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Les Français et la pierre

Epargne 7 juin 2023

Questions à Philippe Crevel, Directeur du Cercle de l’Epargne – Juin 2023

L’immobilier demeure-t-il une priorité sur le plan patrimonial pour les ménages ?

La dernière enquête AG2R LA MONDIALE – AMPHITÉA – CERCLE DE L’ÉPARGNE confirme que les Français placent toujours l’immobilier au centre de leurs préoccupations même si, avec l’inflation, le maintien d’un fort volant d’épargne de précaution est en 2023, la préoccupation numéro 1. Les Français estiment que la possession de la résidence principale est la meilleure solution pour préparer financièrement sa retraite. Le patrimoine non financier des ménages qui s’élevait, en 2021, à 9 933 milliards d’euros était consacré, pour plus de 4 200 milliards d’euros, aux logements. 61 % des ménages détiennent au moins un appartement ou une maison. Le taux de possession de la résidence principale qui a longtemps progressé stagne depuis 2009. Il est passé ainsi de 43 % en 1968 à 58 % en 2009. Il était de 57,5 % en 2021. L’augmentation du prix des logements qui a doublé en une vingtaine d’années réduit les possibilités pour les jeunes ménages et les primo-accédants d’acheter un bien immobilier. La hausse des taux d’intérêt qui s’est amorcée à compter de l’été 2022, doublée d’un durcissement des conditions d’accès aux prêts n’a fait que renforcer les difficultés d’accession à la propriété pour une part croissante de la population française. Les jeunes sont de plus en plus nombreux à estimer que la pierre n’est plus la clef de voûte du patrimoine. Son prix explique cette évolution ainsi qu’une plus forte appétence à la mobilité. Pour les plus de 35 ans, en revanche, l’investissement immobilier locatif et la pierre papier sont au cœur des préoccupations patrimoniales. Ces dernières années, un processus de concentration dans l’immobilier locatif s’est opéré. 3,5 % des ménages détiennent, selon l’INSEE, 50 % des biens loués. Un quart des ménages sont, en France, propriétaires de plus des deux tiers des logements possédés par des particuliers.

La pierre papier attire un nombre de plus en plus important d’épargnants. Quelles sont les raisons de ce succès ?

La collecte nette des fonds immobiliers accessibles au grand public a atteint, en 2022, selon l’Association Française des Sociétés de Placement Immobilier (ASPIM), un niveau record de 16,1 milliards d’euros, en hausse de 47 % sur un an. Le principal vecteur de la collecte pierre papier est assuré par les Sociétés civiles de placement immobilier (SCPI). La collecte de ces dernières a atteint 10,2 milliards d’euros en 2022 soit 60 % de la collecte totale. Elle a progressé de 37 % par rapport à l’année 2021 et a dépassé de 9 % le précédent record de 2019. La pierre papier doit son succès à sa simplicité et son rendement. Les ménages qui acquièrent des parts d’OPCI ou de SCPI sont délestés des contraintes inhérentes à la gestion des biens immobiliers (locataires, entretien, etc.). Ils bénéficient de l’effet de mutualisation qu’offre le passage par des fonds ou des SCPI. Ils sont également attirés par la rentabilité qu’offre ce type de placement, plus de 4 % en moyenne, ces dernières années. Ces derniers sont, en outre, logeables dans des contrats d’assurance vie ou des Plans d’Épargne Retraite. Une part croissante de la collecte s’effectue via les unités de compte. En tenant compte de la détention de ces dernières, le nombre d’épargnants détenant des parts de fonds immobiliers non cotés atteint 4 millions.

La rentabilité des placements immobiliers n’est-elle pas mal appréciée par les épargnants ?

La rentabilité d’un investissement locatif est plus complexe à calculer que celle d’un livret bancaire, d’un fonds euros ou d’une action. Le rendement locatif « brut – brut » correspond au ratio des loyers perçus par rapport au prix d’acquisition du bien incluant les frais de notaire, le cas échéant, les intérêts des crédits et le montant des éventuels travaux réalisés. Le rendement net est calculé en déduisant des loyers les charges (charges de copropriété et assurances). Pour avoir une vision fine, le bailleur doit calculer son rendement net après impôt (impôt sur le revenu et taxe foncière). La rentabilité d’un bien locatif dépend donc de nombreux critères, le prix d’achat, le montant des loyers et des charges ainsi que celui des impôts. Plus le prix d’acquisition est élevé, plus la rentabilité risque d’être faible. L’état de la demande locative influe, par ailleurs, sur le montant du loyer et sur le taux d’occupation. Le choix du régime fiscal peut également avoir une incidence sur le rendement de l’investissement. L’investisseur peut bénéficier d’un système de réduction d’impôt (Pinel), choisir le régime du microfoncier ou opter par exemple pour le régime de la location meublée non professionnelle qui permet d’amortir fiscalement son bien. L’écart de rendement entre les villes et en fonction des biens est important. La rentabilité brute moyenne se situe autour de 5 %. En net, elle avoisine 3 %, sachant que dans certaines agglomérations, elle peut être proche de 1 %.

Des publicités mettent en avant des rendements autour de 10 %, faut-il se méfier ?

Certaines villes peuvent s’illustrer par des prix d’acquisition faibles, pour des biens fortement demandés (types studio, deux ou trois pièces), et offrir ainsi des rendements élevés, mais cela demeure l’exception. Il convient ainsi de se méfier comme pour tout placement des promesses qui sortent de l’ordinaire. Il faut avoir en tête que les professionnels de l’immobilier dans le cadre de la gestion d’actifs immobiliers (bureaux, centres de logistiques, des commerces, centres commerciaux) dégagent des rentabilités de 5 à 8 %.

La hausse des taux d’intérêt remet-elle en cause les placements immobiliers ?

La hausse des taux renchérit le coût d’acquisition et dégrade par ricochet la rentabilité de l’investissement locatif. Les loyers ont vocation à suivre l’inflation mais le gouvernement a introduit un mécanisme de plafonnement à 3,5 %. Cette mesure censée s’achever le 30 juin pourrait être prorogée jusqu’à la fin de 2024. L’autre facteur à prendre en compte en ce qui concerne la rentabilité de l’investissement est l’appréciation des biens immobiliers. La forte augmentation de leur valeur permettait de dégager d’importantes plus-values qui s’ajoutaient aux revenus. Or, avec la hausse des taux, les prix sont, en France, en léger recul. Ce phénomène pourrait se poursuivre sur l’ensemble de l’année 2023. Si pour le moment, un krach immobilier ne semble pas d’actualité, une légère correction est attendue après de nombreuses années de hausses rapides.

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