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La légitimité d’une institution repose, en France, sur la reconnaissance législative et sur la l’affectation de prélèvements. Après son officialisation, au mois de juillet, la branche dépendance est à la recherche de ses financements. A cet effet, l’inspecteur général des Finances, Laurent Vachey, a remis, mardi 15 septembre, au gouvernement son rapport dont certaines propositions pourraient être reprises dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021.
La dépendance, des besoins connus de longue date
Depuis plus de dix ans, les gouvernements se repassent le mistigri de la dépendance et la question de son financement. Le vieillissement de la population qui s’accélère avec la montée en âge des premières générations du baby-boom entraine automatiquement une progression des dépenses liées à la dépendance. Le nombre de personnes de plus de 60 ans en situation de dépendance varie en fonction des critères retenus. Il s’élève à 1,24 million en retenant le nombre de bénéficiaires de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) et de 3,3 millions selon une mesure épidémiologique. Il pourrait même être de près de 4 millions si l’on prend en compte l’auto-déclaration (source : Eurostat). Le nombre de 2,4 millions est également cité. Il comprend les personnes en EHPAD et ceux qui sont à domicile et qui font appel à une aide pour la vie courante. D’ici 2060, le nombre de personnes dépendantes devrait au minimum doubler.
La dépendance est amenée à augmenter en lien avec l’évolution de la démographie. Le nombre de personnes de plus de 60 ans qui n’était que 5 millions en 1980 devrait s’élever à 25 millions en 2040. Ils sont aujourd’hui 16 millions. Les personnes âgées de plus de 75 ans devraient passer de 9 millions en 2020 à 15,6 millions en 2060. Les personnes de plus de 85 ans, les plus susceptibles d’être en situation de dépendance, passeront, de leur côté, de 1,4 à 4,8 millions de 2015 à 2060. Dans le cadre du scénario médian retenu par le Ministère des Affaires sociales, la progression des personnes dépendantes augmenterait entre 1,5 à 1,8 % entre 2020 et 2040. Dans le scénario haut, le taux de progression pourrait atteindre un maximum de 2 % par an entre 2030 et 2040.. Chaque année, plus de 225 000 nouveaux cas de dépendance sont actuellement enregistrés. 2 % des plus de 70 ans sont en situation de dépendance et ce taux monte à 30 % pour les plus de 90 ans. En retenant le taux de progression moyen, le nombre de personnes dépendantes passerait de 1,2 million en 2015 à 1,5 million en 2030 et à 2 millions en 2050
Une augmentation inévitable des dépenses
Le coût actuel de la dépendance se situe entre 41 et 45 milliards d’euros. La dépense publique se monte à 23,5 milliards d’euros soit un peu plus d’un point de PIB, dont plus de la moitié correspond aux dépenses de soins et un gros tiers à l’aide formelle pour les activités de la vie quotidienne. D’ici 2040, la hausse est évaluée, en fonction des hypothèses retenues, entre 0,3 à 0,7 point de PIB.
Selon le rapport Libault de 2019 sur la dépendance, le besoin de financement a été évalué à plus de 6,2 milliards d’euros supplémentaires par an jusqu’en 2024 puis à 9,2 milliards d’euros à compter de 2030.
Avant la crise sanitaire, l’idée était de transférer à la dépendance les ressources de la Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale qui était censée avoir achevé le remboursement de la dette d’ici 2024. La crise en cours entraîne le transfert à la CADES de 136 milliards d’euros de déficits sociaux conduisant à la prolongation de la CADES au minimum jusqu’en 2033. Pour l’année 2020, selon le Ministère des Comptes publics, le déficit de la Sécurité sociale pourrait atteindre 41 milliards d’euros en additionnant les pertes du régime général et du fonds de solidarité vieillesse – le FSV, contre un déficit de 6 milliards d’euros initialement prévu. Au mois de juillet, le gouvernement a certes confirmé le transfert à la nouvelle branche d’une fraction de 0,15 point de la contribution sociale généralisée (CSG) en provenance de la CADES. 2,3 milliards d’euros pourraient être affectés à ce risque en de 2024.
Les pistes du rapport Vachey
Le rapport Vachey souligne que le financement de la dépendance nécessitera un milliard d’euros supplémentaire en 2021. D’ici à 2024, il faudra dégager 3 à 5 milliards d’euros par an d’ici 2024.
Laurent Vachey souligne que le niveau de vie des retraités est supérieur à celui de l’ensemble de la population, dix points au-dessus au mois de juin 2020. Compte tenu de la situation économique, cet écart devrait persister dans les prochains mois voire années. Il en déduit que les retraités pourraient consentir un effort spécifique pour financer en partie la dépendance. Il suggère notamment l’harmonisation du taux de la CSG des retraités les plus aisés, 8,3 % sur celui des actifs, 9,2 %. Actuellement, la CSG des retraités comporte quatre taux variant de 0 à 8,3 % en fonction du revenu fiscal de référence. Le rapport prévoit qu’en contrepartie les retraités pourraient bénéficier de la suppression de la cotisation de 1 % applicable sur les pensions de retraite complémentaires. Cette double mesure rapporterait 780 millions d’euros. Le relèvement du taux de CSG de 1,7 point en 2018 ayant entrainé un profond mécontentement de la part des retraités devrait conduire le Gouvernement à ne pas retenir cette proposition.
L’augmentation de la part de CSG non-déductible sur les pensions applicables aux retraités assujettis à l’impôt sur le revenu est également évoquer et pourrait rapporter 800 millions d’euros.
La réduction du plafond de l’abattement de 10 % de l’impôt sur le revenu des retraités est une proposition qui revient régulièrement sur le devant de la scène. Elle permettrait de récupérer 1,5 milliard d’euros.
Le rapport suggère également des mesures touchant les actifs. Ainsi, il est proposé d’instituer une deuxième journée de solidarité, en doublant la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA). Ce doublement rapporterait 1,9 milliard d’euros nets aux finances publiques. La suppression des allègements généraux pour les salaires supérieurs à 2,5 SMIC dégagerait 1,1 milliard d’euros mais le Gouvernement aurait bien des difficultés à faire admettre cette proposition au moment où le taux de chômage progresse.
Le Gouvernement pourrait également accroître les droits de mutation sur les successions. Ce sujet est d’une rare sensibilité au sein du pays. Le calendrier électoral est peu favorable à l’adoption d’une telle mesure.
Toujours sur le plan fiscal, la suppression de l’exonération de cotisations patronales pour les employeurs à domicile de plus de 70 ans, écartée l’an dernier, est à nouveau suggérée (180 millions). Le plafond de l’abattement fiscal pour les particuliers employeurs pourrait, par ailleurs, être réduit de moitié à 6 000 euros par an (400 millions d’euros d’économie).
La création d’une nouvelle branche de la Sécurité sociale devrait s’accompagner d’une rationalisation des dépenses existantes. Dans cet esprit, le rapport propose de mettre à contribution la branche Famille et de réorienter une partie des crédits de l’Action Logement. La branche Famille étant « structurellement excédentaire », elle pourrait céder 150 millions par an d’ici à 2024 via le Fonds national d’action sociale. Action Logement (ex-1 % patronal) qui est censé investir un milliard d’euros par an en direct dans l’amélioration du logement des personnes âgées, pourrait l’affecter tout ou en partie à la nouvelle branche dépendance. Dans un premier temps, en 2021, 300 millions d’euros de taxe sur les conventions d’assurance accordés à l’organisme en janvier pourraient être affectés à la dépendance. En 2023, une contribution autonomie additionnelle de 0,10 % pour les employeurs de plus de 50 salariés, serait instituée avec en compensation pour les employeurs une baisse de 400 millions de leur participation au financement d’Action Logement.
Le rapport envisage également un prélèvement de 420 millions d’euros par an jusqu’en 2025 sur le Fonds de réserve des retraites qui est déjà mis à contribution pour le financement de la CADES.
Au-delà de ce jeu de bonneteau, la mission a étudié la possibilité de réaliser des économies dans l’attribution des allocations handicap (AAH) ou de l’Allocation de perte d’autonomie (APA), pour respectivement 400 millions et 300 millions d’économies
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