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Le bitcoin a été inventé en novembre 2008 par une personne ou un groupe de personnes, sous le pseudonyme de Satoshi Nakamoto. Le code source de l’implémentation de référence fut quant à lui publié en 2009. L’objectif était de créer un système décentralisé et pair à pair afin d’échanger de la valeur monétaire en s’affranchissant de tout organisme tiers, tel que les institutions financières. En quinze ans, le bitcoin a gagné en notoriété.
Plus de 9 % Français posséderaient des cryptoactifs, essentiellement des bitcoins. Cette proportion dépasse les 15 % chez les moins de 35 ans qui sont plus de 30 % à estimer ce placement compétitif. Le bitcoin, actif « cyberpunk » à ses débuts, prend de plus en plus la forme d’or numérique en devenant un actif de réserve. Comme l’or, le bitcoin est intrinsèquement limité par l’algorithme dont il est issu. Il ne rapporte ni rendement, ni dividendes. Son intérêt se concentre sur son caractère spéculatif.
Lors de la première quinzaine de mars, le bitcoin a battu de nouveaux records en atteignant le 14 mars dernier 73 750 dollars. Une correction de plus de 15 % est intervenue dans les jours qui ont suivi. L’appréciation de plus de 40 % au premier trimestre s’explique en grande partie par l’arrivée des fonds indiciels et par la bonne tenue des valeurs de haute technologie. Pour certains, les cryptoactifs entreraient dans l’ère de la maturité quand pour d’autres ils demeurent de véritables mirages.
En moins de deux ans, le contexte a changé pour les cryptoactifs. En 2022, la hausse des taux d’intérêt et la baisse des cours des valeurs technologiques avaient entraîné la faillite d’établissements spécialisés dans les échanges de cryptoactifs. FTX, la quatrième plateforme d’échanges de cryptoactifs mondiale, valorisée jusqu’à 32 milliards d’euros, avait été ainsi placée en redressement judiciaire le 11 novembre 2022. Un point bas avait été alors touché pour le bitcoin autour de 16 000 dollars.
En 2024, l’engouement pour l’intelligence artificielle provoque une augmentation rapide des valeurs technologiques, or une corrélation existe entre le Nasdaq et le cours du bitcoin, la hausse du premier conduisant à celle du second. Le bitcoin bénéficie surtout du lancement des fonds indiciels (ETF). Le 10 janvier dernier, la Securities and Exchange Commission, le régulateur des marchés financiers américain, a approuvé les demandes de onze sociétés d’investissement, dont BlackRock et Fidelity, concernant la création de fonds négociés en Bourse en bitcoin. Ceux-ci permettent aux investisseurs ordinaires d’accéder, avec des frais limités et sans risque d’escroquerie, à la cryptomonnaie.
Les épargnants ont la possibilité d’acheter, via leur compte titres, des parts de fonds indiciels quand auparavant ils étaient contraints d’ouvrir un compte spécifique auprès d’une structure spécialisée dans l’achat de cryptoactifs, de créer un portefeuille de cryptoactifs et d’effectuer un virement. En quelques jours, les actifs des dix plus grands ETF bitcoin atteignent 50 milliards de dollars. Cette progression s’autoalimente. Les achats d’ETF contribuent à la hausse des cours du bitcoin, incitant de nouveaux épargnants à acheter des parts.
Le lundi 11 mars dernier, le régulateur britannique des marchés financiers, The Financial Conduct Authority (FCA), ne s’est pas opposé à la création d’ETN (Exchange Traded Note) adossés à des cryptomonnaies. Un ETN n’est pas un fonds, à la différence des ETF, mais un titre de créance. Il est assimilable à une obligation mais ne donne pas droit au versement d’intérêts. Son prix fluctue comme celui d’une action. Ces produits seront réservés aux investisseurs professionnels comme les sociétés d’investissement et les établissements de crédit. Le régulateur a souhaité limiter l’accès aux professionnels, considérant que « ces produits ne conviennent pas aux particuliers en raison du risque important de perte en capital ».
Après l’annonce de la FCA, le London Stock Exchange (société spécialisée dans la gestion de places boursières ainsi que dans la production et la diffusion d’informations financières), a indiqué que la Bourse de Londres acceptera de coter des ETN adossés à du bitcoin et de l’ether à partir du deuxième trimestre. Londres, capitale européenne des cryptoactifs, est en compétition directe avec Paris.
Depuis le 21 mars, la banque en ligne « N26 » propose à ses clients français la possibilité d’investir dans les cryptos comme cela est déjà le cas dans six autres pays européens. Cet accès est rendu possible grâce à un partenariat avec la plateforme Bitpanda qui gère l’exécution les transactions et la conservation des cryptoactifs. L’offre permet aux épargnants d’acheter des cryptoactifs sans posséder un « wallet » (portefeuille numérique) ni avoir besoin de s’inscrire sur une plateforme. Les banques en ligne entendent ainsi simplifier l’accès aux bitcoins et fidéliser leur clientèle avant tout constituée de moins de 35 ans.
De mi-mars 2023 à mi-mars 2024, le cours du bitcoin a progressé de plus de 130 %. Sur 5 ans, la hausse est de 1 580 %. A contrario, de décembre 2017 à décembre 2018, ce cours avait été divisé par quatre, passant de plus de 16 000 dollars à moins de 3 500 dollars. Il était passé de plus de 51 000 dollars en mars 2021 à moins de 30 000 dollars en juin 2021. La volatilité du bitcoin ne rebute pas les acheteurs en particulier les jeunes. Ces derniers ont conscience que les fortes variations du cours offrent la possibilité de réaliser des gains rapidement. Les variations de 30 à 50 % en quelques jours sont légion pour le bitcoin. Elles sont admises de la part d’épargnants, jeunes pour la plupart, qui souhaitent avant tout réaliser une plus-value sur un produit hors norme.
Les gains réalisés sur le bitcoin et les cryptos ont été de 37,6 milliards de dollars en 2023. Les investisseurs américains ont réalisé 9,4 milliards de dollars de profits, contre 720 millions pour les Français. En 2022, les pertes sur les cryptos avaient atteint 127 milliards de dollars. Des investisseurs de long terme avaient soldé leurs positions afin de compenser leurs pertes sur le marché des valeurs technologiques en forte baisse ou pour réinvestir dans d’autres projets. La baisse des cours des cryptos a provoqué l’arrivée de nouveaux acheteurs, notamment américains. En France, les épargnants en cryptos sont avant tout des hommes de moins de 35 ans, gagnant plus de 60 000 euros par an (étude KPMG, – Ipsos).
Depuis plusieurs années, les banques centrales travaillent sur les monnaies digitales. Ainsi, en janvier dernier, la Banque Centrale Européenne a lancé un appel d’offres pour sélectionner des prestataires de marché capables de développer la plateforme et l’infrastructure technique amenées à supporter l’euro numérique. Les appels d’offres portent sur plus d’un milliard d’euros de budget, preuve de la volonté de la BCE de mettre en œuvre son projet. Depuis le début de l’aventure, les banques commerciales se montrent plus réservées par crainte de perdre une grande partie de leurs activités. La blockchain permet de se passer d’intermédiaires de confiance, rôle que jouent, par nature, les banques. Elles craignaient notamment une fuite des dépôts.
La BCE a, ces derniers mois, rassuré les banques commerciales en soulignant que la monnaie digitale n’avait pas vocation à remplacer la monnaie actuelle. Elle a précisé que les entreprises et les organismes publics pourraient recevoir et traiter des paiements en euros numériques, mais ne pourraient pas en stocker. Ces euros numériques seraient donc automatiquement transférés en euros classiques. Les particuliers pourraient, quant à eux, payer avec des euros numériques sans avoir à préfinancer leur portefeuille. Leur compte en euros numériques serait relié à leur compte classique. Les banques plaident pour que les dépôts en monnaie numérique soient limités (moins de 500 euros pour BNP PARIBAS par exemple).
La décision de développer, ou non, l’euro numérique sera prise par la BCE d’ici la fin de l’année 2025 pour un éventuel lancement à partir de 2028. L’objectif de la BCE est d’empêcher que les échanges interbancaires européens ne basculent sur une plateforme privée fondée sur la blockchain que pourraient proposer par exemple des banques américaines comme JP Morgan. Elle souhaite éviter qu’un cryptoactif s’impose, en dehors de tout contrôle des banques centrales, comme monnaie d’échange et de réserve.
Au-delà des oppositions des banques commerciales, les monnaies numériques soulèvent des problèmes de confidentialité. Si cette question est encore évanescente en Europe, elle est devenue un thème de campagne présidentielle aux États-Unis. Donald Trump a indiqué sa totale opposition au déploiement du dollar numérique considérant que cela donnerait des pouvoirs exorbitants au pouvoir central, ce dernier étant capable de suivre en temps réel les achats des Américains. Il a évoqué une menace tyrannique du « big government ». Les Républicains estiment que les Démocrates veulent supprimer le numéraire. Pour conjurer cette menace, le Gouverneur de Floride, ancien candidat aux primaires républicaines, Ron DeSantis, a interdit toute monnaie digitale dans son État avant même qu’elle ne soit créée.
Pour le moment, ni la Réserve fédérale (FED) ni la Maison-Blanche n’ont projeté officiellement le lancement d’une monnaie numérique de banque centrale (MNBC). La FED a néanmoins engagé une réflexion sur le sujet et a publié un premier rapport, expliquant notamment qu’une telle monnaie numérique pourrait « favoriser des paiements plus rapides et moins chers » et « élargir l’accès des consommateurs au système financier ». À la demande de Joe Biden, le département du Trésor a également publié, à la fin de l’année 2022, un rapport sur « le futur de la monnaie et des paiements ».
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