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Près des trois quarts des Français déclarent mettre de l’argent de côté chaque mois par précaution, pour financer de futures dépenses, pour préparer leur retraite ou pour transmettre à leurs proches. Les épargnants sont le premier parti de France. Ils ne s’expriment guère, pourtant ils supportent les aléas de la conjoncture, les évolutions de la fiscalité et les modifications permanentes de la réglementation. Ils sont dénigrés, accusés de privilégier des produits peu rentables qui financent peu ou mal l’économie. Ils sont taxés de comportements spéculatifs. Ils peuvent être vilipendés car ils s’enrichissent en dormant. En ne dépensant pas leur argent, ils nuisent à la consommation et donc à la croissance. En quelques mots, il faut les enfermer. Ce peuple des épargnants est néanmoins indispensable pour combler les déficits publics de plus en plus élevés. Il est appelé à l’aide pour financer la transition énergétique.
L’épargne est le moteur du crédit, des fonds propres des entreprises. Elle est le cœur du réacteur de l’économie. L’épargne d’aujourd’hui est l’investissement de demain et les emplois d’après-demain pour paraphraser l’ancien Chancelier allemand Helmut Schmidt. Au lieu de stigmatiser les épargnants, il faudrait les choyer. En France, il est de bon ton de répéter que les épargnants ne savent pas épargner, qu’il faut que l’État leur tienne en permanence la main. La France s’est ainsi dotée d’une imposante épargne réglementée, plus de 800 milliards d’euros, qui n’existe nulle part ailleurs. L’État a créé une kyrielle de produits qui sont autant de niches fiscales qui érodent le rendement des impôts, obligeant les pouvoirs publics, pour compenser les pertes, à en créer d’autres. L’épargnant français exploite au mieux les arcanes de la réglementation ; il est agile et pragmatique. Il est passé des SICAV monétaires, à fort rendement et peu fiscalisées à la fin des années 1980, aux fonds euros de l’assurance vie dans les années 1990-2000. Aujourd’hui, ils privilégient le Livret A qui rapporte sans risque 3 %. Leurs choix sont en phase avec leurs priorités, sécurité et liquidité, fiscalité la plus faible possible.
Les épargnants français sont-ils financièrement bien traités ? En raison du tropisme de l’épargne réglementée, ils passent bien souvent à côté de placements plus rémunérateurs qui font la joie de leurs homologues néerlandais, britanniques ou américains. Dans ces pays, l’aversion aux risques y est certes plus faible et la concurrence entre les établissements financiers plus élevée. L’épargne plus rare aux États-Unis qu’en France est donc plus recherchée et mieux rémunérée comme le prouve le nouveau livret d’épargne d’Apple qui propose du 4,15 % annuel. L’épargnant français pourrait sans nul doute accéder à des produits plus rémunérateurs si l’accès au non coté était démocratisé ou si l’offre en produits structurés était étoffée. Mais, au-delà des produits, ce sont les épargnants qui décideront et en la matière, ils ont toujours raison.
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