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Le système financier français : un système résilient

Epargne 6 août 2023

Au cours du premier semestre, aux États-Unis comme en Suisse, plusieurs établissements bancaires ont été confrontés à des problèmes ayant conduit à leur rachat pour éviter une banqueroute. La hausse des taux, surtout elle est brutale, peut potentiellement fragiliser les établissements financiers. En France, le régulateur, l’ACPR, qui relève de la Banque de France, veille au contrôle de ces établissements. En l’état actuel, aucune menace de liquidité ou de la solvabilité n’a été constatée. Les autorités de tutelle veillent également à ce que l’évolution du crédit ne mette pas en danger les agents économiques et par ricochet l’ensemble du secteur financier. En France, les agents non financiers (administrations, sociétés non financières, ménages) se sont fortement endettés ces dernières années. Cet accroissement est encore gérable, même si une vigilance accrue est nécessaire.

Le système financier résiste à la remontée des taux d’intérêt. Les difficultés rencontrées au printemps 2023 par des banques américaines ou suisses ont été résolues sans effet domino notoire. Les mécanismes de supervision institués en 2009 après la crise des subprimes ont rempli leur rôle. Le ralentissement de la progression de l’endettement, en lien avec la hausse des taux, est salutaire pour limiter les risques de solvabilité des différents agents économiques et en premier lieu des ménages ou des entreprises. Les banques et les assureurs français bénéficient d’un niveau élevé de fonds propres et de liquidités pour faire face à la remontée des taux.

La solidité des établissements financiers est soutenue par un cadre prudentiel et de supervision européen rigoureux au sein de l’Union bancaire. Dans l’Union européenne, le cadre réglementaire défini au niveau international (Bâle III) s’applique à toutes les banques, même les plus petites quand, aux États-Unis, il ne s’applique qu’à 13 banques. Les banques régionales américaines sont soumises à des exigences moins contraignantes qu’en Europe. Le modèle de supervision actif de la zone euro, au sein du Mécanisme de surveillance unique (MSU) constitue un gage de sécurité. Les enquêtes menées sur place et sur pièces ainsi que les crash-tests de résistance permettent d’apprécier en temps réel les risques des différents établissements financiers.

Des banques solides

Les banques françaises affichent des niveaux élevés de solvabilité et de liquidités. Elles disposent de dépôts stables. À court terme, elles doivent néanmoins faire face à une remontée de leurs coûts de financement en raison de la progression de l’encours des dépôts rémunérés dans le total des dépôts et du renouvellement de leur dette de marché à des taux plus élevés. Cette évolution au niveau de leur passif pourrait dégrader leurs résultats en 2023.

Des assureurs confiants

L’inflation et la hausse des taux ne sont pas sans incidences pour les assureurs. Pour les assureurs non-vie, l’inflation pèse sur le coût des prestations à servir car les activités sont exposées à une hausse des coûts des sinistres et des frais. Les assureurs vie sont confrontés à un rendement de l’actif moyen inférieur aux taux de marché, ce qui engendre un risque d’augmentation des rachats, en particulier sur les fonds en euros. Sur les cinq premiers mois de l’année, la décollecte des fonds euros a atteint 12 milliards d’euros. Les rachats restent néanmoins mesurés notamment du fait de la revalorisation du rendement des fonds euros intervenue en 2022. Si le Livret A peut concurrencer temporairement la collecte brute, son plafonnement à 22 950 euros limite les sorties de l’assurance vie. La remontée des taux, si elle est progressive, permettra une amélioration du taux de rémunération des fonds euros qui devraient combler ainsi leur écart avec le taux du Livret A. Les assureurs devraient continuer de puiser dans leurs Provisions pour Participation aux Excédents (PPE) pour améliorer cette rémunération.

Des marchés « actions » en proie à une forte volatilité

La volatilité des marchés financiers devrait rester importante compte tenu des incertitudes concernant les taux d’intérêt en lien avec la résorption plus ou moins rapide de la vague inflationniste. Certains indicateurs de valorisation des actifs risqués, en particulier sur les marchés actions, laissent entrevoir un excès d’optimisme pouvant amener à une correction en cas de choc. Une remontée brutale des cours de l’énergie pourrait ainsi donner lieu à un ajustement sur les cours des actions. Les investisseurs ont, en effet, fait le pari d’une baisse de l’inflation au cours du second semestre 2023, baisse qui pourrait être remise en cause en cas de tensions sur le marché de l’énergie ou des produits agricoles.

Selon le Conseil de stabilité financière (CSF), environ 14 % des actifs financiers mondiaux sont gérés par des intermédiaires financiers non bancaires exposés à des risques semblables à ceux des banques. Ces acteurs pourraient connaître des besoins de financement importants en cas de choc de marché, par le biais d’appels de marges ou de demandes de rachats, et ainsi renforcer les dynamiques adverses de marchés à travers des ventes forcées d’actifs. Les autorités de régulation, ACPR et AMF, appellent de leurs vœux un renforcement de leur cadre réglementaire.

Les entreprises françaises endettées mais sans excès majeur

Malgré un endettement élevé au regard des comparaisons européennes, les sociétés non financières (SNF) françaises demeurent solides. Elles peuvent compter sur leurs bons résultats et sur une structure d’endettement majoritairement à taux fixe et avec des maturités relativement longues. Cette situation les protège d’un choc de taux brutal. Depuis décembre 2022, le taux de croissance des financements aux SNF a ralenti, mais reste positif. Le nombre de défaillances d’entreprises poursuit sa normalisation depuis novembre 2021 en se rapprochant du niveau qui prévalait avant la pandémie. Pour les banques, si le risque sur les emprunts des entreprises augmente, il reste maîtrisable.

Une correction mesurée du marché immobilier

La hausse des taux d’intérêt commence à se faire ressentir sur le marché immobilier. La production de crédits reste néanmoins plus dynamique en France que dans le reste de la zone euro. Après plusieurs années de forte hausse, les prix de l’immobilier décélèrent. Ils sont en recul à Paris et augmentent plus faiblement dans le reste de la France. Une correction mesurée des prix de l’immobilier permettrait de ramener le ratio prix/revenu des ménages vers les niveaux acceptables et proches de ceux qui étaient les leurs avant la crise covid.

Les ménages français sont peu touchés par le durcissement de la politique monétaire car ils se sont endettés à taux fixe. L’assainissement des conditions d’octroi du crédit, depuis l’adoption des mesures du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) fin 2020 – taux d’effort maximal des emprunteurs à 35 % des revenus et une durée de prêt maximale à 25 ans pour le crédit à l’habitat, avec une flexibilité limitant à 20 % la part de la production de crédit non conforme à ces conditions – réduit les risques au niveau des remboursements.

L’immobilier commercial en difficulté face à la montée en puissance du digital

Les achats en ligne représentent désormais plus de 10 % de la consommation des ménages. Leur augmentation rapide durant la crise sanitaire et la persistance des habitudes prises influent sur la rentabilité des commerces de détail. Les prix de l’immobilier commercial subissent cette évolution et la remontée des coûts de financements. Pour les banques et les assurances, ces expositions restent modestes par rapport à leur total de bilan. Les fonds d’investissement immobilier ouverts sont exposés à un risque de liquidité, en cas de retrait des investisseurs, mais ces risques sont contrebalancés par la présence d’investisseurs aux comportements stables et la mise en place d’outils de gestion de la liquidité.

Les finances publiques en zone de vigilance

Avec une dette de plus de 3 000 milliards d’euros et un déficit publics de 4,7 % du PIB en 2022, la France figure parmi les mauvais élèves de l’Union européenne en matière de finances publiques. Les mesures de soutien aux ménages et aux entreprises prises après le déclenchement de la guerre en Ukraine ont suivi celles de la crise sanitaire. Elles ont retardé l’assainissement des comptes publics.

À politique inchangée, la dette publique ne diminuerait pas au cours des prochaines années. La Cour des Comptes a souligné que la France sera le dernier pays au sein de la zone euro à entamer la décrue de celle-ci. La France devra faire appel aux investisseurs étrangers pour la financer. Le maintien d’une croissance potentielle élevée est indispensable pour éviter une augmentation des taux d’intérêt.

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Le niveau d’endettement des agents économiques est en France élevé. Il est compensé par un taux d’épargne qui est un des plus importants de la zone euro. L’attractivité financière de la France demeure correcte et permet de faire face à des coûts acceptables aux besoins de financement. Cette situation demeure malgré tout fragile compte tenu de l’ampleur des déficits publics. La poursuite de la remontée des taux d’intérêt pourrait remettre en cause la politique d’investissement des entreprises et placer certaines d’entre elles en difficulté sachant qu’elles doivent rembourser leurs Prêts Garantis par l’État (PGE).

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