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Si la croissance économique française est éprise d’une langueur toute monotone, le patrimoine continue sa course en avant. À la fin du premier semestre 2023, l’ensemble des ménages possédaient ainsi plus de 14 000 milliards d’euros de patrimoine, soit un montant de 446 000 euros par ménage. Le patrimoine net a progressé rapidement, entre fin 2009 et fin 2021, pour toutes les catégories sociales. L’augmentation a été de 5 329 milliards d’euros en euros courants durant cette période. Le patrimoine des Français s’est depuis stabilisé à ce niveau. Rapportée à chaque ménage, la valeur du patrimoine net moyen a augmenté de 144 000 euros entre la fin de 2009 et la mi 2023. La hausse du patrimoine a été, sur cette période, de 17 points plus rapide que l’inflation. Elle provient essentiellement des prix de l’immobilier. En douze ans, le patrimoine immobilier s’est accru de 2 684 milliards d’euros. Cette plus-value est latente car les biens immobiliers détenus par les ménages sont essentiellement affectés à la résidence principale et ne donnent lieu qu’à peu de cessions.
Fruit des transmissions et de l’accumulation durant toute la vie, les inégalités de patrimoine sont souvent décriées. Si, après redistribution, le rapport des revenus entre les 10 % des ménages les plus modestes et les 10 % les plus aisés est de 3,5, les 10 % des ménages les plus fortunés possèdent en moyenne près de huit fois le patrimoine médian. Ces derniers détiennent plus de la moitié du patrimoine quand les 50 % des ménages les moins fortunés ne se partagent que 5 % des richesses. Contrairement à quelques idées reçues, les inégalités de patrimoine sont, en France, plus faibles que celles observés dans le reste de la zone euro, car l’immobilier y est un peu mieux réparti. Par ailleurs, les inégalités y sont restées stables depuis 2009. Le patrimoine financier est, en revanche, concentré sur un nombre plus réduit de ménages, ce qui n’est pas sans conséquences en matière de préparation financière de la retraite.
Faute de fonds de pension, les ménages ont, en France, privilégié la pierre, ce qui a contribué à la hausse de son prix, surtout depuis que les pouvoirs publics ont décidé de raréfier le foncier disponible. La pierre n’offre pas toutes les qualités d’un bon placement retraite. Elle est peu liquide et n’est pas à l’abri de fluctuations liées à l’évolution des taux d’intérêt ou de l’attractivité des territoires. L’investissement locatif souvent prôné a, bien souvent, après charges et impôts, un rendement assez faible.
Le choix implicite de l’immobilier a également comme conséquence de priver l’économie réelle de capitaux. La pierre a stérilisé une part non négligeable de l’épargne des ménages au détriment des entreprises. Du fait de l’augmentation du prix des logements en France et de l’appétence des ménages pour ce type d’actifs, le manque à gagner, en vingt ans, pour les entreprises françaises par rapport à leurs concurrentes allemandes a été évalué à plus de 200 milliards d’euros.
La création du Plan d’Épargne Retraite par la loi PACTE en 2019 vise à favoriser la réallocation de l’épargne des ménages sur des supports longs mais force est de constater que celle-ci reste modeste. Fin 2022, l’encours de l’épargne retraite s’élève à 260 milliards d’euros soit bien moins que le Livret A. Or, la France ne manque pas de ressources financières : le taux d’épargne s’est élevé, en 2023, à 17,6 % du revenu disponible brut. Une plus large diffusion des produits retraite par capitalisation devrait être menée par les pouvoirs publics comme par l’ensemble des acteurs économiques afin de drainer les liquidités vers les entreprises et, en particulier, vers celles qui ne sont pas cotées.
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