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Transition énergétique, retraite, santé, dépendance, digitalisation, autant de défis qui exigent d’importants investissements. Ces derniers ne sont réalisables que s’ils s’accompagnent d’un puissant effort d’épargne. Il peut précéder l’investissement et prendre alors la forme de prêts ou de fonds propres pour les entreprises ou intervenir a posteriori, les agents économiques engageant une partie de leurs gains pour rembourser leurs dettes ou verser des dividendes. Pas de croissance sans épargne et sans intermédiation. Pas de croissance sans le moteur des prêts et du financement par les marchés. Nous ne pourrons pas échapper à cette loi économique intangible. Croire que « l’argent magique » pourra tout financer est une illusion qui ne peut que déboucher sur une grande implosion financière. Nous ne manquons pas d’épargne. La Banque de France a, au début du mois de mars dernier, confirmé que le surplus d’épargne né de la crise sanitaire a atteint 175 milliards d’euros. Le flux d’épargne financière total sur deux ans a été évalué à 318 milliards d’euros, 184 milliards en 2020, suivis de 134 milliards en 2021. Cette épargne, essentiellement investie en produits de taux, n’est pas inutile, bien au contraire, elle est le carburant de notre croissance, à condition qu’elle soit investie de manière efficiente.
Selon la dernière enquête du Cercle de l’Épargne/Amphitéa publiée au mois d’avril 2022, si les Français restent assez conservateurs en matière de placements, un nombre croissant d’entre eux, en particulier chez les moins de 35 ans, estime que l’avenir passe, en la matière, par les cryptoactifs. Ces derniers qui ne produisent rien, qui ne donnent pas lieu à versement d’intérêts ou de dividendes, attirent, en raison du potentiel de plus-values qu’ils offrent. Au moment où l’éthique envahit le monde de la finance qui se doit de financer la transition énergétique, il est assez surprenant de constater que des épargnants, et en particulier les plus jeunes, sont prêts à sacrifier leur morale à des jeux purement spéculatifs. L’argent n’a pas d’odeur d’autant plus quand il est digital ? Aux États-Unis, au Brésil ou en France, des jeunes actifs abandonnent leur travail pour devenir traders et conseillers en cryptoactifs. Nous ne sommes pas loin de l’ère des bulbes de Tulipes en 1637 aux Pays-Bas. Pour gagner de l’argent tout en contribuant à la croissance, l’investissement dans les entreprises, dans les PME, dans les entreprises de taille intermédiaire demeure la meilleure des solutions. Les Français, même s’ils préfèrent les produits de taux, prennent progressivement conscience que les actions offrent du rendement sur longue période. Il y a un changement d’état d’esprit qu’il convient de conforter et d’éviter qu’il soit mis à mal par des dérives spéculatives. Il faut, en France, créer une véritable industrie du financement des entreprises de taille intermédiaire, de la recherche et des innovations. Les fonds doivent, comme aux États-Unis, irriguer les territoires et associer les centres de recherche universitaires qui doivent cesser de vivre en vase clos. La capacité du pays à s’industrialiser à nouveau, à être au cœur des batailles économiques de demain dépendra de la mobilisation de son abondante épargne.
Jean-Pierre Thomas
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