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Le 27 septembre dernier, les députés Félicie Gérard et Charles de Courson ont présenté un rapport d’information sur la fiscalité de l’épargne retraite. Cinq ans après le lancement du Plan d’Épargne Retraite (PER), ils ont souhaité dresser un état des lieux et proposer des pistes de réforme.
Les rapporteurs reconnaissent que le Plan d’Épargne Retraite (PER) a permis une simplification du cadre juridique et fiscal, en créant un produit unifié regroupant trois compartiments :
Cette architecture unifiée remplace des dispositifs complexes et variés tels que le PERP, le contrat Madelin, la Préfon, l’UMR, le PERCO ou encore l’article 83 du Code général des impôts, qui posaient des problèmes de lisibilité pour les épargnants. Malgré un contexte difficile, le PER a connu une croissance rapide depuis son lancement. Son encours est passé de 5,9 milliards d’euros en janvier 2020 à 108,8 milliards en mars 2024. Cependant, l’épargne retraite reste relativement modeste en France, en particulier parmi les jeunes et les ménages à faibles revenus. Un quart des actifs seulement est couvert par un produit d’épargne retraite.
Le rapport d’information souligne que le PER bénéficie d’incitations fiscales intéressantes : une déduction sous plafond des versements du revenu imposable et des avantages en matière de succession. Cependant, les rapporteurs ont signalé que les ménages modestes étaient exclus du dispositif de déductibilité des cotisations sur le revenu. Le rapport préconise une évaluation des impacts de cette déductibilité, notamment sur les recettes fiscales à long terme, et suggère d’examiner des réformes pour rendre le dispositif plus attractif pour les foyers moins imposés. Les rapporteurs s’interrogent également sur la pertinence du dispositif, qui ressemble à celui de l’assurance vie, en cas de décès .
La déductibilité des cotisations à l’épargne retraite de l’assiette de l’impôt sur le revenu repose sur la nature même du produit. En effet, la logique de cette déduction est directement liée à l’objectif de constituer un supplément de revenus ou de capital en vue de la retraite. À l’instar des cotisations des régimes par répartition, celles des régimes supplémentaires de retraites sont déductibles dans la limite d’un certain plafond. Ce système est souvent critiqué au motif qu’il favoriserait les ménages aisés. À première vue, l’effet de la déduction est plus important pour les contribuables soumis aux taux les plus élevés du barème de l’impôt sur le revenu. Cependant, ces mêmes contribuables sont ceux dont le taux de remplacement (ratio pensions/derniers revenus d’activité) est le plus faible. Si le taux de remplacement moyen avoisine 75 % en France, il est d’environ 57 % pour les cadres et inférieur à 50 % pour les cadres supérieurs, les indépendants ou les professions libérales. Ce faible taux de remplacement découle du plafonnement des pensions des régimes obligatoires (50 % du plafond annuel de la Sécurité sociale pour le régime général de base – régime AGIRC/ARRCO cotisations perçues dans la limite de huit fois le plafond annuel de la Sécurité sociale). Ce plafonnement est jugé socialement juste, car, sans lui, les personnes à hauts revenus, qui ont souvent une espérance de vie supérieure à la moyenne, auraient bénéficié davantage des régimes obligatoires que les personnes à revenus modestes. La déductibilité des régimes supplémentaires par capitalisation constitue une compensation partielle à ce plafonnement.
Pour améliorer la diffusion du PER auprès des personnes à revenus modestes, les rapporteurs proposent d’ajuster les taux de contribution sociale généralisée (CSG) pour les rentes viagères.
Les rapporteurs estiment que les PER collectifs et obligatoires mis en place au sein des entreprises représentent une solution adaptée pour démocratiser l’épargne retraite parmi les ménages modestes. Le rapport suggère de rendre obligatoire la mise en place d’un PERECO dans les entreprises de plus de 11 salariés, sans pour autant contraindre employeurs et salariés à y verser des contributions. Cette mesure viserait à rendre l’épargne retraite plus accessible à des catégories de salariés qui en sont encore largement exclues. Il pourrait également être envisagé des accords de branche visant à généraliser les PER.
Les rapporteurs s’interrogent sur la pertinence du dispositif fiscal en cas de décès du titulaire. À l’instar de l’assurance vie, si le décès intervient avant 70 ans, la valeur de rachat du contrat est transmise aux bénéficiaires désignés, qui peuvent recevoir :
Si le décès de l’adhérent intervient après 70 ans, les droits de succession s’appliquent sur le montant total des sommes capitalisées, après un abattement de 30 500 euros. Cet abattement est commun à tous les bénéficiaires désignés et à l’ensemble des contrats souscrits par le titulaire (assurance vie et PER, si l’adhérent possède les deux). Néanmoins, si le bénéficiaire est le conjoint, il n’aura aucun droit à payer.
Les rapporteurs soupçonnent que des souscriptions de PER soient effectuées dans le but de réduire les droits de succession. Ils soulignent que les titulaires et les héritiers bénéficient d’un double avantage, avec d’un côté la déductibilité des versements individuels et de l’autre une possible réduction des droits de succession. Le dispositif choisi par le législateur visait à aligner le régime du PER sur celui de l’assurance vie.
Le rapport recommande d’interdire la souscription d’un PER au-delà de 67 ans et de prévoir un dénouement automatique à 70 ans, afin d’éviter des stratégies d’optimisation fiscale liées à la transmission patrimoniale. Faut-il fixer une date butoir ? Des assurés peuvent faire le choix de ne pas liquider leur PER en vue de le réserver à un éventuel problème de dépendance. Certains titulaires continuent de travailler et peuvent de ce fait décider de continuer à affecter une partie de leur rémunération professionnelle à leur PER.
Selon le rapport, le PER souffre également de la concurrence directe avec des produits plus connus des épargnants, tels que l’assurance vie. Les rapporteurs s’interrogent sur la nécessité d’adapter la fiscalité de l’assurance vie afin de rendre le PER plus compétitif. La France manque d’épargne de long terme investie en actions. Faut-il pénaliser l’assurance vie qui joue un rôle clé dans le financement de l’économie, et notamment de l’État ?
La loi PACTE a accru les obligations d’information des titulaires de PER qui ont désormais accès aux rendements des supports ainsi qu’à une évaluation de leur future rente. Cependant, plus les informations fournies sont nombreuses, plus il devient difficile pour les titulaires de les appréhender réellement. En la matière, l’excès nuit à la clarté.
Pour rendre l’épargne retraite plus attractive, les épargnants doivent pouvoir accéder à une information claire et détaillée sur les différents produits disponibles, leurs coûts, leurs rendements et les avantages fiscaux associés. Le rapport recommande ainsi la généralisation d’outils interactifs permettant de comparer les offres sur le marché et de suivre les performances réelles des PER.
Le PER vient tout juste d’avoir cinq ans. N’est-il pas trop tôt pour envisager une réforme qui pourrait déstabiliser les potentiels souscripteurs ? La stabilité juridique et fiscale est, pour tout produit d’épargne, un gage de succès. Modifier les règles dans les premières années de son existence risque de nuire à l’essor du PER. Cette nécessité de stabilité s’impose d’autant plus qu’il doit prouver sa capacité de diffusion, sans transferts en provenance des anciens produits, au sein de la population. Les premières années ont été, en effet, marquées par les transferts des PERP, des contrats Madelin, des PERCO, des article 83 sur les nouveaux PER. Ceux-ci ayant été en grande partie réalisées, le PER amorce une nouvelle étape de sa croissance.
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