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Questions à Philippe Crevel, Directeur du Cercle de l’Epargne
La France est un des pays phares de l’épargne en Europe. Pour autant, les produits proposés aux épargnants évoluaient lentement, le Livret A, l’assurance vie fonds euros, le compte titre… Certes, il y a eu l’essor des OPC (SICAV, FCP) mais cela commence à dater. Il y a néanmoins des changements qui se dessinent avec une diffusion plus large de produits (ETF, private equity, etc.) et de services (gestion déléguée) qui étaient auparavant réservés aux professionnels de la finance et aux ménages les plus aisés à travers les family office.
Depuis quarante ans, de nombreuses innovations financières ont vu le jour permettant dans certains cas d’offrir des rendements plus importants. Elles ont été rendues possibles par la libéralisation des marchés financiers et par l’essor des nouvelles technologies. L’industrie financière a généré d’importantes innovations dont ont profité les institutionnels (caisses de retraite, compagnies d’assurances, gestionnaires de fonds ou de fortune, etc.). Depuis 2015, face à la baisse des taux d’intérêt et à la volatilité des marchés, l’objectif des professionnels a été de trouver des sources de rendement les plus pérennes possible et les plus stables possible dans le temps.
La diffusion des innovations auprès d’un large public a pris du temps. Les épargnants français, rejoints en cela par les professionnels du secteur, sont assez conservateurs sur le plan des produits et des techniques. L’arrivée de la génération Y à l’âge d’être épargnant actif et des fintechs contribuent, depuis quelques années, à une évolution rapide des pratiques. La crise sanitaire a accéléré la mutation du marché de l’épargne qui se digitalise à grande vitesse, que ce soit au niveau de la production qu’au niveau de la distribution. L’accentuation de la concurrence entre les établissements financiers favorise une démocratisation des produits et des services. Ainsi, l’accès à la banque privée et à la gestion dynamique de son épargne s’adresse à un plus grand nombre de clients. Auparavant, il fallait un patrimoine financier de plus de 250 000 euros pour accéder à des services personnalisés ; dorénavant, les établissements financiers peuvent proposer des services sophistiqués pour des montants de patrimoine inférieurs. Cette évolution est à mettre sur le compte des fintechs qui ont permis aux épargnants d’accéder, à frais réduits, à des techniques de gestion en temps réel de leur épargne et cela dès 1 000 euros pour certaines d’entre elles. Les établissements financiers traditionnels ont été contraints de revoir leur modèle. La gestion déléguée s’est ainsi développée, que ce soit pour les comptes titres, les PEA, les contrats d’assurance vie ou les PER.
Le private equity est intéressant. C’est en règle générale un placement moins volatil que les actions, décorrélé des cycles, qui peut offrir des rendements importants. Le private equity ou capital investissement était jusqu’ici l’apanage des fonds institutionnels ou des gestionnaires de fortune. Les tickets d’entrée étaient élevés, de plusieurs dizaines de milliers d’euros. L’AMF a appelé de ses vœux un accès plus large au private equity. Des compagnies d’assurances ont développé des fonds adaptés aux épargnants moyens avec des tickets d’entrée plus faibles (une vingtaine d’euros pour un fonds proposé par un acteur en ligne) et une bonne mutualisation pour limiter les risques.
Les ETFs (Exchange traded funds) sont des outils de simplification pour accéder aux marchés financiers. Créés il y a 32 ans, les ETFs, également appelés trackers sont des fonds indiciels qui cherchent à suivre le plus fidèlement possible l’évolution d’indices boursiers, à la hausse comme à la baisse. Ainsi, en investissant dans un ETF, il est possible d’investir d’un coup dans les 40 entreprises du CAC40 ou dans les 500 de l’indice Standard and Poor 500. Les ETFs se caractérisent par des frais limités permettant une gestion dynamique d’un portefeuille. Les jeunes épargnants, ceux qui sont adeptes des comptes en ligne, plébiscitent les ETFs. Le marché européen des ETFs représente près de 1 400 milliards de dollars sous gestion, avec des taux de croissance de plus de 20 % chaque année.
Avec les variations de change, en particulier la hausse du dollar qui pourrait déboucher sur une baisse en 2023, ainsi qu’avec l’augmentation de l’inflation, les établissements financiers proposent des couvertures. Pour le grand public, ce type de protection est assez nouveau.
Évidemment, plus les produits sont complexes, plus les frais sont susceptibles d’augmenter. Les épargnants ont tout intérêt à faire jouer la concurrence et négocier. L’accès plus aisé à des produits comme le private equity, les ETFs, ou les hedge fonds constitue une avancée non négligeable pour les épargnants. Ces produits peuvent être logés dans des contrats d’assurance vie ou dans des PER permettant d’améliorer le rendement de ces produits.
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