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Le livre-enquête du journaliste Victor Castanet, Les Fossoyeurs, a révélé que les conditions d’hébergement des personnes âgées dans les EHPAD étaient indignes. Il est étonnant d’être étonné, tant ce problème est réel depuis des années. Les EHPAD accueillent des personnes âgées que ni les familles, ni les hôpitaux ne peuvent prendre en charge. L’âge moyen d’entrée dans ces établissements est de 85 ans et 2 mois. Il recule d’année en année. La durée des séjours ne dépasse pas, en moyenne, deux ans et sept mois. Les personnes dans ces établissements doivent faire face à plusieurs pathologies exigeant de multiples soins. Les hôpitaux se sont spécialisés dans les actes opératoires avec des séjours qui tendent à se raccourcir. Ils ne sont pas équipés pour gérer sur plusieurs années un grand nombre de patients. Les EHPAD n’ont pas été de leur côté pensés pour être des structures de soins lourds avec du personnel formé à cet effet. Depuis vingt ans, cette réalité s’impose à nous mais nous la récusons par faiblesse. Depuis vingt ans, une grande loi sur la dépendance est attendue afin de trancher les points en suspens : quel financement, quels moyens ? Quel personnel ? La création d’une cinquième branche de la Sécurité sociale ne résout pas ces questions.
D’ici 2040, le nombre de personnes âgées dépendantes devrait doubler. Avec l’éclatement des structures familiales, avec la montée de l’individualisme, la gestion de ces personnes sera un problème de plus en plus sensible. Faut-il créer un nouvel impôt pour financer la dépendance ? Faut-il augmenter la CSG ou les cotisations sociales pesant sur les actifs ? Faut-il mettre en place une assurance dépendance obligatoire financée par les retraités ? L’idée qu’une mutualisation puisse s’organiser au niveau des retraités n’est pas en soi irrationnelle. Les 17 millions de retraités pourraient, en effet, cotiser à une assurance dépendance permettant une prise en charge digne de ce nom. Celle-ci suppose évidemment en parallèle une montée en gamme des EHPAD qui devraient de plus en plus devenir de véritables établissements de soins. La dépendance est avant tout un problème d’accès à des solutions médicales. La revalorisation des métiers au sein de ces établissements est une priorité. La présence de médecins, d’infirmiers en plus grand nombre est une nécessité. La création de nouveaux métiers pouvant s’intercaler entre aides-soignants, infirmiers et médecins est une voie à étudier. Le personnel soignant devrait être encouragé à se spécialiser en gériatrie. Il faudrait également améliorer les moyens de passage d’un statut à un autre, d’infirmier à médecin par exemple. Nous devons, par respect par nos aînés, être davantage innovants. Inspirons-nous des exemples étrangers qui donnent des résultats tant en termes de qualité de vie qu’en termes de coût. Une fois de plus, il nous faut regarder du côté de l’Europe du Nord où les autorités ont refusé de faire des établissements pour les personnes dépendantes des mouroirs.
Le gouvernement qui sera nommé après les élections législatives du mois de juin prochain ne pourra pas reporter la discussion d’un véritable projet de loi sur la dépendance. Il devra faire preuve de modernité et savoir sortir du tout administratif. Le secteur privé ne saurait être le bouc émissaire facile. Une vision d’ensemble non-manichéenne s’impose. Il faut travailler à des partenariats publics/privés. Il faut y associer les collectivités locales et les professionnels de santé, l’objectif étant d’améliorer les conditions de vie de nos aînés.
Jean-Pierre Thomas
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