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Édito de Jean-Pierre Thomas, Président du Cercle de l’Épargne : Vive la négociation sociale !

Les éditos du Président 8 novembre 2023

Le régime complémentaire des salariés, l’Agirc Arrco a, en 2022, versé 87 milliards d’euros de pensions à 13 millions de retraités, soit 20 à 60 % de leurs revenus de remplacement (hors revenus du patrimoine). Ce régime est géré, depuis ses origines, par les partenaires sociaux, employeurs et salariés. Les discussions entre eux peuvent être tendues, les oppositions multiples mais depuis sa création, il n’y a pas eu de réel blocage. Des solutions courageuses ont, à maintes reprises, été adoptées afin d’assurer la pérennité du principal régime complémentaire français. Des réserves pour faire face aux aléas de la conjoncture et au vieillissement de la population ont même été constituées, 68 milliards d’euros en 2023. Dans un pays ayant une tradition dépensière, ces réserves doivent être louées. Le gouvernement a eu la tentation de capter une partie des réserves de l’Agirc-Arrco, prétextant que celles-ci augmenteraient avec la mise en œuvre de la réforme des retraites portant l’âge légal de 62 à 64 ans.

L’enrichissement des complémentaires serait ainsi indu et justifierait un prélèvement visant à compenser le surcoût du relèvement du minimum contributif des régimes de base à hauteur de 85 % du SMIC. Déjà, lors de la réforme visant à instituer un régime universel des retraites en 2018, la majorité avait envisagé d’absorber toutes les réserves. La propriété des réserves constituées par les régimes de retraites complémentaires appartiennent-elles à la nation en raison que ces régimes sont de nature obligatoire ou aux assurés qui y ont contribué par leurs cotisations ? Ces régimes de nature assurantielle reposent sur des contrats implicites. Les entreprises relèvent d’institutions de retraite complémentaire, réparties entre douze groupes paritaires de protection sociale et deux institutions isolées. La ponction des réserves aurait sans nul doute été assimilée à une intrusion dans la gestion paritaire. Le Gouvernement, à juste titre, a décidé de ne pas réaliser ce prélèvement qui aurait pu être perçu comme une sanction à l’encontre des gestionnaires de l’Agirc-Arrco. Ces derniers ont, ces dernières années, fait preuve de responsabilité en acceptant, par exemple, un mécanisme de bonus/malus visant à inciter les assurés à reporter d’au moins 12 mois leur départ à la retraite. Ils ont également réussi, pas à pas, à faire converger et à fusionner le régime des cadres et celui des non-cadres.

Cette affaire de réserves est l’occasion de s’interroger sur le mode de fonctionnement de la sphère sociale. En France, à la différence de ce qui se pratique à l’étranger, tout remonte au sommet. L’État s’occupe de tout, ne laissant que peu d’espace aux corps intermédiaires. En s’appuyant sur la force de la loi et du monopole de la coercition, il impose aux acteurs économiques et sociaux sa volonté. Or, ce mode de fonctionnement est une source de blocages et de déresponsabilisation. Il crée de la suspicion. Au moment où une révision de la Constitution est annoncée notamment pour y insérer le principe d’une autonomie de la Corse, il ne serait pas inutile de garantir un domaine relevant de la négociation sociale, domaine où l’État, sauf circonstances exceptionnelles, ne pourrait plus intervenir. Le champ du social obéirait aux mêmes principes que celui des domaines de la loi et du règlement. Sauf cas spécifiques, l’État ne pourrait pas investir ce domaine réservé aux partenaires sociaux. Ce domaine dévolu à la sphère sociale pourrait englober notamment la retraite, la santé, la prévoyance ou les accidents du travail. Le Conseil constitutionnel aurait alors comme mission de veiller au respect par l’exécutif et le législatif du domaine et de la valeur constitutionnelle des accords fruits des négociations.

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