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Depuis quinze ans, les crises se succèdent à un rythme effréné. Des subprimes à la guerre en Ukraine en passant par le réchauffement climatique, la crise des dettes souveraines et le covid, les ménages comme les entreprises sont mis à rude épreuve. Si la résilience des acteurs est censée se renforcer, elle ne préserve pas de la montée des tentations populistes qui rappellent celles qui avaient cours dans l’entre-deux-guerres. En période de troubles, il ne faut pas succomber à la tentation du fatalisme ou à celle du déclin. Il est facile de répéter, à l’image de nombreux médias, que l’enfer nous est promis demain. Pour autant, nous avons entre les mains les moyens de changer la donne. Depuis vingt ans, en Occident et tout particulièrement en Europe, une lancinante stagnation s’est installée sur fond de baisse des gains de productivité. Si pour certains, cette situation est le fruit d’un épuisement des forces créatrices après deux siècles de forte croissance, pour d’autres, elle est le produit d’une mauvaise utilisation des facteurs de production. Les capitaux, c’est-à-dire l’épargne, ne sont pas affectés de manière optimale à des activités à création de richesses utiles quand le travail et le progrès technique n’ont plus bonne presse. Le risque de pénurie énergétique provoqué par la guerre en Ukraine prouve que la voie de l’attrition ou de la décroissance est synonyme de drames économiques et sociaux. Pour sortir des ornières dans lesquelles se meut l’économie mondiale, une vision cartésienne des problèmes s’impose. Pour lutter contre le réchauffement climatique, si la décarbonation des activités apparaît comme une ardente obligation, elle doit se faire de manière scientifique. Il faut mobiliser l’épargne en faveur de solutions technologiques. L’augmentation de l’espérance de vie, l’amélioration des conditions de vie, depuis le milieu du XVIIIe siècle, sont essentiellement le produit des innovations scientifiques. Pour assurer la pérennité des progrès réalisés et en générer de nouveaux, une mobilisation de l’épargne en faveur des inventeurs, des créateurs, des chercheurs, est indispensable. L’Union européenne devrait favoriser l’émergence d’un grand marché unifié du non-coté avec l’appui de fonds européens, regroupant des entreprises innovantes. Une initiative sur le modèle du plan Eureka des années 1980 associant des acteurs publics et privés serait la bienvenue pour relever les défis de la transition énergétique et du vieillissement. L’épargne doit cesser d’être captée par les structures publiques en vue de financer des dépenses courantes qui, par nature, ne sont pas rentables. Ces dépenses doivent être réglées par les impôts. L’épargne a vocation à participer au financement d’investissements productifs. Cette allocation s’impose d’autant plus que l’économie est entrée dans un cycle plus inflationniste que le précédent. Cela pénalise les placements de taux dont le rendement réel est amené à être durablement négatif. Les États ne pourront faire face à leurs engagements qu’au prix d’une répression financière forcenée comme ce fut le cas après la Seconde Guerre mondiale. Les épargnants, en cette rentrée 2022, ne devront pas céder à la panique et oser prendre des risques en sortant des chemins connus.
Jean-Pierre Thomas
A lire dans le Mensuel N°101 du Cercle de l’Epargne de septembre 2022
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