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Le suicide en forte croissance chez les jeunes femmes

Prévoyance 12 juin 2024

De plus en plus de jeunes et en particulier de jeunes femmes passent, selon le service statistique du Ministère de la Santé (DREES), à l’acte en matière de suicide. Entre 2015 et 2019, le taux d’hospitalisation pour geste auto-infligé (suicides, tentatives de suicide ou auto-agressions) progresse de façon brutale et inédite. Après l’interruption de 2020, la hausse des cas d’hospitalisation reprend en 2021. En 2022, les niveaux atteints se stabilisent par rapport à 2021 chez les 10-14 ans et poursuivent leur augmentation de façon moins marquée chez les 15-24 ans.

Depuis la fin 2020, le nombre de jeunes femmes âgées de 10 à 24 ans hospitalisées pour tentatives de suicide a fortement augmenté quand la part des patients (hommes comme femmes) âgés de 30 à 55 ans diminue. De ce double mouvement découle une stabilité apparente des taux d’hospitalisation pour ce type de gestes. Les données de la psychiatrie montrent également une très forte augmentation des hospitalisations pour ces motifs chez les adolescentes et les jeunes femmes. La hausse brutale des hospitalisations chez les adolescentes et les jeunes femmes depuis 2020 concerne tout le territoire, les différents niveaux socio-économiques, mais aussi tous les modes opératoires et niveaux de gravité.

Des hospitalisations croissantes pour les femmes

Seulement une tentative de suicide sur deux ferait l’objet d’une hospitalisation. Dans le Baromètre Santé 2021 de Santé publique France, 6,8 % des 18-85 ans déclarent avoir fait une tentative de suicide au cours de leur vie et 58 % d’entre eux se sont rendus à l’hôpital à la suite de cet acte (dont 89 % ont conduit à une hospitalisation).

En 2022, 84 527 patients, dont 64 % de femmes, ont été hospitalisés au moins une fois pour un geste auto-infligé. Rapporté à la population française, cela correspond, en 2022, à un taux de 124 patients pour 100 000 habitants, un chiffre bien plus important chez les femmes (154) que chez les hommes (93).

Les personnes bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire représentent un quart des patients hospitalisés avec un geste auto-infligé, contre 11 % de l’ensemble des personnes ayant consommé des soins en 2022. En revanche, les bénéficiaires de l’aide médicale de l’État (AME) ne représentent que 0,3 % des patients hospitalisés pour ce motif, contre 0,6 % parmi les personnes ayant consommé des soins en 2022. Selon les classes d’âge, les 20 % des habitants résidant dans les communes les plus défavorisées sont 1,2 à 2,2 fois plus nombreux à avoir été hospitalisés pour geste auto-infligé que les 20 % résidant dans les communes les plus favorisées. Entre 2015-2017, trois fois plus d’hospitalisations pour ce type de geste ont été observées chez les 25 % des personnes les plus défavorisées financièrement que chez les 25 % les plus aisées. Cette surreprésentation des plus modestes était constatée à tous les âges.

La proportion de gestes auto-infligés est plus élevée en Bretagne, sur le littoral ouest et dans les Hauts-de-France. Elle est plus faible au sud de la Garonne, sur le littoral méditerranéen, dans le bassin parisien et les départements d’outre-mer ou la Corse. Ces différences sont influencées par la religiosité, les structures familiales, l’emploi ou encore l’accès aux soins psychologiques.

Le nombre de patients hospitalisés pour geste auto-infligé progresse en psychiatrie mais reste stable dans les services Médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) des hôpitaux. Les taux annuels de patients hospitalisés à la suite d’un geste auto-infligé varient selon l’âge et le sexe. En 2022, en MCO, ils vont de 33 patients pour 100 000 habitants parmi les garçons de 10 à 14 ans à 527 pour 100 000 chez les femmes de 15 à 19 ans, avec un pic à 689 pour 100 000 chez les filles de 15 ans. En psychiatrie, ces taux sont inférieurs, mais la variation est également forte, 3 patients pour 100 000 habitants parmi les garçons de 10 à 14 ans à 116 pour 100 000 chez les femmes de 15 à 19 ans. Les taux moyens d’hospitalisation pour geste auto-infligé, en 2021 et 2022 augmentent rapidement par rapport à la moyenne de 2010 à 2019 : +71 % chez les filles de 10 à 14 ans en MCO et +246 % en psychiatrie. La progression est de +44 % pour les adolescentes de 15 à 19 ans en MCO et +163 % en psychiatrie. Elle est de +21 % chez les femmes de 20 à 24 ans en MCO et de +106 % en psychiatrie.

Au cours de la période considérée (2007 à 2022), c’est entre 2009 et 2011 que le nombre de patients hospitalisés pour geste auto-infligé a été le plus élevé, chez les femmes comme chez les hommes, avant de baisser en 2012 et 2013. Entre 2013 et 2019, cette patientèle totale est restée relativement stable, autour de 52 000 femmes et 33 000 hommes par an. En 2020, en raison du covid, ces effectifs baissent en 2020 de 8 % chez les hommes et de 11 % chez les femmes par rapport à la moyenne des sept années précédentes. À partir de 2021, les tendances diffèrent selon le sexe, avec une remontée chez les femmes à des niveaux supérieurs à ceux d’avant la crise sanitaire, quand le nombre de patients masculins se maintient au niveau de 2020.

La crise sanitaire pourrait avoir accéléré des tendances préexistantes, particulièrement en psychiatrie. Dans ce secteur de soins, le taux d’hospitalisation pour geste auto-infligé de la patientèle féminine âgée de 10 à 19 ans double entre 2012 et 2020 puis double de nouveau entre 2020 et 2022. Ces hausses inédites chez les adolescentes et les jeunes femmes contrastent avec la stabilité ou la baisse des patientèles issues des autres catégories d’âge et de sexe. Les données en provenance de l’Union européenne soulignent la tendance à la baisse des tentatives de suicide et des suicides chez les 30 ans ou plus au cours de la période 2010-2019. À partir de 2021, les hausses des hospitalisations d’adolescentes et de jeunes femmes concernent tous les grands groupes de mode opératoire. Les auto-intoxications médicamenteuses volontaires (IMV) constituent, depuis 2014, près des trois quarts des causes de ces hospitalisations et augmentent de 40 % en 2021 et 2022 par rapport à la moyenne des années 2015 à 2019. Les lésions obtenues avec un objet tranchant (incluant les scarifications, non suicidaires) progressent de 64 %. Les gestes violents croissent, quant à eux, de 36 %.

Une sous-estimation des suicides chez les seniors

En France comme en Europe, les suicides des seniors sont moins souvent détectés, et donc sous-estimés. En revanche, pour les plus de 65 ans, les tentatives de suicide aboutissent plus fortement au décès de la personne que pour les autres classes d’âge. En France, 5,8 % des hospitalisations pour geste auto-infligé finissent avec le décès du patient chez les 65 ans ou plus, contre 1,8 % chez les 50-64 ans et moins de 0,2 % chez les 10-19 ans).

L’écart homme/femme en matière de suicide mal expliqué

La santé mentale des filles et des femmes se serait davantage dégradée que celle des garçons et des hommes du même âge. Selon les enquêtes épidémiologiques, une hausse des syndromes dépressifs chez les 15-24 ans concerne essentiellement les femmes. Sur le plan psychologique, elles auraient été nettement plus affectées par les évolutions culturelles et sociétales. Chez les hommes, les problèmes existentiels prennent la forme d’addictions (alcools, drogues), comportements violents ou à risque. Le nombre de patients masculins hospitalisés en raison de l’utilisation de substances psychoactives (avec ou sans addiction) ou d’intoxications alcooliques a néanmoins diminué entre 2012 et 2022, tout particulièrement chez les 15-30 ans et les 40-55 ans. Il progresse en revanche chez les 65 ans. Les jeunes fument moins que leurs aînés et la consommation d’alcool régresse. Le nombre d’accidents de voiture est également en retrait depuis une vingtaine d’années. En revanche, les données de police et de gendarmerie sur les coups et blessures volontaires et les violences sexuelles montrent une progression du nombre de mis en cause masculins au cours de la période de 2016 à 2021. Cette hausse est également liée à une meilleure prise en compte de ces agressions par les forces de police. L’augmentation des délais de prescription et la priorisation de la thématique sont également des phénomènes pouvant affecter le nombre de victimes enregistrées par les services.

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