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Le Livret A en question

Epargne 8 août 2016

Le Livret A serait une mauvaise affaire pour les épargnants, pourtant ils y laissent des sommes confortables, plus de 256 milliards d’euros. Le Livret A serait une mauvaise affaire pour la Caisse des Dépôts et l’État, et pourtant ce dernier a décidé de maintenir son taux à 0,75 %. Comprendra qui voudra !

 Le regain de forme du Livret A

Le Livret A a terminé le premier semestre 2016 en beauté en affichant un quatrième mois consécutif de collecte positive. En effet, au mois de juin, la collecte du Livret A a été de + 690 millions d’euros. Depuis le début de l’année, la collecte nette redevient positive et s’élève désormais à +340 millions d’euros. Au 30 juin, l’encours du Livret A atteint 256,3 milliards d’euros.

Juin est traditionnellement un bon mois pour le Livret A. De nombreux salariés y versent une partie des primes qu’ils touchent en fin de premier semestre. Par ailleurs, les ménages économisent en vue des vacances et de la rentrée.

L’impact de la baisse du taux du Livret A à 0,75 % intervenue le 1er août 2015 s’estompe au fil des mois. La fronde contre le Livret A qui s’est traduite par une décollecte de 15 milliards d’euros entre 2014 et 2015 semble se terminer. Les Français qui, depuis des mois, laissaient dormir sur leurs dépôts à vue des sommes très importantes, 355 milliards d’euros à fin mai contre 240 milliards d’euros à fin mai 2008, en réaffectent une partie sur des placements rémunérés. La baisse du rendement du Plan d’Épargne Logement, à 1 % au 1er août, même si elle ne concerne que les nouveaux contrats, devrait conforter le Livret A, ce dernier bénéficiant de la sécurité et de la liquidité ainsi que d’une exonération fiscale totale. Avec un rendement réel, après prise en compte de l’inflation, de 0,5 %, le Livret A compte tenu du contexte sans précédent de taux négatif peut apparaître comme un produit bien rémunéré. Chez nos partenaires, les produits de court terme offrent des rémunérations bien inférieures.

La décision du Gouvernement de ne pas abaisser le taux à 0,5 % comme il aurait pu le faire, en appliquant la formule, devrait permettre de maintenir la collecte autour de la ligne de flottaison. Un taux de 0,5 % aurait sans nul doute provoqué un rebond de la décollecte comme cela avait été constaté après le 1er août 2015.

Ce mouvement de collecte positive que nous connaissons depuis quatre mois pourrait néanmoins s’interrompre au cours de l’été du fait d’un certain nombre de dépenses incontournables comme les vacances, la rentrée scolaire et le paiement du dernier tiers de l’impôt sur le revenu.

Mais le système du Livret A, unique en Europe, repose sur une série d’équilibres qui seront remis en cause par la baisse des taux d’intérêt. Il a longtemps permis de transformer de l’épargne de court terme en prêts à long terme à un coût raisonnable. En effet, le Livret A a comme principal objectif de financer le logement social. À partir des ressources collectées et centralisées, la Caisse des dépôts prête aux organismes sociaux de l’habitat (OPAC, offices publics de l’habitat (OPH), entreprises sociales de l’habitat (ESH ex-SA HLM)…) à des taux logiquement privilégiés.

À titre d’exemple, le taux du prêt locatif à usage social (PLUS) est égal au taux du Livret A + 0,6 %.

La ressource livret A coûte à la Caisse des dépôts, en moyenne, le taux du Livret A auquel il faut ajouter les frais de collecte et de gestion. Ces derniers ont atteint jusqu’à 1,12 point. Les banques ont ainsi accepté d’abaisser à 0,4 % leurs frais de collecte. Du fait des efforts consentis par les réseaux et par la CDC, le coût de la ressource est inférieur à 1,75 %.

Les taux des prêts étant inférieurs au coût de la ressource, dans le passé, la Caisse des Dépôts pouvait compter sur les bénéfices tirés des placements financiers ; or avec la baisse des taux, ces derniers tendent à disparaître. Le fonds d’épargne de la Caisse des Dépôts est traditionnellement un acheteur important de titres publics or l’État s’endette aujourd’hui en négatif jusqu’à 8 ans.

Les organismes de logements sociaux trouvent encore avantage à passer par la Caisse des Dépôts du fait de la duration des prêts pouvant atteindre 60 ans et des modalités d’accès aux crédits.

En revanche, plus la période de taux sera longue, plus le coût pour la Caisse des Dépôts sera élevé. De même, pour les banques, les ressources non centralisées du Livret A, environ 40 % de l’encours, sont des centres de coût.

Pour mémoire, La Caisse des Dépôts a financé, en 2014, la construction ou l’acquisition de plus de 122 000 logements sociaux construits ou acquis. 274 000 logements sociaux ont été réhabilités et 1 700 projets territoriaux finançant des transports, des lycées, des hôpitaux, du très haut débit, des énergies renouvelables ont été menés.

Retour sur la formule du Livret A

Le Gouverneur de la Banque de France a annoncé qu’il travaillait sur un éventuel changement de la formule du taux du Livret A. Avec la baisse des taux d’intérêt et d’inflation, le Gouvernement éprouve les pires difficultés à appliquer la formule qui date de 2008.

La fixation du taux du Livret A et plus largement de l’épargne réglementée a toujours posé problème. Ce taux conditionne celui de plusieurs autres produits dont le Livret de développement durable, le Livret d’épargne populaire, le livret jeune, le compte épargne logement.

De juillet 2004 à février 2008, le taux du livret A était fixé par une formule automatique calculée à partir de deux indicateurs : le taux Euribor 3 mois du mois précédent et le taux d’inflation glissant annuel, donné par l’indice Insee des prix à la consommation hors tabac du mois précédent. Le résultat trouvé est majoré de 0,25 % et arrondi aux 0,25 % les plus proches. La Banque proposait deux fois par an (mi-janvier et mi-juillet) la réactualisation du taux du livret A pour une mise en application le 1er février et le 1er août.

Cette formule a été amendée en 2008. Ainsi depuis le 1er février 2008, le taux est égal, après arrondi au quart de point le plus proche ou à défaut au quart de point supérieur, au chiffre le plus élevé entre :

  • La moyenne arithmétique entre, d’une part, la moitié de la somme de la moyenne mensuelle de l’Euribor 3 mois et de la moyenne mensuelle de l’Eonia (exprimées avec deux décimales) et, d’autre part, l’inflation en France mesurée par la variation sur les douze derniers mois connus de l’indice INSEE des prix à la consommation de l’ensemble des ménages hors tabac (exprimé avec une décimale) ;
  • L’inflation majorée d’un quart de point.

Que ce soit à la hausse ou à la baisse, les gouvernements n’ont, à plusieurs reprises, pas respecté la formule. Ainsi, lors de la révision du taux du 1er février 2012. L’inflation à retenir du mois décembre 2011 était de 2,4 % ce qui aurait dû entraîner le passage du taux du livret A à 2,75 %, le Gouvernement de François Fillon préféra le statu quo en le laissant à 2,25 %. Pour l’actualisation du 1er février 2013, alors que l’inflation annuelle à 1,2 % aurait dû conduire à un taux de 1,50 % le Gouvernement opta pour une baisse de 0,25 point abaissant le taux à 1,75 %. Toujours en 2013, mais pour l’actualisation du 1er août, alors que l’inflation annuelle aurait dû conduire à un taux de 1 %, le ministre de l’Économie décida de n’abaisser le taux que d’un demi-point, à 1,25 %. Pour l’actualisation du 1er février 2014, alors que le gouverneur de la Banque de France préconise d’abaisser le taux à 1 % et que l’application stricte de la formule conduirait même à l’abaisser à 0,75 %, le ministre décide de le maintenir à 1,25 %. Pour les actualisations du 1er février et 1er août 2016, le Gouvernement n’a pas retenu le taux issu de la formule qui aurait pu aboutir à une baisse du taux à 0,5 %.

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