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L’épargne, miroir des inquiétudes et des espoirs

Epargne 11 septembre 2025

Cet article est une analyse du dernier rapport de l’épargne réglementée de la Banque de France publié au mois de juillet 2025.

Le taux d’épargne des ménages bat des records en France. En 2024, il s’élevait à 18 % du revenu disponible brut, soit trois points au-dessus de son niveau d’avant crise sanitaire. C’est l’un des plus hauts niveaux d’Europe, loin devant l’Espagne (11 %) ou l’Italie (13 %). Les ménages quelle que soit la situation mettent de l’argent de côté : inflation ou pas inflation, recul ou pas de leur niveau de vie… L’épargne est une valeur refuge, elle joue ce rôle de rempart contre l’incertitude, contre les tempêtes économiques. Mais l’épargne est avant tout un moteur clef de l’investissement. Elle permet le financement de l’économie, des acteurs privés comme publics.

L’année 2024 : une année encore placée sous le sceau de l’épargne

En 2024, les flux nets de placements ont atteint 112,8 milliards d’euros traduisant la persistance d’un fort effort d’épargne notamment de précaution. L’épargne financière des ménages représentait, en 2024, plus de 6 350 milliards d’euros d’encours, soit près de 2,2 fois le PIB national.

 Les encours en produits de fonds propres ont en 2024, stagné à 2 420 milliards d’euros. Les produits de taux – dépôts, livrets, assurance vie en euros – poursuivent leur progression avec un encours de 3 856 milliards d’euros (+2,5 %). Les flux nets vers ces supports ont atteint 73,1 milliards d’euros, soit deux fois ceux orientés vers les fonds propres.

L’épargne réglementée toujours en pointe

La France se distingue dans l’univers des économies développées par l’importance de l’épargne réglementée. Les ménages ont accès à un grand nombre de produits bénéficiant d’une garantie de l’État et dont les rendements sont fixés par ce dernier. Cet héritage historique – fruit à la fois de l’invention du livret A en 1818 et des politiques de démocratisation financière du XXᵉ siècle – reste très prégnant dans la culture financière du pays.

En 2024, l’encours de l’épargne réglementée atteint 956 milliards d’euros, en hausse de 2,2 %. Cela représente 15 % du patrimoine financier des ménages. En Allemagne, ces produits ne représentent que 8 % de l’épargne financière. Aux États-Unis, l’épargne liquide de type réglementée est quasi inexistante.

Le Livret A : le produit d’épargne le plus diffusé en France

En 2024, l’encours du livret A a atteint 432 milliards d’euros, en hausse de 7 % sur un an. 83 % des Français en détiennent un, soit 58 millions de livrets. Le produit reste universel : il est détenu aussi bien par des étudiants que par des retraités, des cadres supérieurs comme des ouvriers.

La collecte nette (hors intérêts) s’est élevée à 15 milliards d’euros en 2024. C’est un chiffre important, mais qui traduit un ralentissement par rapport aux années 2020-2022, marquées par des flux annuels proches de 30 milliards d’euros en lien avec la crise sanitaire.

Depuis 2015, l’encours moyen du livret A détenu par les personnes physiques est en augmentation en lien avec les bons résultats de la collecte. En 2024, il s’élevait à 7 482 euros, soit une augmentation de plus de 400 euros par rapport à 2023.

La proportion des comptes dont l’encours dépasse le plafond de 22 950 euros augmente depuis 2013. En 2024, 15 % des livrets A sont au-delà du plafond, une proportion en hausse de 2 points par rapport à 2023. Ces derniers représentent 47 % de l’encours en 2024, contre 43 % l’année précédente.

Les épargnants de plus de 65 ans détiennent 22 % des livrets A représentant 35 % des encours, ce qui correspond à leur poids dans la population. A contrario, le nombre de livrets détenus par des mineurs continue de diminuer légèrement (-2 %).

57 % des livrets A ont plus de dix ans, et concentrent 63 % de l’encours. Les mouvements observés sur les livrets A sont, en 2024, légèrement plus importants que ceux qui ont été constatés en 2023. Si sur les livrets A actifs, les versements restent de même ampleur que les années précédentes, une légère hausse du nombre de retraits (6,7 retraits en moyenne par an, contre 6 en 2023) est constatée. Les montants moyens versés ou retirés sur les livrets A actifs diminuent à respectivement 658 euros et 489 euros.

Quant au nombre de livrets A inactifs (pas de versement ou un retrait – depuis au moins cinq ans), il reste stable par rapport à 2023, à 4,8 millions. Ces livrets représentent un encours de 17,8 milliards d’euros, en hausse par rapport à 2023. 73 % de ces comptes inactifs ont un encours inférieur à 150 euros.

Le Livret de Développement Durable et Solidaire (LDDS) – le petit frère du livret A

Le LDDS poursuit sa progression, avec un encours de 160 milliards d’euros en 2024 (+7 %). Son profil est similaire à celui du livret A : liquide, garanti, défiscalisé, et rémunéré au même taux. Son image est moins ancrée dans l’opinion publique en raison de sa naissance plus tardive en 1983.

Au 31 décembre 2024, le nombre de LDDS s’élevait à 26,3 millions, en progression de 2,7 % par rapport à 2023 et de 6 % sur deux ans, soit deux fois plus que les livrets A détenus par les personnes physiques sur la même période (+3,3 % sur deux ans).

Le taux de détention dans la population de plus de 18 ans augmente en conséquence et atteint 48,2 %, bien inférieur cependant à celui du livret A (82 %). Les versements en 2024 ont atteint 64 milliards d’euros et les retraits 59 milliards d’euros, le niveau le plus élevé depuis 2012.

La progression de l’encours moyen du LDDS est continue depuis 2009, et atteint 6 086 euros fin 2024. Le nombre de livrets parvenus au plafond réglementaire de 12 000 euros concerne désormais presque 8 millions de comptes, soit 30 % des LDDS. Ces livrets représentent 63 % des encours.

Les détenteurs de moins de 45 ans restent sous-représentés par rapport à leur poids dans la population totale, tant en encours qu’en nombre. Inversement, la part des plus de 65 ans augmente tant en nombre qu’en encours. Par ailleurs, les LDDS de plus de dix ans représentent 55 % des livrets pour 57 % de l’encours.

Pour la première fois depuis 2021, le nombre et l’encours des LDDS inactifs – c’est-à-dire sans un versement ou un retrait depuis au moins cinq ans – sont en hausse et s’établissent à 1,1 million de livrets pour 6 millions d’euros d’encours. Le nombre moyen de mouvements sur les LDDS reste stable, avec environ un mouvement tous les deux mois. Les montants moyens versés et retirés sont toutefois légèrement à la baisse.

Le Livret d’Épargne Populaire (LEP) en forte progression

L’encours en 2024 du Plan d’Épargne Populaire a progressé de 14,4 % pour atteindre 82 milliards d’euros. Il y a désormais plus de 12 millions de personnes qui ont un LEP. Le LEP est devenu la figure de proue de l’épargne populaire. Le taux de détention des personnes majeures s’est établi, en 2024 à 21,8 %, en hausse de 1,6 point par rapport à 2023. Sur les 31 millions de personnes éligibles en 2024, 38 % sont détentrices d’un LEP, soit 5 points de plus qu’en 2023.

La collecte brute, en 2024 s’est élevée à 27,4 milliards d’euros. Du fait d’importants retraits, la collecte nette a reculé en 2024 à 5,6 milliards d’euros contre 16,6 milliards en 2023, L’encours moyen du LEP s’établit à 6 912 euros, toujours en hausse par rapport à 2023.

En 2024, 39 % des LEP avaient dépassé le nouveau plafond réglementaire de 10 000 euros, ce qui représente 62 % des encours. 28 % des LEP ont a contrario un encours inférieur à 3 000 euros. Le nombre moyen de mouvements constatés sur les LEP actifs est en hausse, avec plus d’un mouvement tous les mois (6,1 versements et 6,9 retraits par an). Les comptes inactifs, c’est-à-dire sans un versement ou un retrait depuis au moins cinq ans, représentent un peu moins de 7 % des LEP ouverts depuis plus de cinq ans (contre 8 % en 2023), et un encours de près de 3,2 milliards d’euros, en baisse par rapport à 2023.

Le recul du Plan d’Épargne Logement

Le nombre de PEL était, en 2024, de 9 millions, en baisse de 9 % par rapport à 2023.

Le taux de détention des personnes physiques poursuit ainsi sa décrue et n’est plus que de 13,3 % en 2024, contre 24 % en 2016. L’encours est également en recul. Il s’élevait à 226 milliards d’euros fin 2024 en baisse de 12 % en un an. La décollecte nette (hors intérêts) a été de 37,7 milliards d’euros.

Depuis le 1er mars 2011, tous les PEL ouverts sont automatiquement fermés au bout de quinze ans. À partir de 2026, les générations de PEL concernées seront progressivement transformées en livrets bancaires ordinaires. Ces PEL, 6,7 millions représentent un encours 142 milliards d’euros, soit 62 % de l’encours total des PEL, et les trois quarts des plans.

L’encours moyen d’un PEL diminue légèrement à 25 017 euros. 12 % de PEL sont au-dessus du plafond de 61 200 euros représentante 38 % du total de l’encours. La détention par tranches d’âge, en nombre de PEL, est assez proche de la structure de la population. Les encours restent concentrés sur les populations plus âgées, au-delà de 45 ans, qui sont traditionnellement en mesure d’épargner davantage que les plus jeunes.

Le coût fiscal et social de l’épargne réglementée

En 2024, la dépense fiscale et sociale associée aux livrets réglementés est évaluée à 3,667 milliards d’euros. Elle se décompose ainsi :

  • 1,03 milliard d’euros au titre de l’exonération d’impôt sur le revenu des intérêts du Livret A (et livret bleu) ;
  • 384 millions pour le LDDS ;
  • 145 millions d’euros pour le LEP ;
  • 426 millions d’euros pour l’épargne-logement (intérêts et primes) ;
  • 11 millions d’euros pour les livrets jeunes ;
  • 101 millions d’euros pour les Plans d’Épargne Populaire (PEP) ;
  • 1,57 milliard d’euros d’exonérations sociales (CSG/CRDS) sur les intérêts du Livret A, LDDS, LEP, livret jeune et Livret d’Épargne Entreprise.

Rapporté à l’encours total d’épargne réglementée (956 milliards d’euros en 2024), le manque à gagner fiscal et social en représente moins de 0,4 %. En d’autres termes, 1 euro de dépense fiscale et sociale soutient près de 260 euros d’encours.

À quoi sert l’épargne réglementée ?

Le Livret A n’est pas un bas de laine tout comme le LDDS ou le LEP. Tous ces produits d’épargne contribuent au financement de l’économie.

Une part non négligeable de l’argent collecté par ces livrets est centralisée sur la Caisse des dépôts et consignations. Ainsi 31 décembre 2024, l’encours centralisé (Livret A, LDDS, LEP) atteint 397,2 milliards d’euros dont 356,1 milliards d’euros pour Livret A + LDDS et 41,1 milliards d’euros pour le LEP. La progression des encours centralisés a augmenté la taille du bilan du Fonds d’épargne et permis de porter l’encours global de prêts à 218,4 milliards d’euros (+6,9 % en 2024).

Les fonds centralisés servent des prêts à long terme au logement social/ville, au secteur public local, à la transition écologique. Les fonds non centralisés doivent, pour 80 %, aller aux PME, et au moins les trois quarts de l’augmentation d’encours non centralisé doivent financer des nouveaux prêts aux PME (obligations réglementaires).

Cœur historique de la mission du Fonds d’épargne de la Caisse des dépôts, le logement social connaît en 2024 un niveau de production exceptionnel. Les prêts « logement social/ville » atteignent, en encours, 193 milliards d’euros (+7 %, plus forte hausse depuis 2008). 20,8 milliards d’euros ont été mobilisés pour financer 107 804 logements sociaux neufs (+29 % par rapport à 2023) et réhabiliter 108 923 logements (+3 %).

La transition écologique devient l’autre grand pilier de l’emploi des fonds centralisés. En 2024, le Fonds d’épargne a octroyé 9,6 milliards d’euros de prêts « verts » (dont 6,1 milliards d’euros au logement social et 3,6 milliards d’euros au secteur public local), auxquels s’ajoutent 2,2 milliards d’euros de refinancement de nouveaux crédits bancaires contribuant à la transformation énergétique (rénovation thermique du parc privé, eau, mobilités propres, etc.). 34,6 % du flux annuel de prêts du Fonds d’épargne sont orientés vers la transition écologique. L’encours des crédits liés à celle-ci a atteint 245 milliards d’euros.

Les PME sont les grandes bénéficiaires de la part non centralisée de l’épargne réglementée. En 2024, les crédits nouveaux aux PME se sont élevés à 117 milliards d’euros. L’encours total de crédits aux PME est resté stable à 568 milliards d’euros (progression des crédits d’investissement et immobiliers compensant la baisse des lignes de trésorerie).

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L’épargne réglementée apparaît, en 2024, telle qu’elle est depuis deux siècles : une force tranquille. Tranquille, parce qu’elle rassure : 956 milliards d’euros d’encours, plus de 15 % du patrimoine financier des ménages, une rémunération nette d’impôt qui protège l’épargne de précaution. 193 milliards d’euros de prêts au logement social/ville, 245 milliards d’euros de prêts à la transition écologique et 568 milliards d’euros de crédits aux PME avec un coût fiscal d’environ 4 milliards d’euros.

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