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Au début du mois de décembre 2023, le cours de l’once d’or dépassait 2 000 dollars. En un an, l’once a gagné 15 % et sur dix ans, près de 70 %. L’or, même s’il a perdu son rôle d’étalon monétaire, demeure une valeur-refuge. Ce fut le cas en 1973, en 1980, en 2009, en 2011 et depuis 2020. Le record date du mois de janvier 1980, en plein deuxième choc pétrolier, à 2 500 dollars l’once en valeur actualisée (dollar 2023) et 850 dollars en valeur non actualisée. Entre deux crises, l’or peut connaître de longues périodes de prix bas (inférieurs à 1 500 dollars).
Depuis quelques mois, l’or retrouve quelques lustres. La guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, ainsi que les tensions au Moyen-Orient, concourent à son appréciation. Les craintes de la survenue d’une nouvelle crise financière influent également sur son prix. L’or est une valeur refuge mais c’est aussi une matière première qui s’échange sur les marchés. La bijouterie reste le principal vecteur d’achat de l’or devant les banques centrales, les investisseurs privés et l’industrie de l’électronique-informatique.
L’or a été une source de fascination du fait de sa rareté, de sa densité, de son éclat et de sa pérennité. Il y a plus de 6 000 ans, les Égyptiens exploitaient déjà l’or du Nil. Les premières mines ont été ouvertes il y a 5 000 ans. L’utilisation de l’or comme monnaie intervient six siècles avant notre ère, entre 561 et 546 av. J.-C. (dates de début et de fin de règne du roi Crésus sur la Lydie, pays d’Asie Mineure). Il tenait ses richesses du Pactole, la rivière qui cachait une multitude de paillettes d’or. Par sa rareté, l’or permettait une régulation assez facile par les autorités. Sa résistance et sa densité sont deux caractéristiques clés qui lui ont permis de jouer le rôle d’étalon et de réserve.
Du fait de ses caractéristiques, l’or s’est progressivement imposé comme étalon pour définir la valeur des devises. L’étalon-or (en anglais : Gold Standard) est un système monétaire dans lequel l’unité de compte ou l’étalon monétaire correspond à un poids fixe d’or. Dans un tel système, les devises sont toutes convertibles par la comparaison de leur valeur en or. Dans ce système, toute émission de monnaie se fait avec une contrepartie et une garantie d’échange en or. L’or constitue de fait une monnaie internationale, qui sert au règlement des échanges et comme instrument de réserve pour les banques centrales des pays qui l’ont adopté.
Les partisans de l’étalon-or mettent en avant la stabilité de ce système et l’obligation des États à gager leur émission de monnaie. Dans les faits, ce système n’empêche pas l’inflation et les variations de change à travers la dépréciation de la monnaie. Il avantage les pays bien dotés en or au détriment de ceux qui en sont dépourvus. L’or est par ailleurs une matière première utilisée par de nombreux secteurs d’activité et qui dépend de l’extraction des mines. Son cours peut fluctuer indépendamment de la situation financière des États. L’étalon-or, s’il a traversé plusieurs siècles, est apparu inadapté en période de crise. Il correspond à une économie à faible croissance reposant sur des échanges internationaux limités.
Les accords de Bretton Woods en 1944 avaient réintroduit l’or comme étalon monétaire international mais de manière indirecte. Seul le dollar était convertible en or (35 dollars par once), tandis que les autres monnaies étaient indexées sur le dollar. Les réserves des banques centrales pouvaient être constituées de devises et non plus d’or. Le gouvernement américain garantit la valeur du dollar, mais n’est pas obligé d’avoir une contrepartie en or aux dollars émis.
Face à la multiplication des déficits extérieurs américains et pour lutter contre l’inflation, de nombreux États dont l’Allemagne fédérale et la France demandent la conversion des dollars qu’ils détiennent en or. Or, les États-Unis, ne souhaitant pas perdre leur stock d’or cessent de manière unilatérale d’effectuer la convertibilité le 15 août 1971. Le passage aux changes flottants scelle la fin des accords de Bretton Woods qui sont définitivement abandonnés avec la démonétisation de l’or intervenue dans le cadre des Accords de la Jamaïque les 7 et 8 janvier 1976.
Si l’or a perdu son rôle officiel d’étalon et de réserve de change, les banques centrales en conservent toujours en stock, voire, en ce qui concerne les pays émergents en achètent. L’or est un outil de crédibilisation et de diversification pour les banques centrales.
Malgré la fin de la convertibilité du dollar en or et les Accords de la Jamaïque qui ont supprimé officiellement son rôle d’étalon, l’or demeure un des éléments de réserve des grandes banques centrales. Ces derniers mois, les banques centrales de plusieurs pays émergents (Chine, Russie, Inde, Pays du Golfe) effectuent des achats d’or. Pour certains, l’or est un moyen de réduire leur exposition au dollar. Il demeure un actif de réserve et un symbole de puissance.
Le plus gros acheteur déclaré en 2022 a été la Turquie dont la banque centrale possède près de 500 tonnes d’or. La Banque populaire de Chine (BPoC) reste très présente sur ce marché, son stock d’or dépassant 2 100 tonnes. La Banque nationale du Kazakhstan est également active et possède un stock de plus de 300 tonnes.
Réserves d’or banques centrales en milliards de dollars (septembre 2023) | |
États-Unis | 8 133 |
Allemagne | 3 353 |
Italie | 2 452 |
France | 2 437 |
Russie | 2 333 |
Chine | 2 192 |
Suisse | 1 040 |
Japon | 846 |
Inde | 801 |
Pays-Bas | 612 |
Zone Euro | 507 |
Turquie | 479 |
Taïwan | 424 |
Ouzbékistan | 384 |
Portugal | 383 |
Pologne | 334 |
Arabie Saoudite | 323 |
Royaume-Uni | 310 |
Kazakhstan | 309 |
Liban | 287 |
Espagne | 282 |
Autriche | 280 |
Thaïlande | 244 |
Singapour | 230 |
Belgique | 227 |
Algérie | 174 |
Tout l’or sorti de terre ou de l’eau est estimé à 177 200 tonnes qui se répartissent entre la bijouterie (85 900 tonnes), l’épargne (35 500 tonnes), les réserves des banques centrales et autres institutions officielles comme le FMI (30 500 tonnes) ainsi que les applications industrielles (21 600 tonnes). Les réserves des gisements encore à exploiter sont évaluées à 54 000 tonnes d’or (source : World Gold Council).
Le secteur de l’électronique est le principal utilisateur industriel d’or. Ce dernier est recherché du fait de sa bonne conductibilité électrique. C’est ainsi que smartphones, ordinateurs, télévisions contiennent de l’or. La demande d’or issue du secteur téléphonique atteint chaque année quelques dizaines de tonnes. La présence en quantités infinitésimales d’or dans les composants électroniques conduit à un important gaspillage. Des centaines de millions de téléphones sont produits chaque année contenant environ 0,50 dollar d’or qui n’est pas recyclé.
L’or, du fait de sa résistance, est également utilisé par l’industrie aéronautique et spatiale. Les fabricants de satellites et de véhicules spatiaux recourent, en quantité non négligeable, à l’or. Les panneaux de film polystyrène plaqués d’or sont utilisés afin de réfléchir les rayons infrarouges et stabiliser la température des satellites. L’or est aussi utilisé comme lubrifiant pour les pièces mécaniques d’engins spatiaux. Les molécules d’or ont la capacité de glisser l’une sur l’autre sans se rompre, ce qui procure l’action lubrifiante.
Dans la construction, l’or entre dans la composition de verres spéciaux, comme ceux qui équipent les façades des immeubles modernes. L’or sert à réfléchir les radiations solaires, ce qui limite la montée en température de l’immeuble, l’été. À l’inverse, il aide à réfléchir la chaleur interne vers l’intérieur, ce qui permet de conserver la chaleur d’un immeuble en hiver. La grande malléabilité de l’or permet de le presser en feuilles d’un micromètre d’épaisseur. L’or sert alors d’élément de décoration comme pour le Dôme des Invalides. Il a l’avantage de ne pas se corroder. Du fait de sa rareté et de son prix, les industriels tentent de remplacer l’or par d’autres matières premières. Les substituts industriels de l’or sont, le palladium, la platine et l’argent.
Le cours de l’or dépend de l’offre et de la demande qui peuvent émaner des banques centrales, des investisseurs institutionnels, des ménages, de l’industrie électronique et des mines aurifères. En 2023, la demande en or a connu des fluctuations non négligeables. Elle a été orientée plutôt à la baisse au cours des trois premiers trimestres avant de repartir à la hausse. L’augmentation des taux d’intérêt a conduit les investisseurs à s’orienter vers les produits de taux. L’appréciation du dollar a joué contre le cours de l’or. Pour neutraliser l’effet de change, le cours de l’or tend à baisser quand le dollar monte.
Au troisième trimestre, en rythme annuel, la demande en or s’est établie à 1 147 tonnes, en baisse de 6 % selon le rapport trimestriel du Conseil mondial de l’or (CMO). Les achats des banques centrales ont de leur côté baissé de 27 % par rapport au troisième trimestre de l’an dernier, à 337,1 tonnes. Ce recul est surtout dû à un effet de comparaison défavorable avec des achats exceptionnels de 459 tonnes au troisième trimestre 2022. Dans le secteur de la bijouterie, la demande d’or a légèrement baissé (de 2 % en glissement annuel), à 516,2 tonnes. La faiblesse de la demande de bijoux en or en Chine (-6 %) a compensé le rebond de la demande en Inde (+6 %).
L’investissement physique en pièces et lingots a diminué au troisième trimestre (-14 %), totalisant 296,2 tonnes. Les investisseurs individuels préfèrent de plus en plus les fonds indiciels à la possession directe de l’or. la demande d’or dans le secteur technologique – le métal jaune se retrouvant dans les composants de nombreux appareils – a également un peu reculé (-3 %) pour atteindre 75,3 tonnes au troisième trimestre. Au cours du quatrième trimestre, la demande en or a, en revanche, été plus soutenue. Les achats des banques centrales ont progressé. Les anticipations au niveau des taux d’intérêt jouent désormais en faveur de l’or. Les investisseurs s’attendent à une stabilisation puis à une décrue de l’or en 2024. La baisse attendue du dollar contribue à la hausse du cours de l’or tout comme le maintien des tensions géopolitiques (Ukraine, Proche-Orient, relations sino-américaines).
En 2022, la demande en or avait atteint son niveau le plus élevé depuis 2011, en lien avec les achats records des banques centrales qui avaient plus que doublé en un an, selon le rapport du Conseil mondial de l’or (CMO). La demande s’était établie à 4 740,7 tonnes, en augmentation de 18 % par rapport à 2021. En lien avec les importants excédents commerciaux réalisés par les pays producteurs de pétrole et les velléités de dédollarisation, la demande en or des banques centrales a atteint en 2022, 1 135,7 tonnes ; contre 450,1 l’année précédente. Les achats de lingots d’or et les pièces de monnaie avaient été, en 2022, importants notamment de la part d’investisseurs chinois. Au total, les investissements en lingots et pièces avaient totalisé 1 217,1 tonnes en 2022, contre 1 190,9 en 2021.
Les secteurs de la bijouterie et de la technologie avaient, en revanche, enregistré une légère baisse de la demande, respectivement de 2 et 7 % sur l’année (2 189,8 tonnes pour les bijoux et 308,5 tonnes pour la technologie). L’essoufflement de la demande du secteur technologique s’explique par une diminution de la production d’équipements informatiques en lien avec le repli de ce secteur après les achats provoqués par la crise sanitaire (télétravail).
L’or est une valeur-refuge mais en tant que matière première, il ne rapporte rien. Il ne sert aucun intérêt, aucun dividende. Son attrait est double. Il peut être un moyen de paiement ultime et générer une plus-value potentielle, sous réserve de l’acheter et de le vendre au bon moment. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que l’or peut générer de frais de garde.
L’or se présente sous différentes formes. Sont considérés comme des placements « or » :
Le prix de l’or possédé n’est pas égal à son poids. Il faut en effet prendre en compte des facteurs liés au support. Ainsi, le prix incorpore ce qui est appelé la prime de l’or.
La prime de l’or = (la valeur de la pièce – sa valeur en or)/valeur en or
La prime d’or est fonction de la nature du support : plus les pièces sont petites et difficiles à produire et plus leur prime risque d’être élevée. Elle est également fonction de la qualité de l’épreuve. Une pièce de mauvaise qualité, mal conservée subira une perte de valeur. La prime dépend enfin de l’offre et de la demande. Elle diffère en fonction du lieu où s’effectue la vente. Les pièces françaises sont moins recherchées à New York, ce qui entraîne une baisse du prix.
L’or est tout à la fois une valeur-refuge, sujet à la spéculation mais aussi une matière première. Le prix de l’or repose sur des facteurs tout à la fois économiques, politiques, géostratégiques et psychologiques.
Le cours peut dépendre :
Celui qui veut investir dans l’or peut le faire en optant pour des actions de sociétés aurifères ou des trackers. L’or papier résout le problème des frais de garde de l’or physique. En outre, il peut générer des revenus. La liquidité est plus importante qu’avec de l’or physique. Plus de 300 entreprises minières d’or cotées sont présentes sur les places financières, essentiellement américaines, britanniques ou canadiennes.
Un épargnant peut acheter de l’or soit directement, auprès d’un guichet d’une agence bancaire, soit indirectement, auprès d’un bureau de numismatique et de change ou auprès d’un courtier spécialisé. Se développent également les sites de vente en ligne. Il convient de regarder si ces sites disposent de toutes les autorisations. Il convient d’éviter les sites installés à l’étranger.
La loi Hamon de 2014 a renforcé la législation sur les ventes d’or (bijoux, pièces, objets…) afin de mieux protéger les vendeurs qui cèdent leurs biens contre de l’argent.
Afin de mieux informer le vendeur, un contrat de prévente est désormais obligatoire. Il doit comporter un certain nombre d’informations telles que le poids et le titrage des bijoux ou des objets, le cours officiel et le prix de vente détaillé (taxes et frais compris). Les négociants doivent afficher les prix de rachat de manière visible. Cette obligation concerne aussi bien les magasins que les sites de rachat en ligne. À défaut, ils s’exposent à une amende de 3 000 euros ou de 15 000 euros si le négociant est une société. Les particuliers qui vendent leur or ont droit à un délai de rétractation de 24 heures. Si, dans ce délai d’un jour, le vendeur souhaite récupérer son bien, il ne peut subir aucune pénalité.
Les sites de vente et d’achat d’or se rémunèrent de différentes manières, le plus souvent par le prélèvement d’un pourcentage sur les transactions effectuées. En moyenne, les vendeurs d’or se rémunèrent de 1 à 4 % par transaction, et ceux effectuant les rachats entre 2 et 10 %.
L’achat de pièces frappées après 1800 et de lingots est exonéré du paiement de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA). Les pièces en or de collection (frappées avant 1800) sont soumises à la TVA de 20 % car elles ne sont pas considérées comme des moyens de paiement légaux. La TVA s’applique également sur les pièces frappées après 1800 si la prime (différence entre le prix de la pièce et le prix de son poids en or) est supérieure à 80 %.
En ce qui concerne l’or papier (certificats, trackers, actions de société aurifère, fonds d’actions de sociétés aurifères), aucune taxe n’est due à l’achat. Pour autant, des frais de transactions sont perçus par le courtier.
La fiscalité applicable est celle des revenus et des plus-values de cession des valeurs mobilières. Depuis le 1er janvier 2018, les plus-values sont taxées par défaut au titre du Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) de 30 %. Le détenteur de titres peut opter pour l’Impôt sur le Revenu (IR) mais dans ce cas tous ses placements seront soumis à ce type d’imposition. Les gains sont imposés au taux marginal d’imposition. Les prélèvements sociaux (17,2 %) sont dus dès le premier euro de gain.
Les particuliers ont le choix entre la taxe forfaitaire et le régime de la plus-value.
La taxe forfaitaire s’élève à 11 % du montant total de la transaction, décomposés comme suit : 10,5 % de Taxe sur les Métaux Précieux (TMP) et 0,5 % au titre de la Contribution au Remboursement de la Dette Sociale (CRDS). L’éventuelle plus-value ne rentre donc pas en compte dans le calcul de l’impôt.
À l’inverse, la taxation au régime de la plus-value porte sur la différence entre le prix de vente et le prix d’achat. Si celle-ci est nulle ou négative, aucun impôt est à acquitter. Si elle est positive, la taxe s’élève à 36,2 %, (19 % d’impôt sur la plus-value et 17,2 % de prélèvements sociaux). La plus-value imposable bénéficie d’un abattement de 5 % par année de détention à partir de la troisième année de détention. Après 22 ans, la vente d’or est totalement exonérée d’impôt.
Le régime de la plus-value s’applique seulement si le propriétaire peut justifier de la date et du prix d’acquisition de son or. Les factures pour être valables doivent être nominatives. Les pièces ou lingots vendus doivent être mentionnés explicitement avec leur numéro sur la facture.
La vente d’un bijou ou d’une montre contenant de l’or est exonérée de taxes à condition que sa valeur soit inférieure à 5 000 euros. Au-delà de ce montant, une taxe forfaitaire de 6,5 % est appliquée. Ce régime fiscal s’applique également pour la vente de pièces de monnaie antérieures à 1800 qui ne sont pas considérées comme de l’or d’investissement. Elles sont assimilées à des objets de collection.
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