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Comité de Suivi des Retraites : les effets inattendus de la réforme de 2023

Retraite 6 août 2023

Dans le prolongement du Conseil d’Orientation des Retraites (COR), le Comité de Suivi des Retraites (CSR) a rendu son avis sur la situation du système de retraite français. Il en a profité pour apprécier les futurs effets de la réforme adoptée durant le printemps de cette année.

La mission du CSR, fixée par la loi de 2014, est de rendre un avis annuel sur la situation du système de retraites, à partir des projections établies par le Conseil d’orientation des retraites (COR). L’avis doit porter à la fois sur l’adéquation et l’équité des pensions servies aux assurés, et sur les perspectives financières des régimes. La réforme des retraites de 2023 a complété les missions du CSR, l’enjoignant de suivre le respect d’un nouvel engagement, celui d’une pension au moins égale à 85 % du SMIC net pour un individu à carrière complète. Par anticipation, elle a aussi chargé le CSR d’une évaluation plus complète des effets de la réforme, à conduire d’ici 2027.

Au mois de juin dernier, le COR avait souligné sans son rapport que malgré le report de l’âge légal et l’accélération de l’allongement de la durée de cotisation, le système serait confronté à des déficits d’ici 2030. Le CSR confirme cette analyse invitant le cas échéant le gouvernement à prendre des mesures. Il estime par ailleurs que la réforme pénalisera les Français les plus aisés et avantagera les moins riches, contrairement à de nombreuses allégations de ces derniers mois.

Le CSR juge que la réforme était nécessaire mais qu’elle ne sera pas suffisante pour empêcher, d’ici 2030, la résurgence des déficits. Selon les auteurs de l’avis la réforme peut apparaître « financièrement moins efficace qu’elle n’avait peut-être été envisagée au départ ». Le déficit devrait être de 0,2 point de PIB en 2030, quand la réforme avait comme objectif sa disparition. S’il suggère qu’une nouvelle réforme pourrait être nécessaire, le Président du CSR ne propose rien de concret, laissant cette délicate mission à son successeur.

Le CSR indique que les invalides et les inaptes au travail ont été bien protégés, leur âge légal de départ à la retraite restant fixé à 62 ans. La réforme n’a pas d’impact pour ceux qui partaient à 67 ans, âge d’annulation de la décote. Il précise que les 25 % des actifs les moins riches seront gagnants tandis que les 25 % les plus favorisés seront légèrement perdants. Le gain a été évalué à 7 % pour les petites pensions. La principale mesure contribuant à augmenter les petites pensions est la disposition prévue dans la loi pour assurer une retraite minimum égale à 85 % du SMIC à tous ceux qui ont eu une carrière complète au SMIC. Le CSR mentionne dans son avis qu’il « faudra être vigilant sur le respect de cet engagement ». Cet objectif ne serait atteint qu’en additionnant les pensions de retraite de base avec celles des régimes complémentaires. Or si le gouvernement peut fixer les règles sur la retraite de base, celles des retraites complémentaires dépendent essentiellement des partenaires sociaux. Compte tenu de l’évolution de la valeur d’achat et de service du point des retraites complémentaires, le taux repassera en dessous des 85 % du SMIC selon Didier Blanchet, le Président du CSR.

Pour le CSR, la réforme des retraites de 2023 aboutira à un décalage de l’âge de liquidation, de l’ordre de 0,7 an en moyenne et à long terme s’ajoutant à la hausse prévue avant 2022. Ce décalage moyen est inférieur à la hausse de deux ans de l’âge d’ouverture des droits en raison des mesures compensatrices et du fait que des assurés ne pourront pas poursuivre leur activité jusqu’à l’atteinte du nouvel âge de la retraite à taux plein. Ils seront contraints de partir à la retraite avec une décote.

Âge conjoncturel de départ en retraite estimations et projections 2022 et 2023

Sources : Drees, et Trajectoire, hypothèses COR 2023.

Le report de l’âge légal de 62 à 64 ans se traduira par une moindre espérance de vie à la retraite mais celle-ci continuera à augmenter génération par génération.

Durée de la retraite par génération, générations 1940 à 2000

Sources : Drees, et Trajectoire, hypothèses COR 2023.

Le Comité de Suivi des Retraites s’est gardé de proposer des pistes de réformes, considérant que le temps est à la mise en œuvre de la réforme de 2023 et non à l’adoption de nouvelles mesures. Cette prudence est également dictée par le fait que le comité entend attendre les premières évaluations de la réforme avant de se déterminer sur d’éventuels aménagements. Par ailleurs, les régimes de retraite sortent d’une période troublée marquée par la crise sanitaire. En 2024, le COR réalisera un rapport concernant tous les régimes qui permettra de disposer d’une photographie précise de leur situation financière. Le CSR indique dans sa conclusion que l’année prochaine, les pouvoirs publics devront se conformer au nouveau cadre budgétaire défini par la Commission de Bruxelles, ce qui pourrait donner lieu à des ajustements pour les régimes de retraite.

Concernant la réforme systémique visant à instituer un régime universel, le CSR comprend son abandon compte tenu de la situation économique et sociale. Il souligne néanmoins que la réforme de 2023 des retraites a démontré que le recours aux curseurs paramétriques a atteint ses limites. Il note que la complexité du système actuel rend les réformes, par nature, peu lisibles. Le partage du constat sur la situation réelle des régimes est de moins en moins possible. Le débat sur les soldes comptables est inaudible car donnant à des analyses contradictoires.

La réforme de 2023 a été, aux yeux des rapporteurs du CSR, d’autant plus source de tensions qu’elle concernait des femmes et des hommes à proximité de l’âge de départ à la retraite, celles et ceux issus notamment des générations 1961 à 1965. Le CSR estime que le gouvernement aurait dû mieux anticiper l’adoption des mesures d’âge. L’instauration de clauses automatiques d’indexation pour l’âge de départ à la retraite ou de la durée de cotisation en fonction des gains d’espérance de vie permettrait des ajustements moins violents. Le CSR préconise également de trouver des moyens de réduire la dépendance des régimes de retraite à la croissance. Par ailleurs, il souhaite également que les liens entre régimes de base et régimes complémentaires soient renforcés afin de permettre, par exemple, le respect de la règle du taux de remplacement à 85 % pour les personnes à revenus modestes.

Le Comité de Suivi des Retraites a complété les travaux du Conseil d’Orientation des Retraites en soulignant avec plus de netteté les équations délicates auxquelles le système de retraite français est confronté. L’idée d’une convergence des règles est implicitement suggérée afin de faciliter l’équilibrage des comptes. Avec une population de retraités amenée à augmenter et une faible croissance, la réapparition des déficits n’est pas en soi une surprise. Le point important que soulèvent les deux organismes est la dégradation à venir du pouvoir d’achat des retraités, ce qui risque d’être un sujet sensible dans les prochaines années.

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