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A priori, cela ressemble à un paradoxe : le taux d’épargne des ménages français reste élevé malgré l’inflation et l’érosion du pouvoir d’achat. Dans sa note de conjoncture du 15 juin 2023, l’INSEE prévoit un taux d’épargne de 18,1 % du revenu disponible brut cette année, contre 17,5 % en 2022. Ce taux d’épargne reste nettement supérieur à son niveau d’avant la crise sanitaire (15 %).
Cercle de l’Épargne – données INSEE
En 2023, toujours selon l’INSEE, le pouvoir d’achat par unité de consommation devrait être étale après avoir baissé de 0,4 % en 2022. Le maintien d’un fort taux d’épargne s’effectue au détriment de la consommation. En 2023, celle-ci devrait baisser de 0,2 %. La contraction atteint 6,6 % pour les produits agricoles et 3,5 % pour les produits manufacturés. En revanche, les services sont préservés avec une hausse de 2,7 % (les dépenses de transports augmentent du fait de l’inflation de plus de 6 %). Cette baisse de la consommation prévue par l’INSEE confirme les résultats de l’enquête d’AG2R LA MONDIALE – AMPHITEA – Cercle de l’Épargne (réalisée par l’IFOP) d’avril 2023. 43 % des sondés déclaraient vouloir réduire leurs dépenses de consommation quand seulement 13 % pensaient puiser dans leur épargne. Par ailleurs, les ménages ont fortement réduit leurs dépenses d’investissement, ce qui leur permet d’épargner davantage.
Cercle de l’Épargne – données enquête 2023 AG2R LA MONDIALE – AMPHITEA – CERCLE DE L’ÉPARGNE – IFOP – CECOP
Cette propension à l’épargne témoigne de la persistance d’un fort niveau d’inquiétude chez les Français confirmé, mois après mois, par le faible indice de confiance des ménages. Craignant que la situation économique ne continue à se dégrader, ils préfèrent mettre de l’argent de côté. L’épargne de précaution prédomine, comme en témoigne la forte collecte du Livret A (plus de 24 milliards d’euros sur les cinq premiers mois de 2023) et la modestie de la collecte de l’assurance vie sur la même période. Cette volonté de disposer d’une importante épargne de court terme vise à faire face à des achats dont le montant pourrait encore augmenter en raison de la poursuite de l’inflation.
D’autres facteurs anxiogènes sont également à prendre en compte comme la transition énergétique ou la situation géopolitique. Le vieillissement démographique qui est de nature structurelle contribue également à la hausse de l’épargne qui avait commencé avant la crise sanitaire. Le poids des personnes de plus de 45 ans au sein de la population augmente, or ces tranches d’âge sont celles qui préparent financièrement leur retraite en épargnant. Toujours selon l’enquête d’AG2R LA MONDIALE – AMPHITEA – Cercle de l’Épargne, 72 % des Français en âge de travailler estiment que leurs pensions ne suffiront pas pour vivre correctement et 59 % mettent de l’argent de côté pour leur retraite.
Pour autant, les ménages sont conscients de la dépréciation de leur patrimoine du fait de l’inflation. 40 % des sondés selon le sondage précité au-dessus estiment que leur patrimoine s’est déprécié.
Cercle de l’Épargne – données enquête 2023 AG2R LA MONDIALE – AMPHITEA – CERCLE DE L’ÉPARGNE – IFOP – CECOP
Cercle de l’Épargne – données enquête 2023 AG2R LA MONDIALE – AMPHITEA – CERCLE DE L’ÉPARGNE – IFOP – CECOP
Même si le rendement réel des livrets reste négatif (sauf pour le Livret d’épargne populaire), les ménages ont accru leurs versements dès les annonces de relèvement des taux. Sur le premier trimestre, le Livret A a ainsi obtenu sa meilleure collecte depuis 2009.
La baisse de l’inflation attendue au cours du second semestre devrait conduire les ménages à relâcher leurs efforts en matière d’épargne en se faisant davantage plaisir. Les dépenses de consommation pourraient repartir alors à la hausse. En privilégiant l’épargne, les Français se distinguent des Américains qui restent des adeptes invétérés de la consommation. Ils ont en grande partie épuisé leur cagnotte covid quand les Français, en moyenne, n’y touchent pas. Il faut, en effet, souligner que les 20 % des Français les plus modestes ont été contraints de ponctionner leur épargne pour faire face à la hausse des prix. Ce sont les 40 % les plus riches et surtout les 20 % disposant les revenus les plus élevés qui, en France, placent leur argent sur des produits financiers.
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