe et propose avant même la demande.
Des agents virtuels, tels que ChatCasa aux États-Unis ou HosmanBot en France, dialoguent 24 heures/24 avec les utilisateurs, répondent aux questions, planifient des visites, suggèrent des quartiers alternatifs et filtrent les fraudes. L’IA accentue ainsi la concentration du marché entre les mains de quelques grandes plateformes capables d’agréger et de traiter un volume considérable de données.
Elle assiste également les agents immobiliers dans la rédaction des documents — promesses de vente, compromis ou offres d’achat — en vérifiant automatiquement les clauses et les obligations légales.
L’achat ou la vente d’un bien immobilier suppose, en France, le passage devant un notaire, garant de la validité juridique et financière de l’opération. L’intelligence artificielle pourrait profondément transformer ce métier.
Le notariat français est déjà largement numérisé — acte authentique électronique, signature à distance, visio-comparution, bases de données interconnectées (Perval, BIEN, Fichier immobilier, etc.).
L’IA permettra d’automatiser la rédaction des actes (donations, ventes, successions, PACS, etc.) en s’appuyant sur les modèles réglementaires et les données du dossier. Les algorithmes pourront vérifier la cohérence des clauses, la validité des pièces, le respect des délais légaux et la présence des mentions obligatoires, réduisant considérablement le risque d’erreur.
À terme, les systèmes de blockchain ou de registres distribués offriront une certification directe et infalsifiable des actes, sans passer par de multiples vérifications croisées. Le notaire deviendra moins un rédacteur qu’un superviseur de la conformité juridique.
L’IA ne se limitera pas à la technique : elle transformera aussi la dimension patrimoniale du métier. Le notaire pourra jouer un rôle plus actif dans les stratégies d’optimisation du patrimoine des ménages, entrant ainsi en concurrence avec les conseillers en gestion de patrimoine.
L’IA s’invite désormais dans les immeubles, des plans à la construction, jusqu’à l’entretien.
Les logiciels de « generative design » (comme Autodesk Generative Design ou Spacemaker AI, racheté par Autodesk) utilisent des algorithmes capables de proposer des milliers de variantes d’un même projet, selon des critères précis : ensoleillement, orientation, circulation de l’air, consommation énergétique, contraintes réglementaires, coûts, etc.
À Toronto, Sidewalk Labs (filiale d’Alphabet) a utilisé ce type d’IA pour concevoir des quartiers entiers optimisant lumière naturelle, densité et mobilité douce. Grâce à des IA de simulation thermique ou lumineuse, les performances énergétiques et environnementales peuvent être évaluées dès la phase d’esquisse.
L’IA ne se limite plus à l’optimisation : certains architectes expérimentent des IA génératives (type DALL·E, Midjourney ou Stable Diffusion) pour imaginer des formes inédites, des textures ou des atmosphères. Au stade de la construction, les algorithmes prédictifs permettent d’optimiser la chaîne d’approvisionnement et les plannings de chantier :
Des plateformes comme Buildots ou Disperse utilisent la vision par ordinateur pour comparer l’état réel du chantier (capté par caméras 360°) au planning BIM (Building Information Modeling).
Des drones couplés à des IA surveillent les chantiers en temps réel pour détecter les anomalies ou les risques de sécurité (absence de garde-corps, zones de chute, etc.). La reconnaissance d’images permet également d’identifier les défauts de construction ou les écarts de tolérance.
Les robots bâtisseurs comme Hadrian X (Australie) posent des briques avec une précision millimétrique, tandis que l’impression 3D béton, couplée à l’IA (ICON, Apis Cor), permet déjà de construire des maisons en quelques jours, avec moins de déchets et un coût réduit de 30 à 50 %.
Une fois le bâtiment livré, des systèmes d’IA analysent en continu les données issues de capteurs (température, humidité, consommation, vibrations) pour prévoir les pannes avant qu’elles ne surviennent. La smart maintenance, déjà utilisée dans les bâtiments tertiaires, se généralise progressivement dans le logement collectif. Dans les résidences haut de gamme, des applications domotiques — telles que Home OS ou SmartHab — permettent de piloter lumières, volets et sécurité à distance. L’IA régule le chauffage, la ventilation et la climatisation selon l’occupation réelle et le comportement des habitants. Des solutions comme DeepMind Energy (Google) ont démontré qu’il était possible de réduire de 15 à 30 % la consommation énergétique des bâtiments.
Le secteur immobilier mobilise des capitaux considérables, en raison des coûts du foncier et de la construction. Les opérations reposent sur la coordination de nombreux acteurs. L’IA peut assister aussi bien les promoteurs et établissements financiers que les particuliers.
Les algorithmes de « scoring », utilisés par des fintechs comme Masteos, Pretto ou Younited, évaluent désormais le risque d’un emprunteur non plus seulement à partir de son revenu, mais de son comportement digital : stabilité de l’emploi, historique de paiement, géolocalisation des dépenses, voire habitudes de navigation.
L’IA est également mobilisée pour modéliser des scénarios d’investissement. Des plateformes comme Bricks.co ou RealT simulent l’impact d’une hausse des taux, d’un changement de fiscalité ou d’une vacance locative prolongée. Les investisseurs peuvent tester différentes stratégies, mesurer la sensibilité de leur portefeuille et arbitrer avec une rigueur quasi scientifique.
Le crowdfunding immobilier, qui a levé plus de 2 milliards d’euros en France en 2024, s’appuie déjà sur l’IA pour sélectionner les projets solides et repérer les fraudes. Les modèles évaluent la cohérence entre le plan de financement, le profil du promoteur et la dynamique locale du marché. L’immobilier, secteur traditionnel de l’économie, entre ainsi de plain-pied dans l’ère digitale. L’IA peut générer des gains de productivité considérables dans un domaine qui en a longtemps manqué. Face à la crise du logement et à la rareté du foncier, le recours à l’innovation devient une nécessité pour contenir la hausse des prix et préserver l’accès à la propriété
L’once d’or a dépassé les 4 000 dollars au mois d’octobre 2025. La hausse, depuis le 1er janvier, dépasse 50 %. Entre 2015 et 2025, le cours de l’or a été multiplié par trois.
La « vieille relique » joue son rôle de valeur refuge. La succession des crises – épidémie de Covid, guerre en Ukraine, guerre au Moyen-Orient – la vague inflationniste, les tensions géopolitiques, le retour de Donald Trump au pouvoir contribuent à la hausse du métal précieux. Cette dernière fait craindre la création d’une bulle de l’or qui est de plus en plus spéculative. Il faut rappeler que l’or ne génère ni intérêts, ni dividendes.

Le cours de l’or dépend de la production d’or, de la demande émanant des banques centrales et des investisseurs privés, ainsi que des besoins de l’industrie et de la bijouterie/orfèvrerie.
L’or, par sa rareté, sa densité, son éclat et sa pérennité, a occupé une place à part dans les échanges. Il y a plus de 6 000 ans, les Égyptiens exploitaient déjà l’or du Nil. Les premières mines ont été ouvertes il y a plus de 5 000 ans. L’utilisation de l’or comme monnaie intervient six siècles avant notre ère, entre 561 et 546 av. J.-C. (dates de début et de fin de règne du roi Crésus sur la Lydie, pays d’Asie Mineure). Il tenait ses richesses du Pactole, la rivière qui cachait une multitude de paillettes d’or.
Depuis cette époque, l’or est un symbole de richesse et de puissance. Le métal précieux est également une source de fantasmes. Par sa rareté, l’or permettait une régulation assez facile par les autorités. Sa résistance et sa densité sont deux caractéristiques clés qui lui ont permis de jouer le rôle d’étalon et de réserve.
Tout l’or sorti de terre ou de l’eau est estimé à environ 200 000 tonnes qui se répartissent entre :
Selon les estimations du World Gold Council, les réserves mondiales d’or encore à exploiter s’élevaient à environ 54 000 tonnes à la fin de l’année 2024. Les réserves d’or restantes sont inférieures à 30 % de la quantité déjà extraite.
L’or s’est imposé comme étalon des monnaies jusqu’en 1976. Il a permis durant plusieurs siècles de comparer les monnaies à travers des systèmes de change fixe. Jusqu’aux Accords de Bretton Woods (15 août 1971), les États pouvaient convertir en or leurs réserves libellées en dollar sachant que les autres monnaies étaient définies par rapport au dollar.
La fin de cette convertibilité dollar/or a été décidée par le Président Richard Nixon en dévaluant le dollar pour faire face au déséquilibre commercial américain. Les Accords de la Jamaïque des 7 et 8 janvier 1976 ont, par ailleurs, supprimé officiellement le rôle de l’or comme étalon. Depuis, il demeure, malgré tout, un des éléments de réserve des grandes banques centrales. Il est un marqueur de puissance. À ce titre, les États émergents ont, ces dernières années, acquis de l’or afin de se mettre au niveau de leur nouveau statut économique et financier.
Le cours évolue en fonction de l’offre et de la demande. L’offre dépend des volumes extraits et de la demande globale. En 2024, la production mondiale d’or s’est élevée à environ 3 600 tonnes (World Gold Council).
Les principaux pays producteurs d’or en 2023 étaient :
La demande dépend des politiques des banques centrales d’achat ou vente d’or, des besoins de l’industrie, ainsi que ceux de l’orfèvrerie et des épargnants.
Les banques centrales des pays émergents achètent des quantités importantes d’or ces dernières années afin de réduire leur exposition au dollar et par souci de crédibilité.

En 2025, selon le Conseil mondial de l’or (CMO), la demande mondiale a atteint un nouveau record au troisième trimestre, à 1 313 tonnes, soit le volume le plus élevé observé depuis l’an 2000, date du début de l’enregistrement des données par le CMO.
En valeur, la demande a augmenté de 44 %, pour atteindre un record de 146 milliards de dollars sur le trimestre. Depuis le début de l’année, la demande cumulée s’établit à 3 717 tonnes, pour une valeur de 384 milliards de dollars, soit 1 % de plus qu’en 2024.
Les banques centrales demeurent, en 2025, des acteurs majeurs du marché. Leurs achats ont atteint 220 tonnes d’or au troisième trimestre, soit une hausse de 28 % par rapport au trimestre précédent. La Banque nationale du Kazakhstan a été le principal acheteur, tandis que la banque centrale du Brésil a acquis de l’or pour la première fois depuis plus de quatre ans. Sur l’année, la demande des banques centrales recule toutefois légèrement : 634 tonnes sur les trois premiers trimestres de 2025, contre 724 tonnes sur la même période en 2024.
L’or est une valeur refuge, mais en tant que matière première, il ne rapporte rien : il ne sert aucun intérêt, ni aucun dividende. Malgré tout, il conserve une aura et son attrait est double : il peut être un moyen de paiement ultime et générer aussi une plus-value potentielle (sous réserve de l’acheter et de le vendre au bon moment).
Les placements en or peuvent prendre la forme d(e) :
Le lingot d’or est constitué d’or sous la forme d’une plaque, d’une plaquette ou d’un lingot d’un poids supérieur à un gramme et dont la pureté est supérieure ou égale à 995 millièmes.
Le prix de l’or possédé n’est pas égal à son poids, car il faut en effet prendre en compte des facteurs liés au support. Ainsi, le prix incorpore ce qui est appelé la prime de l’or.
La prime de l’or = (la valeur de la pièce – sa valeur en or) / valeur en or
Plus les pièces sont petites et difficiles à produire et plus leur prime risque d’être élevée. Elle est également fonction de la qualité de l’épreuve. Une pièce de mauvaise qualité, mal conservée subira une perte de valeur.
La prime dépend, enfin, de l’offre et de la demande. Elle diffère en fonction du lieu où s’effectue la vente. Les pièces françaises sont moins recherchées à New York, ce qui entraîne une baisse du prix.
Le particulier a la possibilité d’acheter physiquement de l’or auprès de comptoirs spécialisés, de banques, la monnaie de Paris quand cette dernière procède à des émissions ou auprès de sites Internet.
Monnaie de Paris émet bien des pièces en or, de façon régulière et encadrée. Ces émissions relèvent à la fois de séries de collection, de pièces à valeur faciale et, plus rarement, de pièces destinées à l’investissement.
Les pièces de la Monnaie de Paris quand elles sont revendues, peuvent bénéficier du régime des métaux précieux (11 % de taxe forfaitaire sur le prix de vente) ou du régime de la plus-value réelle (si justificatif d’achat nominatif). Elles sont reconnues comme pièces de collection, non comme pièces d’investissement pures au sens du Code général des impôts.
L’or peut être acheté en ligne sur des sites dédiés (faire attention au sérieux du site). Des sites peuvent également proposer de stocker l’or en lieu et place du propriétaire en contrepartie de frais (attention à l’honorabilité du site).
Il est possible d’acheter en Bourse via un établissement financier – en ligne, mais pas seulement – des parts de fonds qui investissent dans l’or ou qui répliquent le cours de l’once d’or (fonds indiciel). L’acheteur n’a pas à gérer le stockage de son or. Il est possible d’acheter également des actions des mines aurifères.
Un ETC (Exchange Traded Commodities) or est un produit financier coté en bourse visant à donner à l’investisseur une exposition au prix de l’or sans qu’il n’ait à acquérir, garder, assurer physiquement des barres ou des pièces d’or.
L’ETC achète (ou est supposé acheter) soit de l’or physique (barres d’or de haute pureté), soit parfois des contrats à terme sur l’or, ou un mix.
Chaque part/action de l’ETC reflète une fraction de l’exposition à l’or (par exemple 1 g ou 1/10 d’once d’or selon le produit).
L’ETC se négocie en continu en bourse, comme une action, ce qui permet d’acheter/vendre facilement via un compte broker.
L’idée est d’obtenir une variation de valeur proche de celle du cours spot de l’or (moins les frais, moins les écarts de suivi).
Un nombre croissant d’épargnants privilégient l’achat de titres représentatifs des cours à la possession directe. Pour les titres cotés, ce type de placement prend le nom d’« ETF » (Exchange Traded-fund). Ce sont des fonds indiciels attachés à un actif coté en Bourse qui a pour but de répliquer un indice de référence. L’or n’étant pas un actif coté, le suivi de son cours passe par un ETC.
Le principal avantage du tracker or réside dans sa gestion passive et donc peu coûteuse, entre 0,1 % et 0,9 %. Les frais de gestion n’impactent donc que peu le rendement de l’investissement. En théorie, dans le cadre d’un tracker or, la société de gestion investit sur une dette soutenue par le prix de l’or. Elle n’achète pas directement des lingots. Nombreux d’ailleurs sont les fonds qui ne disposent pas de stocks d’or suffisants pour faire face à des retraits massifs de la part des épargnants.
La loi Hamon de 2014 a renforcé la législation sur les ventes d’or (bijoux, pièces, objets…) afin de mieux protéger les vendeurs qui cèdent leurs biens contre de l’argent. Afin de mieux informer le vendeur, un contrat de prévente est désormais obligatoire. Il doit comporter un certain nombre d’informations telles que le poids et le titrage des bijoux ou des objets, le cours officiel et le prix de vente détaillé (taxes et frais compris).
Les négociants doivent afficher les prix de rachat de manière visible. Cette obligation concerne aussi bien les magasins que les sites de rachat en ligne. À défaut, ils s’exposent à une amende de 3 000 euros ou de 15 000 euros si le négociant est une société. Les particuliers qui vendent leur or ont droit à un délai de rétractation de 24 heures. Si, dans ce délai d’un jour, le vendeur souhaitant récupérer son bien, il ne peut subir aucune pénalité.
Les sites de vente et d’achat d’or se rémunèrent de différentes manières. Le plus souvent, le paiement passe par à travers le prélèvement d’un pourcentage sur les transactions effectuées. En moyenne, les vendeurs d’or se rémunèrent à hauteur de 2 à 4 % par transaction, et ceux effectuant les rachats, entre 4 et 10 %. Les frais sur les trackers sont plus faibles.
La vente de l’or peut être soumise à l’impôt sur les plus-values. Le calcul s’effectue selon des principes comparables à ceux qui régissent les plus-values immobilières : imposition au taux forfaitaire de 19 % + 17,2 % (prélèvements sociaux) soit un total de 36,2 %. La plus-value est réduite de 5 % par année de conservation au-delà de la deuxième. Il y a donc exonération totale après 22 ans de détention.
Le vendeur peut opter pour une taxation forfaitaire de 11 % sur le prix de vente au titre de la taxe sur les Métaux Précieux, à laquelle il faut ajouter 0,5 % de CRDS. Ainsi, la taxation totale est de 11,5 %. Cette imposition s’applique en cas d’absence de preuve de la date d’achat. La vente des bijoux contenant de l’or est exonérée de taxes dans la limite de 5 000 euros. La TVA s’applique sur les ventes d’or pour les pièces dont la prime est supérieure ou égale à 80 %.

Le 14 octobre dernier, le Premier Ministre, Sébastien Lecornu, s’est engagé lors de son discours de politique générale à l’Assemblée nationale à suspendre la réforme des retraites promulguée le 14 avril 2023.
Cette suspension n’obéit pas à des considérations économiques ou financières, mais essentiellement politiques. Elle permet au gouvernement d’échapper au vote d’une motion de censure. C’est la première fois en 30 ans qu’une réforme des retraites est remise en cause, les oppositions ne l’ayant jamais acceptée.
Compte tenu du déficit des régimes de retraite et de son aggravation attendue dans les prochaines années, la question des compensations financières s’est immanquablement posée. Le gouvernement a proposé de faire contribuer les actuels retraités par une sous-indexation de leurs pensions. Au nom d’une solidarité de corps, ils seront ainsi appelés à financer le départ anticipé des futurs retraités.
Le gouvernement a également proposé dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale d’augmenter les taxes sur les complémentaires santé. Ce filon souvent utilisé dans le passé est un impôt déguisé sur les assurés et notamment les retraités qui par définition ne peuvent pas compter sur une couverture collective.
Les groupes parlementaires ayant comme ligne d’horizon la prochaine élection présidentielle ont rejeté les propositions du gouvernement, préférant de taxer l’épargne à travers une hausse de la CSG et la création d’un impôt sur la fortune dite improductive.
Le coût de la suspension apparaît limité : une centaine de millions d’euros en 2026, puis 1,4 milliard d’euros en 2027. La génération 1964, qui n’aurait logiquement dû partir à la retraite qu’à partir du 1er janvier 2027, pourra, pour ses membres nés dans les premiers mois de l’année, liquider ses droits dès la fin de 2026. Cela concerne, dans les faits, peu d’assurés, d’autant qu’ils doivent, pour ce faire, avoir cotisé au moins 170 trimestres.
Dans les prochaines années, les départs à la retraite toucheront des personnes au niveau d’études plus élevé, entrées plus tardivement sur le marché du travail que leurs aînés. La durée de cotisation jouera donc un rôle de plus en plus déterminant. Celle-ci a augmenté depuis 1993 bien plus vite que l’âge légal : cinq années pour la première, contre deux ans et neuf mois pour le second. En pratique, les cadres sont appelés à partir bien au-delà de 62 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Si, aujourd’hui, environ 10 % des nouveaux retraités subissent une décote, ce ratio devrait progresser dans les années à venir. La question du pouvoir d’achat des futurs retraités pourrait donc se poser avec une acuité nouvelle. Il est de bon ton de souligner que leur niveau de vie reste, pour l’instant, supérieur à celui de la moyenne de la population, mais cet avantage est appelé à s’effriter. Supérieur de 2 % aujourd’hui, le pouvoir d’achat des retraités pourrait reculer de plus de 10 % d’ici le milieu du siècle. Avec les nouvelles règles de désindexation, cette érosion risque même d’être accélérée.
Les réformes accumulées depuis 1993 commencent à peser lourdement sur les revenus des retraités : calcul de la pension de base sur les 25 meilleures années au lieu des 10, désindexation par rapport au salaire moyen, allongement de la durée de cotisation, baisse du rendement des points des régimes complémentaires… Tout concourt à une diminution tendancielle des pensions.
Le législateur, l’exécutif et les corps constitués ont fait le choix du « non-travail » au prix d’une baisse du revenu des retraités, choix confirmé par la volonté de durcir les règles du cumul emploi-retraite. La tentation malthusienne est à l’œuvre, une fois encore. L’attrition semble être devenue la clef de voûte de l’action publique, alors qu’il serait au contraire indispensable d’augmenter le volume de travail afin de préserver le financement d’un système de protection sociale parmi les plus généreux au monde.
À ce titre, la volonté exprimée par certains parlementaires de supprimer le Plan d’Épargne Retraite montre qu’un immense travail de pédagogie reste à accomplir. Dans tous les pays occidentaux, les compléments par capitalisation bénéficient de régimes fiscaux incitatifs. Ces dispositifs s’adressent prioritairement à ceux dont les taux de remplacement (pensions/revenus d’activité) sont faibles. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que l’épargne retraite constitue un levier crucial d’orientation de l’épargne vers les entreprises, qui ont des besoins de financement considérables pour préserver leur compétitivité.
Au lieu de s’épuiser dans des combats dépassés, il est urgent de retrouver les moyens de fortifier notre croissance et d’assurer le meilleur niveau de vie possible aux Français.
Jean-Pierre Thomas
Président du Cercle de l’Épargne
Notre Temps consacre un article à la hausse de la flat tax appliqué aux produits d’épargne et à l’introduction d’un impôt sur la fortune improductive, ciblant certes les plus fortunés. Interrogé sur les répercussions de ces hausses sur les choix de placements des épargnants, le directeur du Cercle de l’épargne, estime que l’État « risque donc de perdre d’un côté, ce qu’il gagnerait de l’autre ».
Interrogé sur l’effet de la hausse de la CSG sur les placements financiers, Philippe Crevel indique que si ce changement réduit un peu le rendement des épargnants, la baisse ne devrait pas détourner les épargnants de leurs habitudes d’épargne.
Dans le Figaro, le Directeur du Cercle de l’Epargne est invité à réagir à l’annonce d’une hausse de la flat tax et l’introduction d’un impôt sur le fortune non productive. Il rappelle que l’épargne des ménages étaient dans le viseur des pouvoirs publics depuis un certains temps et souligne qu‘ « hormis l’or ou le bitcoin, il n’existe pas d’épargne improductive, car tous les placements sont investis en obligations, actions ou encore immobilier » et
Au micro d’Europe 1, Philippe Crevel évoque la nécessité d’encourager la diffusion du PER au plus grand nombre dans un contexte de baisse annoncé du pouvoir d’achat des retraités dans les prochaines années.
Cité dans le journal Investir, le Directeur du Cercle de l’Epargne revient sur la collecte record de l’assurance vie en septembre. Il explique pourquoi, l’assurance vie constitue l’un des placements privilégié par les ménages en cette période où le taux d’épargne est à un niveau particulièrement élevé.
Le marché du non-côté, longtemps réservé à un public d’initiés, tend à se démocratiser. Sur RMC, Philippe Crevel rappelle que ce placement qui offre des perspectives de rendements élevés présente des risques et encourage les épargnants à ne pas y placer toutes leurs économies.
COMMUNIQUÉ DE PRESSE DU CERCLE DE L’ÉPARGNE
Analyse de Philippe Crevel, Directeur du Cercle de l’Épargne
La croissance au troisième trimestre a été, selon l’INSEE, supérieure aux prévisions. Elle s’est élevée à 0,5 %, après +0,3 % au deuxième trimestre. L’augmentation du PIB a été essentiellement portée par le commerce extérieur et l’investissement. Malgré la situation politique chaotique, l’économie française fait preuve de résilience même si le moteur de la croissance, à savoir la consommation des ménages, reste atone.
La production totale de biens et de services enregistre une hausse de 0,8 % au troisième trimestre, contre +0,3 % au deuxième trimestre. Cette augmentation est imputable à la fois à l’industrie manufacturière (+1,1 % après +0,1 %) et aux services (+0,7 % comme au deuxième trimestre).
Pour l’industrie, les raffineries ont contribué à la hausse de la production (+10,6 % après -10,2 %). Il en a été de même pour la production de matériels de transport qui ralentit mais reste dynamique ce trimestre (+2,8 % après +4,8 %). La production a, en revanche, baissé dans les industries agroalimentaires (-1,3 % après -2,2 %). La production d’électricité a fortement augmenté.
La production de services marchands a été dynamique dans l’information-communication (+1,6 % après +0,4 %) et dans les services aux entreprises (+1,2 % après +0,7 %). En revanche, la production dans l’hébergement-restauration (-0,5 % après +1,8 %) et celle dans les services de transport (-0,6 % après +0,3 %) reculent.
La production reste quasi stable dans la construction (+0,1 % après -0,1 %).
La consommation des ménages a légèrement progressé au troisième trimestre 2025 (+0,1 % après +0,1 %). Les achats de biens sont stables au troisième trimestre (+0,0 % après +0,1 %). La consommation alimentaire (y compris tabac) a reculé de 1,0 % après +1,5 %. En revanche, la consommation d’énergie est en hausse de 1,3 % après -2,4 %
La consommation des ménages en services a été moins dynamique au troisième trimestre qu’au deuxième (+0,2 % après +0,5 %). Contrairement à la tendance passée, les dépenses liées aux loisirs ont reculé. Les dépenses d’hébergement-restauration ont baissé de 0,7 % après +2,3 % et celles de des services de transports de 0,5 % après +1,5 %. En revanche, la consommation se redresse en information-communication (+1,1 % après -0,2 %).
La bonne nouvelle du troisième trimestre est l’augmentation de l’investissement (formation brute de capital fixe – FCBF). La hausse est de +0,4 % contre 0,0 % au deuxième trimestre. La FBCF en produits manufacturés connait une augmentation de 0,5 % après plusieurs trimestres consécutifs de baisse. Elle est portée par la FBCF en biens d’équipement et en matériels de transport. L’investissement en services hors construction est entraîné par l’investissement en information-communication qui enregistre une hausse de +1,7 % après +0,4 %. L’investissement en construction continue, en revanche, de reculer (-0,1 % après -0,2 %), surtout dans le bâtiment.
Le commerce extérieur a contribué fortement à la croissance pour la première fois depuis le début de l’année. Sa contribution a été de +0,9 % au troisième trimestre 2025 après -0,4 point au deuxième trimestre et -0,5 point au premier trimestre.
Les exportations ont augmenté au troisième trimestre 2025 de +2,2 % après +0,3 %. Elles ont été portées par les ventes des matériels de transport (+8,9 % après -2,3 %), en particulier dans l’aéronautique. Les exportations françaises ont été dynamiques pour l’industrie chimique et les produits pharmaceutiques. En revanche, les exportations de produits agroalimentaires ont de nouveau reculé (-4,9 % après -5,1 %). Ces dernières ont été pénalisées par les tensions commerciales avec la Chine et les États-Unis.
Les importations ont diminué de 0,4 % au troisième trimestre après +1,4 %. Les importations en biens diminuent, -0,3 % après +2,3 %, avec un net repli dans l’énergie et, dans une moindre mesure, dans les produits alimentaires. Dans les services, les importations ont également baissé (-0,6 % après -1,1 %).
La contribution des variations de stocks à l’évolution du PIB est négative ce trimestre (-0,6 point après +0,5 point). Cette contribution négative est notamment imputable au secteur aéronautique (après deux trimestres consécutifs de forte contribution positive) et, dans une moindre mesure, à celui de la chimie et de la pharmacie.
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Avec un taux de croissance de 0,5 % au troisième trimestre, l’objectif de croissance de 0,8 % devrait être atteint cette année. La France, malgré un contexte complexe, marqué par la multiplication des incertitudes internationales et internes, fait preuve de résilience. L’aéronautique contribue, avec les exportations d’avions, à la croissance. En revanche, la panne de la consommation, en lien avec le maintien d’un fort taux d’épargne, demeure un frein à la croissance du PIB. La situation dégradée des finances publiques et l’instabilité politique poussent les ménages à la prudence.
COMMUNIQUÉ DE PRESSE DU CERCLE DE L’ÉPARGNE
Journée mondiale de l’épargne – 31 octobre 2025
Analyse de Philippe Crevel, Directeur du Cercle de l’Épargne
Chaque 31 octobre, la Journée mondiale de l’épargne rappelle l’importance d’un geste ancien mais toujours essentiel, renoncer à la consommation en mettant de côté une part de ses revenus. Créée en 1924 à Milan à l’initiative de l’Institut mondial des banques d’épargne, cette journée visait à l’origine à restaurer la confiance dans le système bancaire après la Première Guerre mondiale et à promouvoir la sécurité financière des ménages. Cent ans plus tard, elle conserve toute sa portée symbolique, à un moment où la succession de chocs et de crises incite les Français à repenser leur rapport à l’épargne.
Plus de sept Français sur dix mettent régulièrement de l’argent de côté. 85 % détiennent un Livret A, près de la moitié possèdent au moins un contrat d’assurance vie et un quart disposent d’un Plan d’Épargne Retraite (PER). Le taux d’épargne est en France un des plus élevés d’Europe. Au deuxième trimestre 2025, celui des ménages atteignait 18,9 % du revenu disponible brut (INSEE). Ce taux est près de quatre points au-dessus de son niveau de 2019. Sa hausse est imputable à la montée de l’anxiété en lien avec les chocs et crises qui s’accumulent (Covid, guerre en Ukraine, inflation, guerre au Moyen Orient, tensions géopolitiques, crise politique en France).
Contrairement à certains préjugés, les Français sont des épargnants avertis. Ils s’adaptent rapidement aux changements de rémunération des différents produits. Après avoir plébiscité pendant trois ans le Livret A, ils se tournent depuis le début de l’année vers l’assurance vie qui bat de nombreux records. L’encours de ce placement, le premier en volume, dépasse à 2 068 milliards d’euros, en hausse de +4,7 % sur un an (août 2025 – données France Assureurs). Sur les huit premiers mois de l’année, la collecte brute de l’assurance vie atteint près de 100 milliards d’euros. Si les fonds euros, bénéficiant de la fameuse garantie du capital, captent toujours la majorité des versements, les unités de compte en représentent désormais près de 40 %. Ces dernières sont soutenues par la bonne tenue des marchés financiers et la diversification des produits vers l’investissement durable ou le capital investissement.
Lancé à l’automne 2019, le Plan d’Épargne Retraite (PER) s’est imposé en quelques années comme un pilier de l’épargne longue. En 2025, il franchit le cap symbolique des 130 milliards d’euros d’encours, soit une progression de près de 20 % en un an. 12 millions de Français détiennent désormais un PER, individuel ou collectif. Ce succès tient à la fois à la souplesse du dispositif — possibilité de transférer les anciens produits d’épargne retraite (PERP, Madelin, PERCO), sortie en capital ou en rente – et à la déduction fiscale, dans une certaine limite, des versements individuels. Le PER séduit également les jeunes actifs, de plus en plus nombreux à y souscrire via leur entreprise ou de manière individuelle.
Le non coté attire de plus en plus d’investisseurs particuliers. Grâce à la démocratisation des fonds « private equity » au sein des contrats d’assurance vie ou des PER, la part des ménages détenant des produits non cotés a doublé en cinq ans. Ce mouvement traduit un désir de sens et de participation directe au financement de l’économie réelle, notamment des PME et des entreprises innovantes. Les pouvoirs publics ont ainsi choisi un fonds non coté pour l’orientation de l’épargne vers la défense (Fonds Bpifrance – défense).
Selon l’Autorité des marchés financiers (AMF), près d’un nouvel investisseur en Bourse sur trois a moins de 35 ans. Portée par les applications d’investissement en ligne, l’éducation financière et la recherche de placements plus dynamiques, une nouvelle génération d’épargnants émerge. Plus agiles, ces jeunes épargnants cherchent à dégager rapidement des plus-values.
L’émergence des cryptomonnaies s’impose de plus en plus comme un phénomène générationnel. En France, environ 57 % des détenteurs avaient moins de 35 ans en 2024, et 24 % avaient entre 18 et 24 ans.
Selon l’enquête 2025 AG2R LA MONDIALE – Amphitéa – Cercle de l’Épargne, 36 % des jeunes de moins de 25 ans jugent intéressant d’investir dans les « cryptos » contre 21 % pour l’ensemble de la population.
La Journée mondiale de l’épargne 2025 s’inscrit dans un contexte de mutations profondes : transition énergétique, vieillissement démographique, transformation numérique. L’épargne est appelée à devenir un acteur majeur de ces transitions. À la fois outil individuel et collectif, elle protège son détenteur tout en finançant l’investissement productif, les infrastructures, la recherche et l’innovation. Elle exerce un effet de levier déterminant sur la croissance et la stabilité économique. Par sa force, elle contribue à la moindre dégradation de la note souveraine de la France.
Épargner, c’est s’assurer contre les aléas et c’est prendre un risque, celui de se tromper sur les placement. Épargner n’est jamais anodin. Le choix des produits et des supports doit être en phase avec les besoins et les attentes.
Philippe Crevel est le directeur du Cercle de l’Épargne, auteur du livre « Épargner mieux pour vivre mieux » publié chez Solar en septembre 2025.
A compter de fin 2026, les règles relatives au découvert vont évoluer sous l’impulsion d’une directive européenne. Au micro d’Europe 1 ce 29 octobre, Philippe Crevel explique les nouvelles règles Il rappelle que ce dispositif vise à protéger les ménages en limitant les cas de surendettement.
Le Livret A en perte de vitesse, subit selon le Directeur de l’Epargne le « surcroît de dépenses liées à la fin des vacances et à la rentrée scolaire. » Pour Philippe Crevel, la baisse probable de son taux au 1er février prochain ne devrait par, par ailleurs, participer à relancer la collecte.
Cité dans le journal Le Monde, Philippe Crevel a pris l’ascendant sur les autres placements dans un contexte de baisse de la rémunération des livrets d’épargne réglementée en lien avec le recul de l’inflation. Il note ainsi que l’assurance-vie « s’impose comme le placement de l’année, dans un contexte où le taux d’épargne des ménages a atteint au deuxième trimestre 18,9 % de leur revenu disponible brut ».
Interview de Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Épargne
L’épargne joue un rôle majeur en France. Le patrimoine des ménages dépasse 11 000 milliards d’euros. Le seul patrimoine financier atteint plus de 6 000 milliards d’euros. Avec la succession de chocs – pandémie, guerre en Ukraine, conflit au Moyen-Orient, vague inflationniste, retour de Donald Trump, crise politique –, les Français mettent de plus en plus d’argent de côté. Le taux d’épargne a atteint, au deuxième trimestre 2025, 18,9 % du revenu disponible brut. Sept Français sur dix épargnent chaque année. Avec les Allemands, nous sommes, en la matière, les champions d’Europe.
Épargner, c’est bien, mais ce n’est pas un objectif en soi. Dans mon ouvrage, je rappelle que l’épargne, qui est une renonciation à la consommation, permet de se protéger des aléas du quotidien, de financer un projet ou l’acquisition d’un logement, de préparer sa retraite, ou encore de se constituer un patrimoine pour ses enfants et petits-enfants. Épargner n’a de sens que si cela offre la possibilité d’améliorer sa vie.
Le livre présente, de manière aussi pédagogique que possible, l’ensemble des placements immobiliers et financiers en soulignant leurs avantages et leurs inconvénients. L’univers de l’épargne est riche et complexe. Les produits sont nombreux, chacun obéissant à des règles fiscales spécifiques. Le législateur n’a pas été avare en la matière. J’essaie d’apporter des repères dans le maquis des placements. Livret A, PEL, LEP, LDDS, PEA, PER, PEAC, ISR… ces sigles peuvent rebuter les épargnants. Au-delà des produits classiques, j’ai tenu à présenter des placements plus originaux, comme les sneakers, le vin, les conteneurs ou les timbres. Pour illustrer les différentes stratégies, des cas types ont été intégrés à l’ouvrage.
Premièrement, ne jamais souscrire un produit que l’on ne comprend pas. L’épargnant doit se renseigner et oser poser des questions. Deuxièmement, il doit se méfier des offres trop alléchantes. Que ce soit par téléphone, par e-mail ou via les réseaux sociaux, les sollicitations ne manquent pas pour placer son argent et promettre des rendements élevés. Or, afin d’éviter toute déception et surtout toute perte, il faut toujours vérifier qui est à l’origine de la proposition. Il faut privilégier les établissements agréés en Europe et garder à l’esprit que le placement miracle n’existe pas.
Les bonnes vieilles règles restent les meilleures : ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier, épargner progressivement et savoir engranger ses plus-values après s’être fixé, au préalable, un objectif.
Les gouvernements passent, mais les problèmes demeurent. Ils tendent même à s’aggraver et deviennent, par conséquent, de moins en moins faciles à résoudre. La retraite en est l’un des meilleurs exemples. La France est socialement engluée depuis 2023, voire 2019, en raison de son système de retraite. Si le constat est simple, aucune solution n’est, en revanche, jugée acceptable par une majorité de Français. Les régimes de retraite sont confrontés à un choc démographique : 5 millions de retraités en 1981, 17 millions aujourd’hui, 23 millions d’ici 2070. Dans le même temps, la croissance se dérobe sous nos pieds. L’objectif est de permettre à chacun de vivre le mieux possible les dernières années de sa vie. Jusqu’à présent, notre système de retraite a plutôt bien rempli cette mission. Pour que cela perdure, des ajustements sont nécessaires. Les réformes brutales ne passent plus, car elles sont sources d’injustice et d’incompréhension. Le président Emmanuel Macron a sans doute manqué le coche en 2018 avec son projet de réforme visant à instaurer un grand régime de retraite par points. Le choix d’un système unique, centralisé et bureaucratisé fut sans nul doute une erreur. C’est un gâchis, car un régime par points offre de la souplesse de gestion et une possibilité de personnalisation. De manière incompréhensible, le chef de l’État a abandonné ce grand projet qui fut pourtant l’un de ses engagements de campagne en 2017, soutenu dans son principe par la CFDT. Il reprenait une ancienne promesse de la droite et du centre, formulée dès 1992… pour finalement se rabattre sur un simple report de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans, une mesure paramétrique d’un autre temps.
Depuis des années, je plaide pour l’abandon de l’âge de la retraite comme couperet, au profit d’une retraite à la carte. L’introduction d’un système actuariel par points, prenant en compte l’espérance de vie après 60 ans, offrirait la possibilité de s’affranchir de l’âge légal. En Suède, en Italie et en Allemagne, un tel système a été adopté. Il permet un pilotage fin des régimes de retraite. Avec les outils numériques actuels, il serait même envisageable de personnaliser les pensions en intégrant l’incidence des métiers exercés au cours d’une carrière sur l’espérance de vie. Une telle personnalisation serait source d’équité.
En 1945, la France a fait le choix du tout-répartition, car c’était alors la solution la moins coûteuse et la plus rapide à mettre en œuvre. L’absence de fonds de pension pénalise aujourd’hui à la fois les retraités et l’économie. Sans effacer totalement les contraintes démographiques, la capitalisation permet de disposer de revenus moins dépendants de la situation de l’économie nationale. Dès 1993, j’ai proposé l’affiliation de tous les actifs à un produit d’épargne retraite. Cette proposition demeure d’actualité : seuls un quart des actifs en bénéficient aujourd’hui.
Au-delà des questions d’âge ou de financement, je suis convaincu que le dossier des retraites relève avant tout des partenaires sociaux. Ne gèrent-ils pas avec efficacité le principal régime de retraite complémentaire, l’AGIRC-ARRCO, qui dispose de plus de 70 milliards d’euros de réserves ? L’étatisation des régimes sociaux a conduit tout à la fois à un blocage complet et à l’accroissement des déficits. À côté du domaine de la loi et du règlement, il faudrait créer un domaine social, protégé constitutionnellement, afin de permettre au dialogue social de s’exprimer sans l’ombre portée de l’exécutif.
Jean-Pierre Thomas
Président du Cercle de l’Épargne
De plus en plus nombreuses, au fil des générations, à participer au marché du travail, les femmes représentent une part croissante des retraités de droits directs affiliés à un régime de retraite en France. Fin 2023, selon le rapport « Les retraités et les retraites – Édition 2025 » publié par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques en juillet, les femmes représentaient 53 % des 17,2 millions de retraités de droit direct affiliés à un régime de retraite français contre 50,8 % en 2004. Si cette progression traduit l’évolution du rôle économique et social des femmes, elle met également en lumière la persistance d’inégalités structurelles en matière de revenus et de pension. L’allongement de la durée de vie, les carrières plus fragmentées et la moindre capitalisation dans les dispositifs d’épargne retraite rendent les femmes particulièrement vulnérables face à la perspective du départ à la retraite.
LES FEMMES ET LA RETRAITE : UNE ÉQUATION ENCORE DÉSÉQUILIBRÉE
L’ÉPARGNE RETRAITE FÉMININE : UNE PRISE DE CONSCIENCE CONTRARIÉE
Depuis 1995, l’espérance de vie a gagné sept ans au Japon, passant de 79 à 85 ans. En France, elle atteint 82 ans. Jamais les sociétés n’ont compté autant de retraités, 17 millions en France en 2024, contre 5 millions en 1981. En parallèle, la fécondité recule. En Italie et en Espagne, elle est de 1,3 enfant par femme, contre les 2,1 requis pour assurer le renouvellement. En France, elle n’est plus que de 1,6. En Corée du Sud, elle est inférieure à 1. Le rapport entre les 65 ans et plus et les actifs s’envole. En 1995, la France près de 2 actifs pour un retraité, c’est désormais 1,7 et demain, ce sera 1,4. Au Japon, il y a presque un retraité pour un actif.
Avec plus de consommateurs, et moins de producteurs, l’équilibre économique sera de plus en plus tendu. Si le retraité reste un acteur de la demande – il mange, se loge, se soigne, voyage – en revanche, il ne participe pas ou peu à la production. La société entre alors en régime de rareté relative au niveau de l’offre avec une obligation d’importer ou de recourir à l’immigration. Certes, les retraités consomment moins de biens industriels que les actifs, mais ils dépensent plus en services qui exigent d’importants besoins de main-d’œuvre.
Si pour une raison ou une autre – protectionnisme, incapacité de l’offre mondiale, limitation de l’immigration – l’offre est bridée, elle sera sujette à une hausse des prix. Le recours aux importations peut poser quelques problèmes. En effet, des déficits de la balance des paiements courants pourraient poser des problèmes de financement et déboucher sur une crise des changes. Déjà, aujourd’hui, des pays comme le Royaume-Uni ou les États-Unis ont des dettes extérieures qui dépassent 70 % du PIB. Des pays comme le Japon, l’Allemagne ou l’Italie, habitués à dégager des excédents au niveau de leur balance des paiements courants constatent l’érosion, depuis plusieurs années, de ces derniers. Le Japon comme l’Allemagne peuvent compter sur le niveau élevé du taux d’épargne des ménages mais celui-ci ne saura suffire pour compenser les effets du vieillissement démographique.
L’inflation sous-jacente, que ce soit aux États-Unis, en Allemagne ou au Royaume-Uni, tend à augmenter en raison des tensions sur le marché du travail. Cette inflation liée à la pénurie croissante de la main-d’œuvre a été compensée durant des années par la mondialisation. Les pays vieillissants importaient leurs biens de la Chine et des pays asiatiques.
La baisse des prix générée par ce flux amenait des gains de pouvoir d’achat que les économies nationales ne parvenaient plus à produire faute de gains de productivité. Cette mécanique suppose deux fluidités : celle des capitaux et celle des biens. Or, ces fluidités s’étiolent. La rivalité sino-américaine, les sanctions financières, la quête de souveraineté réduisent la mobilité des capitaux. Avec la montée du protectionnisme, la croissance des échanges ralentit. Les droits de douane américains, tombés sous les 5 % dans les années 2010, atteignent désormais 17 %. Des produits importés plus chers, c’est par nature inflationniste.
Le vieillissement des populations signifie également une moindre ouverture au progrès technique. En Europe, la productivité par tête progresse lentement, moins de 10 % de gains depuis le début de siècle. Or, dans le même temps, les charges publiques augmentent, retraite, dépendance, santé, défense, transition énergétique. Ces besoins importants, à financer en grande partie par emprunts, sont une source d’inflation.
Compte tenu de ces différents facteurs inflationnistes, les investisseurs, les épargnants, recherchent des valeurs refuges pouvant les en préserver. L’or, le bitcoin en sont les premiers exemples. Les actions bénéficient également de cette recherche de valeurs pouvant atténuer les effets de l’inflation.
L’inflation n’est pas seulement le fruit d’une politique monétaire trop souple ou d’un choc énergétique. Elle est inscrite dans la mécanique des âges. Le vieillissement agit comme un engrenage qui resserre l’offre et élargit la demande. Tant que le monde est ouvert, il se traduit par une dette extérieure croissante. Quand les frontières se ferment, il éclate en inflation.
Près de deux millions de personnes travaillent dans le secteur de la santé au sens large du terme. Les emplois concernés obéissent à des statuts divers, professions libérales, salariés de droit privé, fonctionnaires, contractuels, etc. La couverture de la retraite est à l’image de cette profusion. Les différentes catégories de personnels, médecins, infirmières, fonctionnaires, etc. sont couvertes par des régimes de retraite différents. Les régimes des professionnels de la santé n’échappent pas aux tensions démographiques comme ceux des autres secteurs d’activité.
Le secteur de la santé rassemble un grand nombre d’emplois : médecins, infirmières, aides-soignants, etc.
Au 1er janvier 2025, la France comptait 237 200 médecins activité dont 100 000 généralistes. 74 600 personnes étaient enregistrées comme pharmaciens en activité. Toujours au 1er janvier 2025, il y avait 47 600 chirurgiens-dentistes, 25 800 sages-femmes et 14 400 pédicures-podologues.
Démographie des médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes,
sages-femmes et pédicures-podologues au 1er janvier 2025

Pour les médecins, l’exercice libéral reste majoritaire, mais il y a une montée en puissance du salariat. Pour les pharmaciens, sur les 74 600, 63 % sont salariés (privé ou structures employeuses).
La France compte par ailleurs, plus de 562 000 infirmières/infirmiers :
En 2025, la France consacre plus de 414 milliards d’euros à ses retraites, soit près de 13,5 % du PIB.
Dans ce total, la part des professionnels de santé à la retraite reste marginale même si elle tend à progresser. Pour ceux relevant du statut libéral, la CNAVPL comptabilisait au 30 juin 2023, 425 632 pensionnés issus du secteur de la santé et 53 073 conjoints survivants bénéficiant d’une pension de réversion. Les médecins retraités sont aujourd’hui près de 100 000, avec une pension moyenne proche de 3 000 euros par mois.
Les médecins praticiens hospitaliers, infirmiers, aides-soignants, techniciens de laboratoire, sages-femmes travaillant dans les hôpitaux publics relèvent de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL).
Ce régime, aligné depuis la réforme de 2003 sur celui de la fonction publique d’État, repose sur un calcul en annuités. La pension se détermine en fonction du dernier traitement indiciaire, hors primes. Or, dans le monde hospitalier, les primes constituent souvent une part substantielle du revenu, si bien que la pension est inférieure au salaire d’activité. Pour compenser, les soignants peuvent bénéficier de la Retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), mais celle-ci reste modeste.
La Fonction publique hospitalière (FPH) comptait, fin 2024, 693 538 pensionnés.
| Catégorie | Nombre de pensionnés | Régime de droit |
| Droit direct (Agent hospitalier titularisé) | 558 975 | Vieillesse ou invalidité |
| Droit dérivé (Conjoint survivant) | 63 389 | Ex-conjoint ou personne à charge équivalente |
| Total pensionnés hospitaliers | 693 538 | Droit direct + Droit dérivé |
En 2025, la pension moyenne d’un infirmier retraité de la fonction publique hospitalière s’élève à environ 1 600 euros nets par mois. Celle d’un médecin hospitalier, plus élevée, varie entre 3 000 et 3 500 euros, mais toujours en deçà de ses collègues libéraux. La réforme des retraites de 2023, en allongeant la durée de cotisation nécessaire pour atteindre le taux plein, pèse particulièrement sur ces carrières pénibles. Beaucoup d’infirmiers entrés jeunes dans le métier devront travailler jusqu’à 64 ou 65 ans pour échapper à la décote, malgré des conditions physiques éprouvantes.
Cliniques privées, maisons de retraite, laboratoires, centres de soins : le secteur privé de la santé emploie des centaines de milliers de salariés. Ceux-ci relèvent du régime général de la Sécurité sociale (CNAV) pour la retraite de base, et du régime complémentaire Agirc-Arrco.
Leur situation se rapproche de celle de l’ensemble des salariés français. La pension moyenne d’un retraité relevant du régime général avoisine les 1 400 euros nets, mais les professionnels de santé du privé connaissent de fortes disparités. Les aides-soignants ou agents de service, peu qualifiés et faiblement rémunérés, perçoivent des pensions proches du minimum contributif. Les infirmiers salariés, dont la carrière est plus stable, bénéficient de pensions plus solides, autour de 1 600 à 1 800 euros. Les médecins salariés du privé, souvent en complément d’un exercice libéral ou hospitalier, connaissent des parcours complexes : cumul de trimestres, superposition de régimes, coordination parfois laborieuse entre CNAV et caisses libérales.
En Allemagne, les soignants salariés du privé sont logés à la même enseigne que ceux du public : même régime légal, complété par des accords de branche. En Italie, la fragmentation est encore plus marquée : les pensions des salariés de santé du privé sont souvent inférieures de 20 à 30 % à celles du public. Au Canada, le secteur privé de la santé n’est pas dominant, mais les établissements offrent souvent des régimes complémentaires inspirés de ceux du public, garantissant une meilleure homogénéité.
Le système de retraite du secteur libéral est plus complexe. Si le régime de base relève de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL), la complémentaire fait l’objet d’une segmentation en fonction des différentes professions. La répartition est la suivante :
Des professions de santé bénéficient, pour certaines d’entre elles, d’un troisième niveau, comme l’Allocation Supplémentaire de Vieillesse (ASV) pour les médecins.
En 2025, la pension moyenne des médecins retraités s’établit à 2 967 euros par mois, composée à :
L’ASV est confrontée à des problèmes financiers. Elle a ainsi enregistré un déficit de 87 millions d’euros en 2024, ses réserves sont passées de 7,7 à 6,3 mois de prestations.
La CARPIMKO La CARPIMKO est la caisse de retraite et de prévoyance des auxiliaires médicaux. Elle bénéficie de l’arrivée constante de jeunes infirmiers et kinés, mais leurs premières années d’activité sont exonérées de cotisations lourdes, si bien que les points acquis sont faibles. À long terme, cela peut fragiliser le niveau des pensions, surtout si la carrière reste morcelée.
En 2025, la pension moyenne des médecins retraités s’établit à 2 967 euros par mois, composée à :
L’ASV est confrontée à des problèmes financiers. Elle a ainsi enregistré un déficit de 87 millions d’euros en 2024, ses réserves sont passées de 7,7 à 6,3 mois de prestations.
La CARPIMKO La CARPIMKO est la caisse de retraite et de prévoyance des auxiliaires médicaux. Elle bénéficie de l’arrivée constante de jeunes infirmiers et kinés, mais leurs premières années d’activité sont exonérées de cotisations lourdes, si bien que les points acquis sont faibles. À long terme, cela peut fragiliser le niveau des pensions, surtout si la carrière reste morcelée.
La Caisse Autonome de Retraite des Chirurgiens-Dentistes et des Sages-Femmes (CARCDSF) bénéficie d’un niveau élevé de cotisations en lien avec les revenus importants des chirurgiens-dentistes. L’arrivée à la retraite de larges générations de dentistes pourrait néanmoins remettre en cause la rentabilité du régime. Par ailleurs, la pression des pouvoirs publics pour limiter les dépenses de santé pourrait peser sur les revenus des dentistes.
La démographie des chirurgiens-dentistes repose sur des installations coûteuses : achat ou création de cabinet, équipements lourds, charges fixes élevées. Les revenus, certes élevés en moyenne, sont fragiles face aux évolutions de nomenclature et aux pressions sur les tarifs. Le système de retraite, bien conçu, reste donc suspendu à l’équilibre économique du métier.
Pour les sages-femmes libérales, le problème est ailleurs : les effectifs sont réduits. Un régime de petite taille est toujours plus sensible aux aléas. Moins d’assurés, c’est moins de mutualisation. La CARCDSF vit ainsi dans une double réalité : une assise technique robuste, mais une exposition démographique qui rend toute projection incertaine.
La Caisse d’assurance vieillesse des pharmacies CAVP comprend :
En Allemagne, les professions libérales médicales sont regroupées dans des Versorgungswerke, caisses professionnelles puissantes et bien capitalisées. Les pensions des médecins allemands atteignent souvent 3 500 à 4 000 euros nets, mais elles dépendent aussi de la conjoncture économique régionale.
En Italie, les caisses professionnelles (Enpam pour les médecins, Enpapi pour les infirmiers) reposent sur des mécanismes proches. Les pensions sont plus faibles, autour de 2 000 à 2 500 euros, mais la solidarité nationale y joue un rôle plus réduit.
Au Canada, les médecins libéraux ne disposent pas d’une caisse professionnelle obligatoire : leur retraite dépend de l’épargne volontaire (REER) et des investissements privés. Leurs pensions peuvent être très élevées, mais inégalitaires.
Au sein du monde de la santé, les exercices mixtes, salariat et libéral, se multiplient avec à la clef des couvertures retraite plus compliquées. Face à l’insuffisance des pensions par répartition, les professionnels de santé se tournent plus en plus vers l’épargne retraite.
Les actifs du régime de la fonction publique hospitalière cotisent sur leurs primes au Régime Additionnel de la Fonction Publique (RAFP) qui fonctionne comme un fonds de pension. Ils peuvent cotiser à un régime supplémentaire individuel (Plan d’Épargne Retraite).
Les salariés du privé peuvent bénéficier d’une couverture au sein de leur entreprise et souscrire des plans d’épargne retraite individuels. Les professionnels libéraux ont accès à des produits de retraite supplémentaire (PER – contrats Madelin).
La MACSF, Mutuelle d’assurance du corps de santé français, revendique plus de 580 000 contrats d’épargne retraite. Par ailleurs, les médecins libéraux ont accès à un dispositif facultatif de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF), le Capimed qui est un régime complémentaire de retraite en capitalisation réservé aux médecins libéraux et à leurs conjoints. Il s’agit d’un PER à points.
Le système de retraite des professionnels de santé est à l’image de l’organisation du système de santé complexe et fragmenté. La forte augmentation du nombre de professionnels a permis aux différents régimes de bénéficier d’un montant élevé de cotisations. Avec le vieillissement démographique, les régimes sont soumis à de plus en plus de tensions financières. Près d’un médecin sur deux a aujourd’hui dépassé soixante ans. Selon certaines estimations, entre 6 000 et 12 000 médecins quitteront chaque année leurs fonctions dans les prochaines années, avec un scénario haut qui évoque près de 10 800 départs annuels.
La dynamique des départs n’est pas homogène. Les départs touchent en priorité les médecins libéraux de premier recours — généralistes, spécialistes de proximité — dont beaucoup prolongent déjà leur carrière au-delà de l’âge légal grâce au cumul emploi-retraite. Mais ce prolongement, s’il amortit la chute, ne fait que repousser l’échéance. Dans les hôpitaux, la même question se pose : comment maintenir la continuité des soins alors que les générations en place s’approchent de la retraite ? Au niveau des caisses de retraite, des augmentations de cotisation sont inévitables pour maintenir l’équilibre à moins de dégrader le niveau de pension. Le recours à un volant plus important de capitalisation apparaît incontournable.
En 2026, une nouvelle génération pourra potentiellement partir à la retraite, celle née en 1963 pour laquelle l’âge légal est fixé à 62 ans et 9 mois. Certains de ceux nés en 1963 pourront partir d’ici la fin de l’année 2025, ce sont ceux nés entre le 1er janvier et le 1er mars 1963. Les personnes nées après le 1er mars ne pourront partir qu’en 2026 selon le calendrier mentionné ci-dessous.
| Mois de naissance en 1963 | Date de départ à la retraite possible |
| Du 2 mars au 1er avril inclus | Le 1er janvier 2026 |
| Du 2 avril au 1er mai inclus | Le 1er février 2026 |
| Du 2 mai au 1er juin inclus | Le 1er mars 2026 |
| Du 2 juin au 1er juillet inclus | Le 1er avril 2026 |
| Du 2 juillet au 1er août inclus | Le 1er mai 2026 |
| Du 2 août au 1er septembre inclus | Le 1er juin 2026 |
| Du 2 septembre au 1er octobre inclus | Le 1er juillet 2026 |
| Du 2 octobre au 1er novembre inclus | Le 1er août 2026 |
| Du 2 novembre au 1er décembre inclus | Le 1er septembre 2026 |
| Du 2 décembre au 31 décembre inclus | Le 1er octobre 2026 |
Pour les personnes nées en 1964, il faudra attendre 2027, car l’âge légal pour cette génération est fixé à 63 ans.
Si les actifs ont la possibilité de prendre leur retraite à compter de l’atteinte de l’âge légal, cela ne signifie pas pour autant qu’ils toucheront leur retraite à taux plein. Pour cela, ils doivent justifier d’un nombre suffisant de trimestres cotisés validés.
Durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein
| Année de naissance | Nombre de trimestres nécessaires pour obtenir le taux plein |
| 1960 | 167 |
| Entre le 1er janvier et le 31 août 1961 | 168 |
| Entre le 1er septembre et le 31 décembre 1961 | 169 |
| 1962 | 169 |
| 1963 | 170 |
| 1964 | 171 |
| À partir de 1965 | 172 |
Ce n’est qu’à 67 ans que la retraite est accordée à taux plein sans référence à la durée de cotisation. En 2026, c’est la génération née en 1959 qui pourra toucher automatiquement une retraite à taux plein.
Les personnes ayant commencé à travailler jeunes, peuvent, sous certaines conditions, partir à la retraite avant l’âge légal avec le taux plein.
Dispositif carrière longue
| Âge de début d’activité | Âge minimum de départ à la retraite |
| Avant 16 ans | 58 ans |
| Avant 18 ans | 60 ans |
| Avant 20 ans | Entre 60 et 62 ans |
| Avant 21 ans | 63 ans |
Les personnes nées en 1968 et qui ont travaillé 5 trimestres avant la fin de l’année civile de leur 16e anniversaire (ou 4 trimestres pour celles nées au 4e trimestre), peuvent partir en retraite en 2026 à 58 ans. Celles qui sont nées avant 1968 et qui entrent dans le cas de la carrière longue avec un début d’activité avant 16 ans pourront partir quand elles le souhaitent étant donné qu’en 2026 elles auront déjà 58 ans ou plus. Pour toucher une retraite à taux plein, elles devront avoir cotisé 172 trimestres.
Les personnes nées en 1966 peuvent prétendre à une retraite dès 60 ans en 2026, si elles ont commencé à travailler avant 18 ans (validation de 5 ou 4 trimestres). Il leur faudra 172 trimestres pour percevoir une retraite à taux plein.
Pour les personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans, en fonction de leur date de naissance, elles peuvent cesser leur activité entre 60 et 62 ans. La borne d’âge est relevée progressivement de trois mois pour toutes les générations nées à partir de l’année 1963. Ainsi, les actifs nés en 1963 qui ont commencé à travailler avant 20 ans peuvent prendre leur retraite à partir de 60 ans et 3 mois. Ils ont ainsi pu cesser leur activité dès le courant de l’année 2023.
En 2026, les personnes nées après le 2 mars 1965 sont concernées pour un départ en retraite pour une carrière commencée avant 20 ans. En effet, pour la génération 1965, le départ anticipé est possible à compter de 60 ans et 9 mois, âge atteint le 2 décembre 2025. Comme la retraite peut être prise le mois suivant cette borne d’âge, dans l’exemple présenté, il s’agira du 1er janvier 2026. Toute la génération née en 1965 pourra donc prendre sa retraite pour carrière longue en 2026 car elle aura atteint, voire dépassé, les 60 ans et 9 mois. Pour toucher une retraite à taux plein, les personnes éligibles devront avoir acquis au moins 172 trimestres. Pour celles nées en 1966, la borne d’âge pour un départ en retraite anticipé est fixée à 61 ans. Elles devront donc attendre 2027 pour pouvoir partir à la retraite.
En 2026, aucun nouveau retraité ne sera concerné par un départ anticipé à 63 ans, en cas de début de carrière avant 21 ans. En effet, l’âge légal, sans condition spécifique est fixé à 63 ans pour la génération née en 1964, dont les premières cohortes cesseront leur activité en 2027. Il faudra attendre la génération née en 1965 et donc 2028 pour voir cette mesure effective. L’âge légal passant à 63 ans et 3 mois, ceux qui auront commencé à travailler avant 21 ans pourront partir 3 mois plus tôt.
Les personnes atteintes d’un handicap pourront bénéficier d’un départ anticipé sous réserve d’avoir validé un certain nombre de trimestres et d’avoir un taux d’incapacité permanente au moins égal à 50 %. Si ces conditions sont remplies, la pension est calculée au taux plein.
Nouveaux concernés par un départ en retraite pour handicap en 2026
| Année de naissance | Âge possible de départ à la retraite | Nombre de trimestres cotisés exigés |
| 1967 | 59 ans | 70 |
| 1968 | 58 ans | 80 |
| 1969 | 57 ans | 90 |
| 1970 | 56 ans | 101 |
| 1971 | 55 ans | 111 |
Les personnes justifiant une incapacité permanente au moins égale à 20 %, due à une maladie professionnelle ou un accident du travail, et ayant cotisé au régime général, peuvent partir dès 60 ans avec une retraite à taux plein. En 2026, sera donc concernée la génération née en 1966.
Les personnes dont le taux d’incapacité permanente se situe entre 10 et 20 %, peuvent partir avec une retraite à taux plein deux ans avant l’âge légal. Ainsi, en 2026, la principale génération concernée par cette possibilité de départ sera celle née en 1965. L’âge légal étant de 63 ans et 3 mois, les personnes nées cette année-là pourront partir en 2026 à 61 ans et 3 mois.
Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale du mois de juin 2024, l’indice phare de la place parisienne connaît une croissance bien plus faible qu’auparavant et que celle des autres indices européens et américains. Sur ces six derniers mois (avril – septembre 2025), le CAC 40 a perdu 4 % quand son homologue allemand a gagné 1,5 % et le S&P 500 américain 15 %.
Cette stagnation de la valeur des grandes entreprises est à mettre en parallèle avec l’ampleur du déficit public, -5,6 % du PIB en 2024 -5,4 % attendu en 2025 et de la dette publique qui s’élève à 115 % du PIB au deuxième trimestre 2025. Avec des taux longs avoisinant 3,5 % pour une croissance nominale de 2,5 % (1 % de croissance réelle et une inflation de 1,5 %), le différentiel de 1 point impose, pour stabiliser la dette publique, un excédent primaire (avant paiement des intérêts de la dette) de +1,1 % du PIB. Or, la France accuse un déficit primaire supérieur à – 3 %.
Les gouvernements ne pouvant pas compter sur une majorité stable sont à la peine pour définir une trajectoire de réduction des déficits publics. Avec en perspective l’élection présidentielle de 2027, la mise en œuvre de réformes structurelles apparaît, par ailleurs, difficile. Dans ce contexte, les investisseurs réclament des primes de risque plus élevées. Ils réduisent leur exposition aux actifs financiers et, en premier lieu, aux actions.
Depuis un an, le spread (écart de taux) des Obligations Assimilables du Trésor (OAT) à 10 ans sur les Bunds allemands s’est élargi. Fin septembre, cet écart atteint près de 90 points de base à 10 ans et 120 points à 30 ans, alors qu’il n’était que de 20 à 30 points dans les années 2010. Cette prime de risque constitue une taxe silencieuse sur l’économie française. Chaque hausse de 100 points de base sur les taux souverains représente, à horizon cinq ans, une charge d’intérêts supplémentaire équivalant à 0,5 point de PIB. L’augmentation des taux des obligations souveraines se répercute en partie sur les taux des crédits. Elle compense, en partie, la baisse des taux directeurs de la Banque centrale européenne. Cette situation pèse sur l’investissement des ménages et des entreprises. L’investissement productif, qui pesait 12,5 % du PIB en 2022, n’en représente plus que 11 % en 2025.
Face à l’accumulation de mauvaises nouvelles sur le front économique, financier et politique, les ménages augmentent leur effort d’épargne. Du dernier trimestre 2019 au deuxième trimestre 2025, le taux d’épargne est passé de 15 à 18,9 % du revenu disponible brut des ménages. Les rares gains de pouvoir d’achat sont affectés à l’épargne et non à la consommation ou à l’investissement.
Le prix de la défiance est élevé. Les recettes fiscales, en particulier de TVA, sont moins importantes que prévu, ce qui accroît le déficit et, par voie de conséquence, les dettes. Cette surcote de défiance, combinée au recul de la croissance est estimée à – 0,4 point de PIB, augmentant ainsi le déficit de 0,55 point de PIB.
La France est en voie de connaître un engrenage similaire à celui de l’Italie des années 1980 quand les marchés, devenus méfiants, exigeaient une prime toujours plus forte, accélérant la divergence dette/PIB. La stagnation des marchés financiers français n’est pas un épiphénomène boursier. Elle est la conséquence d’une méfiance des investisseurs sur la trajectoire économique et politique du pays.
En 2024, les encours d’épargne salariale ont atteint 200 milliards d’euros dont 166 milliards qui reposent dans les fonds d’épargne entreprise et interentreprise. 36 % des fonds sont retirés avant l’échéance prévue de cinq ans. Cette sortie précoce s’explique par l’introduction, par le législateur, d’une dizaine de cas de déblocages anticipés sans pénalisation fiscale. Les principaux types de déblocages concernent essentiellement des évènements familiaux ou des problèmes professionnels :
Depuis 2024, les fonds placés sur des Plans d’Épargne Entreprise (PEE) ou Plan d’ÉPARGNE Interentreprise (PEI) peuvent être débloqués pour se mettre au service d’un proche dépendant, pour améliorer les performances énergétiques du logement, ou pour acheter un véhicule propre (décret du 6 juillet 2024).
Ces trois nouvelles possibilités sont, jusqu’à présent, peu utilisées par les bénéficiaires de l’épargne salariale. En 2024, ces déblocages ont représenté moins de 1,5 % des sommes retirées en avance, selon l’Association française de la gestion d’actifs (AFG). Le nombre de demandes a plafonné à 1,4 % du total pour tout le marché. Sur les 11 millions de bénéficiaires de PEE et PEI en 2024, 4 800 ont puisé dedans pour acheter un vélo, un scooter ou une voiture non thermique et 3 700 pour améliorer l’isolation de leur résidence principale. Encore plus minime, devenir proche aidant n’a suscité que 500 demandes. Les conditions de déblocage pour se mettre au service d’un proche dépendant sont complexes, rendant son recours difficile d’accès.
Le déblocage pour financer la rénovation énergétique de sa résidence est également assorti de conditions très strictes. Ainsi, les travaux éligibles ne peuvent se limiter au changement d’une seule fenêtre ; il faut en remplacer au moins la moitié par du double vitrage en plus des portes donnant sur l’extérieur. Les travaux doivent, en outre, aboutir à un gain énergétique d’au moins 35 %. Or, « il est bien difficile de prévoir une telle économie d’énergie », pointe Marielle Cohen-Branche, la médiatrice de l’Autorité des Marchés Financiers. En revanche, le déblocage pour acheter un vélo, un scooter électrique, ou encore une voiture électrique ou à l’hydrogène est plus facile d’accès.
Parmi les cas de déblocage les plus utilisés figurent la cessation du contrat de travail qui génère plusieurs centaines de milliers de demandes par an (411 215 en 2024) et l’achat ou de l’agrandissement de sa résidence principale, avec 111 820 demandes. Par ailleurs, 63 394 épargnants ont débloqué des fonds pour se marier ou se pacser. Ces trois cas représentaient 90 % des demandes et 80 % des montants débloqués en 2024.
33 % des titulaires d’un produit d’épargne salariale ignorent quels motifs permettent de débloquer son épargne salariale, selon un sondage AFG-AMF.
Cité dans l’argus de l’assurance, Philippe Crevel commente les résultats décevants de la collecte du Livret A en août. Il explique ce recul de la collecte par les deux baisses consécutives du taux du placement le plus répandu en France. Pour autant il rappelle que le Livret A n’a pas fait l’objet de retraits massifs.
Taxe Zucman, quels risques pour l’économie et la croissance française ? Explications du Directeur du Cercle de l’Epargne dans cet article de Slate.fr. A travers l’exemple de la société française Mistral, spécialisée dans l’intelligence articelle, Philippe Crevel met en évidence les effets pervers d’une taxation des hauts revenus et de la confusion entre patrimoine personnel et patrimoine professionnel.
Philippe Crevel était invité d’Alexandre Le Mer sur le plateau de Bonjour Matin sur Europe 1. Alors que 7 Français sur 10 épargnent et que le taux d’épargne atteint un niveau record, le Directeur du Cercle de l’Epargne évoque les risques tant sur le plan politique qu’économique d’accroître la fiscalité de l’épargne.
Interrogé pour le journal Paris Match, le Directeur du Cercle de l’Epargne rappelle qu’ « en France, l’État central joue un rôle beaucoup plus important. En Espagne ou en Belgique, provinces et régions ont davantage de pouvoir budgétaire ». Il alerte par ailleurs sur les risque de reconduire un budget déficitaire. Cela conduirait, selon lui à « aggraver la trajectoire des finances publiques ».
Le Figaro consacre un article à la récente recommandation de la Banque centrale européenne de conserver quelques dizaines d’euros en espèces en cas de crise. Interrogé par l’auteure de l’article, Philippe Crevel souscrit à ce conseil, estimant qu’il n’est pas illogique d’avoir une certaine somme d’argent sous son matelas pour des besoins urgents ». Cependant il alerte cette pratique doit rester limitée, « cela doit rester du dépannage »
Cité dans le média « Capital », le Directeur du Cercle de l’Epargne revient sur la rémunération de Livret A. « L’inflation est revenue autour de 0,80% sur un an, ce qui permet au Livret A de dégager un rendement réel (après inflation) de l’ordre de 1%. C’est un niveau relativement élevé par rapport à la moyenne de ces dix dernières années » . Il précise néanmoins qu’une nouvelle baisse est à attendre au 1er février 2026 si l’inflation demeure faible et que les taux directeurs enregistrent une nouvelle baisse.
Depuis l’évolution du régime fiscal du PEL et baisse de sa rémunération, ce produit initialement destiné à se constituer un pécule en vue d’acquérir son logement est en perte de vitesse. Dans Capital, Philippe Crevel rappelle que ce produit peut toujours présenter un intérêt pour ses détenteurs. Face à l’assurance vie qui bénéficie d’un régime fiscal attractif après 8 années de détention, conserver son PEL peut s’avérer pertinent si l’épargne investie doit être débloquée avant l’expiration de ce délai. Il précise en revanche que passé 8 ans, l’assurance vie remporte le match, offrant des potentiels de rémunérations supérieurs et un régime fiscal avantageux.
A l’occasion de la sortie, ce 25 septembre, de son dernier livre « Épargner mieux pour vivre mieux », publié aux Editions Solar, le Directeur du Cercle de l’Épargne est interviewé par Jeremy Michel,rédacteur en chef adjoint du média Lesfrancais.press.
Résultats du Livret A – LDDS – LEP en août 2025
Analyse de Philippe Crevel, Directeur du Cercle de l’Épargne
Au mois d’août, le Livret A a enregistré une collecte minime de 20 millions d’euros, quand celle du Livret de Développement Durable et Solidaire (LDDS) a atteint 150 millions d’euros. La collecte du Livret d’Épargne Populaire (LEP) s’est élevée, de son côté, à 330 millions d’euros. L’épargne réglementée digère la baisse de ses rendements intervenue le 1er août dernier, le taux du Livret A passant de 2,4 à 1,7 % et celui du LEP de 3,5 à 2,7 %.
Le Livret A sort, en août 2025, la tête tout juste de l’eau avec une collecte positive de 20 millions d’euros et évite la passe de deux après la décollecte de juillet (-70 millions d’euros). Logiquement, la collecte du mois d’août est correcte avec une moyenne, ces dix dernières années, de 1,76 milliard d’euros. Le cru 2025 est nettement inférieur à celui de l’année dernière (+1,5 milliard d’euros en 2024). Depuis 2009, deux décollectes seulement ont été constatées (août 2014 : -480 millions d’euros ; août 2015 : -410 millions d’euros).
Sur les huit premiers mois de l’année, la collecte ne s’est élevée qu’à 2,92 milliards d’euros, contre 13,21 milliards sur la même période en 2024, traduisant une réelle rupture. Les deux baisses du taux, passé de 3 à 1,7 % en 2025, se font ressentir durement sur la collecte, sans pour autant provoquer des retraits massifs.
L’encours du Livret A atteint, fin août 2025, 445,4 milliards d’euros, à 100 millions d’euros de son record.
Le LDDS fait preuve d’une bonne résilience avec une collecte positive de 150 millions d’euros, en décrue néanmoins par rapport à celle de juillet (340 millions d’euros). En août 2024, elle avait atteint 490 millions d’euros. Le résultat d’août, tout en étant positif, est inférieur à la moyenne de ces dix dernières années (420 millions d’euros). Le mois d’août réussit, par ailleurs, assez bien au LDDS avec une seule décollecte depuis 2009 (août 2009 : -20 millions d’euros).
Sur les huit premiers mois de l’année, la collecte s’est élevée, pour le LDDS, à 3,55 milliards d’euros, soit deux fois moins qu’en 2024 (6,10 milliards d’euros). L’encours du LDDS bat, en août, un nouveau record à 164,1 milliards d’euros.
Produit d’épargne souvent couplé au compte courant, le LDDS joue le rôle d’annexe rémunérée. Les ménages arbitrent entre consommation et épargne en utilisant en priorité le LDDS.
Pour le troisième mois consécutif, le LEP enregistre une collecte positive : 330 millions d’euros en août 2025, après 450 millions en juillet. Ce niveau est proche de celui observé en août 2024 (390 millions).
Néanmoins, de janvier à août 2025, la collecte reste négative (-1,64 milliard d’euros), alors qu’elle avait été positive de 5,37 milliards sur la même période en 2024.
Le LEP souffre moins que le Livret A de la baisse de son taux, passé de 3,5 % à 2,7 %. Son rendement reste un point au-dessus de celui du Livret A. Exonéré de prélèvements fiscaux et sociaux, le LEP demeure un placement extrêmement compétitif.
L’épargne réglementée plie mais ne rompt pas. Elle a encaissé une forte baisse de ses rendements le 1er août : -0,7 point pour le Livret A et -0,8 point pour le LEP. Pour autant, les ménages ont continué à y affecter une partie de leur épargne. Les encours sont à des niveaux élevés, voire record. Celui du Livret A est, en août, supérieur de plus de 146 milliards d’euros à son niveau de décembre 2019, avant la crise sanitaire. Les ménages français, toujours inquiets face à l’évolution de la situation économique et politique, maintiennent un fort volant d’épargne de précaution. De plus en plus, ils réorientent néanmoins une partie de leur épargne vers l’assurance vie qui propose des rendements supérieurs à ceux de l’épargne réglementée.
Compte tenu des hypothèses d’inflation et de taux d’intérêt, le rendement du Livret A pourrait être à nouveau revu à la baisse le 1er février prochain. Son taux pourrait être ramené à 1,4/1,5 % quand celui du LEP pourrait être révisé à 2,5 %.
ANNEXES



« La démographie, c’est le destin. » La maxime d’Alfred Sauvy résonne comme une sentence implacable au moment où l’Europe, la Chine et le Japon s’enfoncent dans la spirale du vieillissement. La population n’est pas une variable périphérique, elle est le moteur invisible de l’économie. Les Trente Glorieuses l’ont démontré : quand la jeunesse est forte, le prix des actifs financiers et immobiliers est orienté à la hausse. De 1946 à 1973, la France a vu naître chaque année plus de 850 000 enfants, propulsant la consommation, l’investissement et la croissance. Le PIB progressait alors de plus de 5 % par an. Aujourd’hui, la fécondité française s’effondre à 1,6 enfant par femme et le rapport cotisants/retraités s’est écroulé de 4 en 1960 à 1,7 en 2023. Sauvy l’avait prévenu : « Quand les jeunes manquent, c’est l’avenir qui s’étiole ». Le vieillissement ne se résume pas à des statistiques de l’INSEE ou de l’OCDE. Il change la nature même de l’économie. Une société dominée par les seniors privilégie la rente et la précaution, elle consomme moins, innove moins, prend moins de risques.
Deux forces conjuguées travaillent en profondeur : l’allongement de la vie et la chute des naissances. Dans la zone euro, le ratio de dépendance – rapport des plus de 65 ans aux actifs de 15 à 64 ans – est passé de 20 % en 1995 à 35 % aujourd’hui, et atteindra 55 % d’ici vingt ans. La Chine, hier championne du dividende démographique, s’enfonce désormais dans la même impasse. Le Japon, déjà au cœur du cyclone, en connaît les effets depuis trois décennies : croissance molle, stagnation des indices boursiers, effondrement des prix de l’immobilier hors métropoles. À l’inverse, l’Inde, encore jeune, bénéficie d’un socle démographique solide (fécondité supérieure à 2) qui soutient sa croissance et ses marchés.
Aux États-Unis, où l’immigration et une natalité moins déprimée entretiennent la dynamique, le S&P 500 a été multiplié par 7 depuis 1995. L’indice Sensex indien a bondi de 2 500 %. Pendant ce temps, l’Euro Stoxx 50 peine à tripler et le Nikkei japonais végète depuis 1990 malgré quelques sursauts. L’immobilier obéit à la même logique : envolée des prix américains et indiens, déprime persistante au Japon, crise ouverte en Chine, essoufflement en Europe.
Un retraité ne consomme pas comme un jeune actif. Il vend ses actifs immobiliers et financiers pour financer sa retraite. En face, une génération réduite d’acheteurs ne peut absorber cette offre croissante. L’excès structurel d’offre d’actifs devient une certitude. Certes, les mégapoles – Paris, Londres, Berlin – résistent grâce à la rareté foncière, aux règles d’urbanisme et aux achats étrangers. Mais ces digues ne tiendront pas éternellement. L’effet gravitationnel du vieillissement finira par peser. Cette mécanique est implacable : moins de jeunes pour acheter, plus de vieux pour vendre. Le « toujours plus » des marchés immobiliers et financiers est une illusion dans les économies vieillissantes. Le Japon a ouvert la voie, l’Europe et la Chine s’y engagent. Les investisseurs qui s’accrochent à la maxime « la pierre monte toujours » risquent d’avoir quelques surprises.
La conséquence est claire : les investisseurs européens ou japonais ne peuvent plus se contenter de transposer le passé. La démographie impose une réallocation géographique. Les zones jeunes – Inde, Asie du Sud-Est, Afrique demain, mais aussi États-Unis et Canada – concentreront la vitalité, l’innovation et donc la valorisation des actifs. La question migratoire, quant à elle, devient centrale. Pour compenser les effets du vieillissement, les Européens devront jouer la carte de la productivité. C’est une condition sine qua non pour éviter l’effondrement de la valeur des actifs.
Le vieillissement est une donnée structurelle, lourde, presque irréversible. Pourtant, rares sont les responsables politiques qui l’affrontent lucidement. La natalité européenne est en berne depuis cinquante ans et les politiques familiales n’ont pas réussi à enrayer la chute. Les promesses de pensions généreuses et de santé gratuite sont intenables à long terme dans une pyramide démographique inversée. Le vieillissement agit comme une force de gravité sur l’économie et les marchés. Il dévalorise les actifs, bride la croissance et installe une société de rente. Les États-Unis et l’Inde peuvent encore compter sur une jeunesse nombreuse quand l’Europe, le Japon et la Chine marchent sur une corde raide. Les investisseurs avisés doivent prendre en compte cette donne démographique.
Jean-Pierre Thomas
Président du Cercle de l’Épargne
contact@cercledelepargne.com