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Arnaques à l’épargne, comment s’en prémunir ?

Epargne 6 octobre 2022

4 questions à Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Épargne

L’épargne n’intéresse pas que les banques et les assureurs, elle intéresse de plus en plus les voleurs et les fraudeurs. Faux sites, propositions de faux livrets aux rendements alléchants, hameçonnage, usurpation d’identité, les techniques sont multiples et la fraude tend à se développer. Quelles sont les techniques les plus fréquemment utilisées ?

L’hameçonnage ou « phishing » en anglais est la technique frauduleuse la plus communément utilisée sur le web. Elle vise à leurrer l’internaute pour l’inciter à communiquer des données personnelles en se faisant passer pour un tiers de confiance. Les fraudeurs passent par des mails, des publicités, en ayant recours, le cas échéant, à des logos officiels. Les escrocs n’hésitent pas à créer des sites frauduleux ressemblant à des sites de sociétés respectables. Ils peuvent aussi créer des sites proposant des placements à fort rendement, sites souvent logés dans des pays étrangers. Des publicités alléchantes peuvent rediriger des internautes vers ce type de sites sur lesquels sont proposés des super-livrets, des actions, des placements alternatifs, des cryptoactifs, des NFT, etc. Ces sites peuvent fonctionner sur le principe des pyramides de Ponzi. L’escroc demande un premier versement qui donnera lieu à une rémunération attractive incitant l’épargnant à verser de nouvelles sommes. Au bout de quelques mois, le site ou ceux qui en sont à l’origine disparaissent en ne donnant plus suite aux emails. L’argent versé est parti sous d’autres cieux.

Les escrocs peuvent également démarcher par téléphone. Ils exercent généralement une forme de pression sur leurs interlocuteurs, en soulignant que leur offre est limitée dans le temps. Ce phénomène est loin d’être marginal. L’ACPR, le régulateur de l’assurance et de la banque, vient d’ajouter 437 sites à sa liste noire.

Les fraudeurs pour capter des épargnants utilisent tous les possibilités qu’offrent les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Ils sont présents sur des applications comme YouTube, Facebook, Twitter, Instagram ou TikTok. Ils s’insèrent dans les réseaux de rencontre, les « chat » des jeux vidéo. Ils peuvent se faire passer pour des influenceurs ou recourir à ces derniers pour abuser des internautes. Par le biais de faux profils, les escrocs peuvent parler pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, à leurs potentielles victimes, dans l’optique de gagner leur confiance et de leur soutirer leur épargne. Un Youtubeur, baptisé « Crypto Gouv », aurait ainsi arnaqué jusqu’à près de 300 personnes et détourné 4 millions d’euros en proposant des investissements en cryptomonnaies. Une quarantaine de plaintes ont été déposées et le parquet de Paris a ouvert une enquête mi-juillet. L’escroc présumé avait réussi à rassembler une communauté de 4 000 personnes avec lesquelles il échangeait quotidiennement sur des applications de messagerie comme « Telegram » et « Discord ». Il a annoncé lui-même qu’il partait avec tout l’argent le 9 juillet, avant de disparaître, sans que personne ne connaisse sa véritable identité.

Quels sont les types de produits pouvant faire l’objet de fraude ?

Tous ! Les livrets d’épargne, les actions, les placements alternatifs comme le vin, les diamants, les parchemins ont donné lieu, ces dernières années, à de multiples escroqueries.

De nouveaux terrains de jeu sont aujourd’hui ciblés par les escrocs, tels que les cryptomonnaies et les NFT. L’imagination des voyous n’a pas de limite. Étant moins régulés que les placements classiques, les cryptoactifs attirent les convoitises. Des escrocs peuvent ainsi créer des cryptomonnaies en quelques minutes et faire miroiter des gains importants à ceux qui les souscriraient. Ils demandent à quelques complices d’acheter leur cryptoactif afin de faire monter le cours et attirer ainsi des épargnants crédules. Quand ceux-ci en ont acheté suffisamment, ils, peuvent, au choix, partir avec l’argent de leurs victimes ou vendre d’un coup leurs actifs, ruinant au passage les internautes. Les NFT, en vogue chez les jeunes épargnants sont également une source de fraudes. Les créateurs de NFT font augmenter de manière artificielle leur valeur avant de la rendre illiquide en effectuant des ventes rapides et massives.

Comment se préserver de ces agissements ?

Il faut respecter quelques règles !

  • Ne jamais succomber à l’appât du gain facile ;
  • Se méfier des sites non agréés et hébergés en dehors de l’Union européenne ;
  • Ne jamais communiquer ses coordonnées bancaires sans avoir un minimum de garanties sur le destinataire.

Pour aider les Internautes à éviter les pièges, le Gouvernement a publié, le 19 juillet dernier, un guide de prévention contre les arnaques, réalisé en coopération avec les autorités de contrôle des marchés financiers, des banques et des assureurs, l’AMF et l’ACPR. Ce guide appelle notamment à faire preuve d’une vigilance particulière sur les réseaux sociaux, devenus des points d’entrée majeurs pour les arnaques. En cas de moindre doute sur un site ou un démarcheur, il faut vérifier s’il bénéficie des agréments en consultant le site de l’AMF ou de l’APCR.

Les épargnants peuvent consulter une série de registres :

  • Le registre REGAFI qui recense les établissements financiers agréés,
  • Le registre REFASSU pour vérifier qu’un organisme d’assurance est autorisé,
  • Le site internet de l’ORIAS, organisme chargé de tenir le registre des intermédiaires financiers,
  • La base GECO des organismes de placement collectif (OPC) et sociétés de gestion agréées.

Depuis l’adoption de la loi PACTE, les intervenants qui font appel à l’épargne pour des placements atypiques dans des biens concrets doivent impérativement être enregistrés auprès de l’AMF.

Que peuvent faire les victimes d’arnaques ?

Les victimes potentielles peuvent appeler INFO ESCROQUERIES au numéro vert 0805 805 817 (service et appel gratuits depuis la France du lundi au vendredi de 9h à 18 h 30). Elles seront alors conseillées sur les démarches à réaliser. Dans tous les cas, il faut prévenir sa banque et arrêter le cas échéant les prélèvements.

Si la fraude est liée à un site, à un intermédiaire français ou, à défaut, établi dans un État de l’Union européenne, les moyens de recours sont plus nombreux. L’Autorité des marchés financiers (AMF) est compétente quand la fraude concerne des intermédiaires financiers ayant l’autorisation de commercialiser des produits financiers en France. Il en va de même pour le médiateur de l’AMF qui ne pourra aider au règlement d’un litige à l’amiable qu’à cette condition.

En cas de présomption d’offre frauduleuse et de préjudice, pour des sommes inférieures à 10 000 euros, il est possible de déposer une plainte auprès du commissariat ou de la gendarmerie de son lieu de résidence https://www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr. Pour les sommes supérieures à 10 000 euros, il faut déposer plainte à la gendarmerie, à la police ou auprès du procureur de la République du Tribunal de grande Instance.

La plainte doit être détaillée et comporter l’ensemble des éléments qui pourront faciliter le travail des autorités judiciaires. La victime devra préciser les modalités du contact, le nom du site, les sommes investies et les coordonnées des personnes éventuellement en contact. Elle devra fournir les échanges de mails, les ordres de virement, les éventuelles captures d’écrans, les contrats reçus de la part du site en question.

Les victimes peuvent également effectuer un signalement sur le portail officiel du ministère de l’Intérieur même en l’absence de perte financière. Ce signalement peut être utile pour empêcher d’autres tentatives d’escroquerie. Pour les courriels, il est possible de faire un signalement sur la plateforme « Signal Spam  ».

Interview à retrouver sur BFM Business

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