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Après l’arrêt sur image, la bataille du déconfinement commence

Economie 7 mai 2020

Au sein de l’OCDE, trois pays se démarquent au niveau du confinement et de ses conséquences économiques. La France, l’Italie et l’Espagne, trois pays comptant le plus de décès par le convid-19, ont mis en place des dispositifs stricts de confinement provoquant un arrêt brutal de l’activité. En revanche, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Europe du Nord et aux Etats-Unis, le confinement a été moins strict permettant de limiter la chute de l’activité.

Dès la première quinzaine de mars, les principales économies de la zone euro ont adopté des mesures de restriction de l’activité économique, dont les premières ont été instaurées le 11 mars en Italie, le 14 mars en Espagne et le 15 mars en France, afin d’endiguer la propagation du coronavirus. Le Royaume-Uni, le 23 mars, et les États-Unis, à partir du 19 mars et à des degrés variables selon les États, ont également pris des mesures pour endiguer l’épidémie. C’est aussi le cas du Japon qui a décrété l’état d’urgence le 7 avril.

Un arrêt sur image fort en France

En prenant en compte le caractère fragile des estimations de croissance, la France a connu le recul le plus important au sein de l’OCDE. Le PIB s’est contracté de 5,8 % au premier trimestre contre respectivement 5,2 et 4,7 % en Espagne et en Italie.  Pour les Etats-Unis, la baisse du PIB est de 1,2 % au premier trimestre ; selon le Congrès américain, le PIB pourrait chuter de 12 % au deuxième trimestre.

La baisse d’activité se matérialise par plusieurs indicateurs comme la baisse de la consommation d’énergie électrique ou  la fréquentation des lieux publics. L’Allemagne se distingue de ses partenaires par le maintien du niveau presque inchangé de sa consommation électrique. De même, la fréquentation des lieux publics, tant des commerces que des transports publics, y apparaît beaucoup moins affectée que dans les autres pays européens. L’utilisation des transports publics a baissé de  49 % en Allemagne contre environ 80 % en France, en Espagne et en Italie.

Cette différence entre l’Allemagne et les trois autres principales économies de la zone euro se retrouve également dans les données journalières de pollution de l’air mesurée par la concentration en dioxyde d’azote. Fin avril 2020, la concentration en dioxyde d’azote était de 29 % inférieure en Allemagne à celle de 2019 sur le même période, contre 45 % en France.  hors effets des conditions météorologiques, la concentration en dioxyde d’azote aurait diminué de près de 45% en France et en Italie en avril, contre une baisse de 51 % en Espagne et 21 % en Allemagne.

L’emploi, le défi des prochaines semaines

La crise commence à se faire ressentir sur les statistiques de l’emploi. En Espagne, le ministère du travail a enregistré une hausse d’un peu plus de 300 000. En France, selon Pôle Emploi, le nombre de demandeurs d’emploi (catégorie A) s’est accru de 243 000 en mars 2020, soit une hausse de 7,5 % par rapport à février. À la fin du premier trimestre 2020, l’emploi salarié du secteur privé en France chute de 2,3 %, soit plus de 450 000 destructions nettes d’emploi en un trimestre. Les entreprises françaises ont par ailleurs déposé des demandes d’activité partielle pour plus de la moitié des salariés du privé. En Allemagne, selon l’IAB (centre de recherches de l’Office pour l’emploi allemand), le nombre de demandeurs d’emploi devrait augmenter de 520 000 personnes sur l’ensemble de l’année 2020. Par ailleurs, selon une enquête de l’Université de Mannheim, la proportion des emplois en chômage partiel est passée de 3,4 % à 10,8 % entre mi-mars et mi-avril. Au Royaume-Uni, entre le 16 mars et le 13 avril, environ 1,8 millions de personnes ont demandé le versement du crédit universel, une allocation unique fusionnant plusieurs prestations sociales existant auparavant. Selon une enquête de l’Office for National Statistics, 27 % des salariés britanniques  auraient été mis en congé entre le 23 mars et le 5 avril. 40 % des entreprises ont réduit leurs effectifs et 29 % ont réduit les heures de travail.  Aux États-Unis, les nouvelles demandes d’indemnisation chômage entre le 15 mars et le 25 avril ont dépassé 30 millions (plus de 18 % de la population active et presque 19 % de la population en emploi). Face à cette forte augmentation des inscriptions à l’assurance chômage et à la paralysie d’une grande partie de l’activité économique,  plus Etats ont décidé d’atténuer les mesures de confinement, autorisant les commerces non essentiels à rouvrir. Selon le Congressional Budget Office, le taux de chômage devrait atteindre 16 % au troisième trimestre 2020.

La situation de la France au 7 mai

Au 7 mai 2020, selon l’INSEE, l’activité économique de France serait inférieure de l’ordre de 33 % à « la normale » (contre 35 % il y a deux semaines). La contraction atteint  39 % pour les seules branches marchandes (contre 41 % dans la précédente note de l’INSEE). Ce taux est de 46 % pour les branches marchandes hors loyers (contre 49 %).

La légère remontée de l’activité se poursuit depuis la mi-avril grâce à l’industrie dont la perte d’activité est estimée à –38 % (contre –43 % au 9 avril) et à la construction (–75 % contre –88 % au 9 avril). En revanche, la perte d’activité économique est estimée inchangée dans les services (de l’ordre de 36 %). Les écarts d’activité s’expliquent par la difficulté technique de recourir au travail à distance dans l’industrie et la construction. Avec la  mise en place les mesures de sécurité sanitaire permettant le retour des salariés concernés, certains établissement ont réouverts lors de quinze derniers jours.

La reprise qui interviendra après le 11 juin sera progressive. Les branches qui ne seraient de toute façon pas autorisées à reprendre tout de suite une activité « normale » (hébergement-restauration, activités culturelles et sportives, certains modes de transports etc.) représente environ 5 % du PIB et 5 points des 33 % de perte d’activité globale estimée au 7 mai.

Les deux semaines suivant la mise en place du confinement, la circulation du fret ferroviaire a baissé de près de 40 % en raison de la fermeture des usines. Depuis la fin avril, la proportion de trains augmente légèrement, en moyenne 67 % de trafic par rapport à une situation normale. Cette évolution traduit une petite reprise de l’activité économique, notamment dans l’industrie et la construction.

Les demandes de chômage partiel sont logiquement corrélés avec les baisses d’activité. Néanmoins, pour certaines branches, ce n’est pas le cas. Ainsi, dans l’industrie agroalimentaire, la perte d’activité estimée est de 5 % quand  près de 40 % de l’emploi salarié est concerné par de l’activité partielle. Inversement, la perte d’activité estimée dans la cokéfaction-raffinage est importante (de l’ordre de 55 %) tandis que peu de salariés sont concernés par l’activité partielle. Ces différences sont liées aux structures des entreprises et à leur mode d’organisation. Les grandes entreprises industrielles n’ont placé qu’une partie de leurs salariés en chômage partiel, les autres étant maintenus en activité à la différence des PME qui ont préféré fermer l’ensemble de leurs activités.

Selon l’INSEE ; dépenses de consommation finale des ménages seraient, au 7 mai 2020, inférieures de l’ordre de 32 % au niveau correspondant à une période « normale » d’activité. Fin mars, la contraction avait atteint 35 %. Les ménages sont amenés à reconstituer leurs stocks après deux mois de confinement. Une hausse des achats à distance de textile est constatée. Les parents ont été amenés à acheter des vêtements pour leurs enfants qui ont continué de grandir durant le confinement.

Les premiers effets du déconfinement

Fin avril, des pays comme l’Autriche, l’Allemagne et les Etats-Unis ont d’ores et déjà entamé un processus de déconfinement de la population et de levée des restrictions de l’activité.

En Allemagne, la première phase de déconfinement a été initiée au niveau fédéral le 20 avril avec la réouverture des commerces d’une surface inférieure à 800 m², ainsi que des concessionnaires, des vendeurs de vélos et des librairies sans condition de surface. Une deuxième phase a débuté le 4 mai avec la réouverture progressive des écoles et des salons de coiffure. La sortie du confinement dépend également des Länder. Ainsi, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, les commerces de proximité même non alimentaires accueillent les clients depuis le 20 avril quand la Bavière et Hambourg les ont maintenu fermés jusqu’au 27 avril. En Italie, seules les entreprises stratégiques et exportatrices ont pu reprendre leurs activités le 27 avril (comme certaines usines du groupe Fiat-Chrysler ou encore Valentino), et seulement après examen et accord de la préfecture. Le 4 mai, les branches de la chimie, des matières plastiques, de la métallurgie, des machines-outils, de la construction et des télécommunications ont été autorisées à reprendre leurs activités.

En Espagne, dès le 11 avril, les activités productives ont pu reprendre progressivement mais la population reste confinée jusqu’au 9 mai. Aux États-Unis, certains États, essentiellement des États du Sud des États-Unis et des grandes plaines (Alaska, Alabama, Colorado, Géorgie, Tennessee, Caroline du Sud, …) ont décidé de rouvrir les commerces non essentiels, dont certains dès le 21 avril.

Selon des premières données issues des requêtes effectuées sur Google, les ventes au détail atteindraient, en Allemagne, désormais 70 % de leur niveau dit normal. Pour les centres commercial, la baisse d’activité serait pour la dernière semaine d’avril de 35 % quand elle était de 70 % la semaine précédente. Au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis, en revanche, l’activité commerciale reste inférieure de 70 à 80 % par rapport à 2019 à la même époque.

La circulation routière dans les grandes villes allemandes aurait, selon l’INSEE, reprise depuis le 20 avril en prenant comme référence l’indice de congestion routière publié par TomTom. L’indice n’est que de 2 % inférieur à l’indice moyen en 2019 entre le 20 et le 27 avril, alors qu’il lui était inférieur de près de 34 % entre le 13 et 19 avril. Cette situation peut s’expliquer par un recours plus important de la voiture en raison des craintes de contamination dans les transports publics. En France, en Italie et en Espagne, les conditions de circulation ne changent que très modérément. Fin avril, l’indice de congestion y demeure entre 60 % et 75 % inférieur à l’indice moyen de 2019 contre une baisse comprise entre 66 % et 80 % la semaine qui précède. Au Royaume-Uni tout comme aux Etats-Unis, la circulation routière semble augmenter légèrement mais reste très inférieure aux conditions de 2019.

Le trafic aérien commercial de voyageurs reste au point mort dans la plupart des pays européens, hormis à nouveau l’Allemagne. Il est également au point mort au Royaume-Uni et aux Etats-Unis et il reste encore très au-dessous de la normale en Chine. Le trafic demeure quasi arrêté en France avec la fermeture symbole du 2e plus grand aérien, Orly.

Le rebond économique en France dépendra de la capacité des entreprises à reconstituer rapidement leurs stocks de biens intermédiaires ainsi qu’à leur possibilité d’appliquer au mieux les mesures sanitaires. Le principe de précaution transcende l’ensemble de la population. Les décideurs craignent de voir leur responsabilité engagée quand les actifs, toutes catégories sociales confondues craignent pour leur santé. Le psychodrame de la rentrée scolaire témoigne de ce climat. Le retour à un niveau correct d’activité dépendra de la levée des doutes sur la crise sanitaire.

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