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Trois question à Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne: Placements, épargne, comment bien finir l’année ?

Epargne 10 décembre 2021

L’année 2021 se termine avec un rebond de l’inflation qui cohabite, pour le moment, avec des taux d’intérêt très bas. Les épargnants ayant investi en produits de taux sont ainsi mis à la diète. Est-ce que cette situation qualifiable en économie de « répression financière » est amenée à perdurer ?

En cette fin d’année, les épargnants qui ont privilégié, depuis le début de la crise sanitaire, les produits comme les livrets bancaires, les livrets d’épargne réglementée ou les fonds euros sont confrontés tout à la fois à la faiblesse récurrente des taux d’intérêt et à la hausse des prix. Les faibles taux sont la conséquence des politiques monétaires exceptionnelles ont mises en œuvre par les banques centrales au début de l’épidémie. Elles sont censées s’achever avec le retour à la normale de la situation tant sanitaire qu’économique. Si, aux États-Unis, une réduction progressive des rachats d’obligation doit intervenir à compter du mois de décembre, pour la zone euro, elle ne devrait débuter, au mieux, qu’en 2023. Pour la hausse des taux directeurs, les banques centrales se montrent, pour le moment, très prudentes. Depuis le milieu de l’année, avec le rebond économique qui se nourrit des plans de relance et de l’épargne stockée depuis le début de la pandémie, les prix sont orientés à la hausse. L’à-coup brutal de la demande génère des frictions car l’offre est encore pénalisée par la désorganisation des circuits d’approvisionnement engendrée par l’épidémie. Des pénuries de matières premières et de biens intermédiaires pèsent sur la production de biens de consommation. Elles provoquent des allongements des délais dans les livraisons. Dans ce contexte, l’inflation a dépassé, en octobre, 5 % aux États-Unis et 4 % au sein de la zone euro. Cette situation est une mauvaise nouvelle pour les épargnants qui ont investi dans des produits non-indexés.

Le CAC40 a battu au mois de novembre un record vieux de 21 ans. Les actions ne sont-elles pas surévaluées avec un risque de krach non négligeable ?

Les records sont faits pour être battus mais certains durent plus longtemps que d’autres. Le record du CAC40 de 2000 a tenu 21 ans. Parmi les grands indices boursiers, le CAC40 était le seul à ne pas avoir effacé les conséquences de l’éclatement de la bulle Internet. Les déboires de Vivendi et d’Orange, des valeurs financières après les crises de 2008 et de 2012 expliquent, en partie, cette anomalie. La désindustrialisation française, marquée par le recul du secteur automobile et le nombre réduit de grandes entreprises de haute technologie, a également pesé sur l’indice. Les politiques monétaires accommodantes, le fort rebond de l’économie après le confinement et les bons résultats des entreprises ont permis au CAC40 de dépasser, le 3 novembre 2021 le record de 6 944,77 points, établi le 4 septembre 2000. Il a depuis franchi la barre des 7 000 points.

Un krach est par nature difficile à prévoir. En l’état, la valeur des entreprises n’est pas exagérée au vu de leurs résultats. Les cours restent, par ailleurs, soutenus par la faiblesse des taux d’intérêt. Avec le regain d’inflation, des hypothèses de remontée plus rapide des taux ont été lancées. Il convient en la matière de ne pas surréagir. L’inflation est en hausse en lien avec les plans de relance engagés au sein de nombreux États et en particulier aux États-Unis. Dans ce pays, la consommation a connu un gain de 15 % par rapport à la période d’avant pandémie. Un tel bond ne peut conduire qu’à des tensions sur l’offre. Nous aurons une idée plus précise de la réalité durable de l’inflation dans le courant de l’année 2022. De toute façon, il faudra à un moment ou un autre sortir des politiques monétaires exceptionnelles. Les banques centrales sont conscientes que cette sortie sera un exercice périlleux afin d’éviter tout dérapage financier. Le cours des actions dépendra de la croissance européenne et mondiale, de l’évolution des relations entre les grandes zones économiques ainsi que de celle la pandémie. Ces facteurs d’incertitude incitent à opter pour une diversification de bon aloi au niveau de ces placements en privilégiant des valeurs résilientes.

Une part non négligeable des ménages se détourne des produits d’épargne traditionnels en optant soit pour le compte courant, soit pour des placements alternatifs comme le bitcoin. Comment appréciez-vous cette évolution et quelles sont les conséquences à terme ?

De nouveaux placements apparaissent en lien avec la blockchain. Les jeunes de moins de 35 ans sont de plus en plus attirés par ce type de placements digitaux alternatifs, ainsi que par les actions. Ils plébiscitent les ETF et le bitcoin. Selon l’enquête Cercle de l’Épargne/ Amphitéa, 20 % placent ce dernier parmi les placements les plus intéressants. En soi, ce cryptoactif ne rapporte ni intérêt, ni dividende. Le gain potentiel est purement spéculatif. Les jetons non fongibles (nft) constituent également un nouvel espace pour l’épargne. Un nft est un enregistrement, généralement sur la blockchain Ethereum, qui représente sous forme numérique, une image, un texte, ou une vidéo.

Le monde des cryptoactifs est propice à toutes les dérives et toutes les spéculations. Il est, cependant, indéniable qu’ils seront amenés à jouer un rôle croissant au sein de l’économie. En raison du système peu normé et peu encadré des cryptoactifs, les risques pris par les acquéreurs sont importants. Les banques centrales réfléchissent à la mise en place de monnaies digitales qui leur permettront de superviser l’espace financier digital. Si des gains sont réalisables avec le bitcoin et les nft, ils ne doivent pas masquer le fait que les risques sont importants et que le poids de ce type d’actifs dans une allocation se doit d’être marginal sous peine d’être exposé à d’importantes déconvenues.

A lire dans le Mensuel N°92 de décembre 2021

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