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Mise en cape de l’économie mondiale et mobilisation des Etats

Economie 16 mars 2020

Face à l’épidémie, la nécessité de casser les chaines de transmission impose à tous les Etats de mettre en cape leur économie. Cet exercice sans précédent déroute

Jamais, depuis la Seconde Guerre mondiale l’économie mondiale a été confrontée à une telle situation, un ralentissement généralisé provoqué par une épidémie. Ce ralentissement est la conséquence des confinements imposés pour enrayer la diffusion du virus au sein des populations. Après avoir été cantonné durant trois ou quatre mois, en Chine, sa prolifération à l’échelle mondiale créée un grave problème de santé publique qui s’accompagne d’une déstabilisation des circuits économiques et financiers. Les conséquences de cette crise sans précédent seront importantes. Elles seront néanmoins moindres en cas de coordination internationale et en cas. Depuis quelques jours, après l’effet de stupeur, une mobilisation internationale se dessine.

Les Etats-Unis contrattaque

La banque centrale américaine est très active depuis le début de l’épidémie mondiale. Après avoir baissé de 0,5 point ses taux directeurs le 9 mars et annoncé le 12 mars dernier, l’injection d’un total de 1 500 milliards de dollars en trois tranches pour éviter des perturbations inhabituelles sur le marché, elle a récidivé dimanche 15 mars. Face à cette situation sans précédent, la banque centrale américaine, la FED, a décidé, à nouveau, de baisser d’un point ses taux directeurs, qui seront désormais compris entre 0 % et 0,25 %. Depuis le mois de décembre 2018, la FED a baissé ses taux de deux points. Elle n’envisage pas pour le moment l’adoption de taux négatifs. Le président de la Fed, Jerome Powell, a souligné, en conférence de presse, que cet outil n’était pas souhaitable pour les Etats-Unis. Il estime que les taux négatifs est une source de difficultés financières pour les banques et les assurances. A demi mot, ils critique la BCE qui ne dispose pas de marges de manœuvre du fait de l’application de taux négatifs depuis de longues années.

La FED a également annoncé un programme de rachats de dettes bancaire, d’entreprise et immobilière, pour un montant d’au moins 700 milliards de dollars (626 milliards d’euros).

Elle s’est engagée à mener une opération coordonnée avec cinq autres banques centrales – Zone euro, Canada, Japon, Royaume-Uni, Suisse –, afin de garantir la liquidité avec une mise à disposition de dollars,

Par cette décision, la FED reprend ses achats de titres, connues sous le nom barbare de « quantitative leasing » (QE), qu’elle avait menées après la crise de 2008. Ces opérations, destinées à assurer la liquidité du marché et à contrôler les taux d’intérêt à moyen et long terme, avaient conduit à augmenter le bilan de la banque qui était passé de 900 milliards de dollars à plus de 4 500 milliards. Ce bilan était redescendu à 3 750 milliards de dollars en 2018 avant de remonter à 4300 milliards de dollars en 2019.

Le Président de la FED a indiqué que la situation économique et financière n’est en rien comparable à 2008. Avant la survenue de l’épidémie, l’économie américaine était saine avec un taux de chômage au plus bas. Le système financier est beaucoup plus résistant qu’il y a douze ans. Les banques disposent de fonds propre plus importants et ont réussi à plusieurs reprises les « stress tests ».

Les décisions de la FED complète les annonces du Président des Etats-Unis du Vendredi 13 mars. Ce dernier a décrété l’état d’urgence nationale. Cette décision permet de débloquer près de 50 milliards de dollars en faveur des Etats pour faire face à l’épidémie. L’action sera ainsi coordonnée par la Federal Emergency Management Agency (Fema), qui a l’habitude de venir en aide aux victimes d’ouragans et d’inondations. L’agence pourra assister les autorités locales. L’état d’urgence permet aussi aux hôpitaux de contourner certaines restrictions pour faire face à la situation.

L’Europe met entre parenthèse la règle des 3 %

En Europe, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a garanti vendredi une « flexibilité maximale » dans l’application des règles communautaires sur les déficits et sur les aides d’Etat. Elle a porté à 37 milliards d’euros le montant du fonds européen de soutien aux entreprises.

La BCE entre temporisation et volontarisme

La réunion de la Banque centrale européenne du jeudi 12 mars était attendue après celle de la FED de la semaine dernière qui avait abouti à une diminution des taux de 0,5 point. Il y a quelques jours, Christine Lagarde avait affirmé face aux chefs d’Etat et de gouvernement européens que la Banque centrale européenne était prête à utiliser tous les outils à sa disposition pour limiter, autant que possible, les conséquences économiques de l’épidémie de coronavirus. Contrairement aux attentes de nombreux investisseurs, la BCE a décidé de maintenir inchangé ses taux. Le taux de dépôt reste ainsi fixé à -0,5 %, ce qui constitue un niveau bas historique. Elle a, en revanche, annoncé des mesures en faveur du système bancaire et des Etats souverains. Ainsi, la BCE offrira aux banques commerciales de nouveaux prêts et des taux encore plus favorables sur les liquidités mises à leur disposition, et elle envisage d’ajouter une enveloppe supplémentaire pour ses achats d’actifs sur les marchés de 120 milliards d’euros d’ici la fin de l’année, ce qui devrait faciliter le financement des Etats. En injectant ces liquidités, la banque centrale devrait maintenir à des niveaux très bas les coûts d’emprunt des Etats et des entreprises. Cette augmentation n’est pas sans poser des problèmes. En effet, elle ne peut pas acheter plus d’un tiers d’une ligne d’obligation émise par un Etat. Comme la dette de l’Allemagne s’est réduite ces dernières années, la BCE risque d’atteindre assez rapidement ce plafond sachant que la répartition des rachats est proportionnelle aux poids des Etats de la zone euro. Les décisions de la BCE ont été mal comprises par les investisseurs qui souhaitaient une baisse des taux. Or, actuellement, la crise du coronavirus fait peser plutôt un risque de solvabilité tant pour les administrations publiques que le secteur privé. Les taux sont déjà à un niveau extrêmement bas. Les entreprises ne se lanceront pas dans des investissements importants tant que l’épidémie ne sera pas jugulée. L’important est de passer le cap de la crise sans tensions financières importantes. Dans ce contexte, la BCE a fait preuve de sagesse et de courage. La décision de la FED de baisser ses taux n’a eu qu’un effet passager et n’a pas empêché la forte baisse des marchés constatée depuis lundi 9 mars. François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France et membre du conseil de la BCE, a déclaré vendredi 13 mars sur Radio Classique que « s’il y a des risques de fragmentation dans la zone euro nous utiliserons toutes les flexibilités possibles. Nous l’avons déjà fait dans le passé et le ferons à l’avenir chaque fois que cela est nécessaire ». Par ce discours, il confirme le rôle de banquier en dernier ressort de la BCE.

Les autres grandes banques centrales en mouvement

La banque centrale norvégienne a annoncé également vendredi une baisse surprise de 50 points de base de son principal taux directeur à 1%. Pour enrayer la chute des marchés, vendredi 13 mars, la Banque du Japon a injecté des liquidités sur le marché bancaire et offert de racheter 1,9 milliard de dollars d’obligations. Elle a par ailleurs annoncé l’achat de plus de 101 milliards de yens (10,4 milliards de dollars) d’ETF (trackers qui répliquent les indices boursiers).

L’Allemagne sort du bois

Les ministres allemands de l’Economie et des Finances, Peter Altmaier et Olaf Scholz, ont déclaré que « toutes les armes sont sur la table » et que « nous ferons tout ce qui est nécessaire pour protéger les entreprises et les emplois ». Ils ont prévenu que les mesures coûteront « des dizaines de milliards d’euros ». La possibilité de recourir à l’endettement n’est plus un tabou. Comme en France, l’objectif est d’assurer les acteurs économiques du soutien déterminé du gouvernement pour qu’ils maintiennent leur activité. Le dispositif de chômage partiel qui avait bien fonctionné en 2008, est réamorcé. Un bouclier en faveur des entreprises a été adopté. Il prévoit des facilités fiscales, notamment des reports d’impôts à hauteur de plusieurs milliards d’euros, mais aussi et surtout un programme illimité de crédits pour assurer la liquidité des entreprises. Une enveloppe de 500 milliards d’euros de crédits sera dégagée. L’idée de nationaliser des entreprises en difficulté est également prévu pour éviter un effet domino au sein des secteur stratégiques.

La France, la santé publique, les entreprises et l’emploi

En France, le Président de la République a annoncé, lors de son intervention jeudi 12 mars, que la priorité était la santé publique. Le Premier Ministre, le 14 mars a placé la France en phase 3 avec la fermeture des commerces (hors pharmacien, alimentation et tabacs) Il a également souligné que le Gouvernement veillerait à soutenir l’économie pour éviter une paralysie du pays et pour faciliter la reprise. Plusieurs mesures économiques exceptionnelles sont prises afin d’atténuer les effets de la crise pour les entreprises et les salariés. Ainsi, les entreprises qui le souhaitent pourront également « reporter sans justification, sans formalité, sans pénalité, le paiement des cotisations et impôts dus en mars ». L’Etat met en place un dispositif de soutien du chômage partiel qui couvrira les salariés jusqu’à hauteur de 4,5 fois le SMIC. Les licenciements ne seraient plus autorisés.

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