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L’agence américaine S&P a dégradé la note souveraine de la France, qui passe de « AA- » à « A+ », avec une perspective stable. Le mouvement n’est pas totalement inattendu, notamment parce que S&P avait assorti sa note précédente d’une perspective négative au mois de février dernier. La surprise est venue d’un changement de calendrier : l’agence, qui prévoyait une révision de la note française fin novembre, a décidé de l’avancer au vu des derniers événements politiques.
« Malgré le dépôt d’un projet de budget pour 2026 au Parlement cette semaine, l’incertitude sur les finances publiques de la France demeure élevée », expliquent les analystes de S&P dans la note accompagnant leur décision. « Bien qu’à notre avis l’objectif de déficit public de 5,4 % du PIB en 2025 sera atteint, nous croyons qu’en l’absence de mesures additionnelles significatives pour réduire le déficit, la consolidation budgétaire sur notre horizon de prévision sera plus lente qu’attendu précédemment. »
L’agence ne croit pas à un retour du déficit public à 3 % du PIB d’ici 2029. Concernant la dette publique, elle estime qu’elle représentera 121 % du PIB en 2028, alors qu’elle devait initialement se stabiliser autour de 115 %. Cette année, elle pourrait atteindre 118 % du PIB.
L’agence indique que l’incertitude politique pourrait peser sur l’économie française en freinant l’investissement, la consommation privée et la croissance, malgré la présentation du projet de budget 2026 au Parlement.
La baisse de la note de la France est avant tout un constat, qui en soi ne provoquera pas une hausse des taux d’intérêt. Les investisseurs financiers ont déjà intégré la détérioration de la situation financière française. De nombreux pays européens, moins bien notés que la France, empruntent d’ailleurs aujourd’hui à de meilleurs taux. L’Espagne et le Portugal, tous deux notés « A- », se financent à moindre coût depuis un an. Les taux italiens sont désormais proches de ceux de la France ; ils ont même été inférieurs durant la période de crise gouvernementale au début du mois d’octobre.
L’échec des motions de censure contre le gouvernement de Sébastien Lecornu s’est traduit par une réduction des tensions sur la dette française. En trois jours, la prime de risque appliquée à la dette française — mesurée par l’écart entre les coûts d’emprunt français et allemands à dix ans — est redescendue à ses niveaux de fin août dernier.
La dégradation de la note de la France n’a pas d’influence directe, mais elle contribue au climat de défiance et d’attentisme. Les ménages et les entreprises risquent ainsi de différer leurs investissements. Les taux des emprunts immobiliers ont cessé de diminuer, en lien avec la hausse des taux des OAT.
La France est dans l’angle de tir des agences depuis une quinzaine d’années. Moody’s a placé, en 2011, le pays sous « perspective négative ». Le 13 janvier 2012, Standard & Poor’s abaisse la note de la France de AAA à AA+, en raison de la montée des déficits et de la vulnérabilité de la zone euro. Fitch et Moody’s suivent durant l’année 2012, la France perdant ainsi son AAA auprès de toutes les grandes agences.
Avec la hausse de la dette publique, l’absence de réformes structurelles et la diminution de la croissance, Fitch puis Moody’s placent, en 2015, la note française à AA, avec des perspectives stables mais prudentes. Entre 2017 et 2019, un statu quo fragile s’installe, la note restant à AA ou Aa2 selon les agences.
En 2020, avec la pandémie, la dette publique progresse rapidement, mais les agences ne sanctionnent pas immédiatement la France, car tous les pays sont touchés et la BCE soutient massivement les dettes souveraines. En avril 2023, Fitch abaisse la note française de AA à AA-. L’agence souligne la dette élevée, les tensions sociales liées à la réforme des retraites et la difficulté à réduire le déficit. En mai 2023, S&P place la note française sous surveillance négative, alimentant la crainte d’une nouvelle dégradation. La France se retrouve alors avec une note autour de AA- ou Aa2, soit deux crans en dessous du triple A.
Le 12 septembre 2025, Fitch lance un nouveau cycle de baisse de la note française. S&P vient de s’y rallier avant, certainement, d’être rejointe par Moody’s le 24 octobre prochain.
Les pays conservant encore leur triple A auprès des trois grandes agences sont : l’Allemagne, le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, la Suède, la Suisse, l’Australie, le Canada et Singapour.
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